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L’Iraq dans la tourmente

Mardi, 11 février 2020

La nomination d’un nouveau premier ministre en Iraq n’a pas mis fin à la contestation. Ancien ministre des Télécommunications, le nouveau chef du gouvernement, Mohamed Allawi, est perçu par les contestataires comme une partie intégrante du système politique qu’ils rejettent en bloc. La contestation a d’ailleurs pris des allures confessionnelles lorsque le leader chiite, Moqtada Al-Sadr, a décidé de se ranger aux côtés du premier ministre, alors que le reste des protestataires le rejettent. Depuis le 1er octobre dernier, plus de 480 personnes ont été tuées en Iraq et quelque 30 000 ont été blessées dans les violences liées à la contestation, en majorité des manifestants, selon des sources sécuritaires et médicales.

La contestation en Iraq entre ainsi dans son cinquième mois, et l’on ne voit toujours pas d’issue à la crise. Les Iraqiens semblent en avoir assez des ingérences étrangères et d’une crise économique qui ne fait qu’empirer. En 2003, l’invasion américaine met fin au régime de Saddam Hussein. Sans le vouloir, les Américains débarrassent l’Iran de son ennemi juré dans la région. La dissolution de l’armée iraqienne et l’expulsion des membres du parti Baas étaient l’« aubaine » attendue par Téhéran. Dès 2005, l’établissement d’un régime communautaire sous l’égide des Etats-Unis permet à l’Iran de s’infiltrer en Iraq en soutenant les partis chiites. Succédant à Georges W. Bush en 2008, Barack Obama veut sortir de l’engrenage iraqien. Il conforte la position du premier ministre iraqien de l’époque, Nouri Al-Maliki, un chiite pro-iranien, et retire le contingent militaire américain. Mais le vide politico-militaire laissé par les Américains va vite être occupé par les gardiens de la Révolution iraniens qui tissent désormais leur toile autour de l’Iraq. Nouri Al-Maliki fait de la discrimination à l’égard de la communauté sunnite, favorisant ainsi l’éclosion de Daech. Et Téhéran en profite pour s’enfoncer un peu plus en Iraq grâce aux milices chiites d’Al-Hachd Al-Chaabi, encadrés par les gardiens de la Révolution. Avec l’arrivée de Donald Trump et sa politique anti-iranienne, l’Iraq va vite devenir une arène de confrontation entre les Etats-Unis et l’Iran. Avec ce climat politique tendu, les problèmes économiques sont mis en retrait. Et la population iraqienne, qui souffre des mauvaises conditions de vie (coupures fréquentes de courant et chômage endémique), en fait les frais. L’omniprésence de l’Iran sur le sol iraqien favorise la corruption politique et le clientélisme. Ce sont ces facteurs qui conduisent rapidement au mouvement de contestation populaire. Les Iraqiens veulent reprendre en main leur pays. Alors que le pouvoir pro-iranien tente d’apaiser la crise, le parlement réclame le départ des troupes américaines, les manifestants veulent en finir avec la mainmise de Téhéran sur la politique iraqienne. Ils réclament surtout l’amélioration des conditions de vie. L’Iraq paie aujourd’hui le prix de 20 ans de confrontations politiques et d’ingérences étrangères sur son sol.

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