Al-Ahram Hebdo : Quelles sont les techniques actuellement utilisées par les chirurgiens de l’obésité ?
Mohamad Marzouq : La technique la plus pratiquée est la gastrectomie ou la sleeve qui consiste à réduire la taille de l’estomac, et le bypass gastrique qui consiste à court-circuiter une partie de l’intestin grêle.
— Depuis combien de temps pratiquez-vous cette chirurgie ?
— J’ai fait les premières interventions en 2004, mais ces chirurgies sont pratiquées en Egypte depuis les années 1990.
— Et qu’est-ce qui a changé depuis au niveau des modes opératoires ?
— Le développement de la technologie a fait évoluer le matériel, que ce soit au niveau des endoscopes, des moniteurs, etc. Mais d’un autre côté, ces années de pratique ont permis aux chirurgiens et aux équipes soignantes de se perfectionner.
— Quels sont les taux de réussite de la chirurgie de l’obésité et quels en sont les risques ?
— Si l’on parle des complications d’ordre chirurgical, elles sont mineures et concernent moins de 1 % des cas. Les risques de complications augmentent de 2 à 5 % pour les personnes souffrant d’hémophilie ou de problèmes cardiaques ou respiratoires, et peuvent atteindre entre 5 et 10 % si le patient n’en est pas à sa première chirurgie.
— Quelles devraient être les attentes du patient en termes de perte de poids ? Quand peut-on parler de réussite ?
— En général, on peut parler de réussite si la personne perd 60 % de son surpoids. Certains facteurs aident à se rapprocher du poids idéal. C’est notamment plus facile pour les hommes par rapport aux femmes et pour les jeunes par rapport aux moins jeunes. La « réussite » de l’opération dans le sens de la réduction du poids dépend autant du patient. Un bon comportement alimentaire est aussi un facteur décisif.
— Pourtant, cette opération est souvent envisagée comme la « solution facile » …
— Je tiens à expliquer aux patients qui viennent pour se faire opérer que la chirurgie n’est pas une solution magique. Elle vous permettra de manger moins, mais de votre côté, vous devrez faire des choix alimentaires sains.
— D’après quels critères un patient est encouragé ou découragé quant à subir cette chirurgie ?
— L’obésité est maladive lorsque l’Indice de Masse Corporel (IMC, le poids en kilogrammes divisé par le carré de la taille en mètres) est supérieur à 35. Actuellement, la tendance est d’opérer à partir d’un IMC supérieur à 32. Cela dit, chaque cas est évalué individuellement. Par exemple, une anesthésie locale est envisagée pour les candidats à l’opération dont l’état de santé ne tolère pas une anesthésie générale …
— La chirurgie de l’obésité peut-elle être pratiquée à des fins esthétiques ?
Le patient perd en moyenne 15 kg un an après l'opération. (Photo : AP)
— Non. C’est une chirurgie thérapeutique. Elle a pour objectif de guérir de l’obésité et des maladies que celle-ci entraîne, comme le taux élevé du cholestérol, l’hypertension, les maladies cardiovasculaires, le diabète, notamment le diabète de type 2 dont elle permet une rémission totale. Pour les femmes en particulier, l’obésité a un impact négatif sur la fécondité, et souvent des patientes me sont envoyées par leur gynécologue.
— Qu’en est-il du suivi post-opératoire du patient ?
— Après l’opération, le patient est encouragé à suivre avec un diététicien. Une supplémentation en vitamines est obligatoire pendant un an après une sleeve, et à vie après un bypass. En tant que chirurgien, je demande à voir mes patients régulièrement pendant un an après l’opération et ils retournent me voir en cas de regain de poids ou d’amaigrissement.
— Un regain de poids est-il fréquent ?
— Trois ou quatre ans après l’opération, le patient regagnera entre 10 et 20 % du poids perdu à cause d’un élargissement de l’estomac. Ceci n’est pas un mal en soi, parce que le patient aura ainsi l’occasion de mieux se nourrir. L’essentiel c’est de choisir la qualité de la nourriture avec son diététicien.
— Dans quelle mesure l’accompagnement psychologique du patient est-il important ?
— Malheureusement, en Egypte, nous n’avons pas ce système d’encadrement. Cela dit, guérir de l’obésité est en soi un bienfait psychologique.
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