Al-Ahram Hebdo : Pourquoi était-il nécessaire pour l’Egypte de recourir au Conseil de sécurité dans la question du barrage de la Renaissance ?
Ayman Salama : L’Egypte s’est tournée vers le Conseil de sécurité pour tirer la sonnette d’alarme et dénoncer l’intransigeance de l’Ethiopie. C’est une démarche très importante. Elle vise à placer le conseil devant ses responsabilités en ce qui a trait au maintien de la paix internationale et à faire pression sur l’Ethiopie pour qu’elle respecte le droit international et ne remplisse pas le barrage avant qu’un accord ne soit conclu avec les pays en aval. Il faut également noter que le mémorandum soudanais présenté au Conseil de sécurité le 24 juin dernier a renforcé la position de l’Egypte, puisque les deux points de vue, égyptien et soudanais, sont quasi identiques. Par ailleurs, parallèlement à la démarche onusienne, l’Egypte a participé au sommet exceptionnel de l’Union Africaine (UA), le 26 juin, qui a regroupé aussi le Soudan, l’Ethiopie, le Kenya, la République démocratique du Congo et le Mali. Ces deux démarches prouvent que l’Egypte est bien intentionnée et veut régler la crise par les moyens diplomatiques.
— Quels sont les rôles respectifs du Conseil de sécurité et de l’UA dans la question du barrage ?
— Le Conseil de sécurité, en tant qu’organe central de l’Onu, et l’Union africaine, en tant qu’organisation régionale, ont des rôles complémentaires. En fait, le conseil est l’organe principal chargé de préserver la paix et la sécurité mondiale selon l’article 24 de la Charte de l’Onu. L’UA est également chargée de préserver la paix régionale. La séance du Conseil de sécurité qui a discuté les demandes égypto-soudanises était une séance de discussion ouverte et non une séance destinée à voter une résolution contraignante.
La majorité des pays membres du conseil a décidé d’appliquer le chapitre VIII de la Charte de l’Onu qui encourage les organisations régionales à jouer un rôle essentiel pour préserver la paix et la sécurité mondiales. Cela signifie que l’UA doit désormais prendre le relais. Celle-ci doit à son tour informer le Conseil de sécurité sur l’évolution de la situation. Elle ne peut pas imposer de sanctions sans consulter le conseil.
— Alors comment répondre aux allégations de l’Ethiopie selon lesquelles le Conseil de sécurité n’est pas habilité à trancher cette question ?
— C’est totalement faux. L’article 33 de la Charte de l’Onu donne aux différents pays le droit de choisir les méthodes adéquates pour régler leurs différends pacifiquement. Donc, la poursuite des pourparlers tripartites sous l’égide de l’UA n’empêche pas le recours, par l’Egypte, au Conseil de sécurité si les pourparlers n’aboutissent pas à un accord final légalement contraignant.
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