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Le torchon brûle dans le sud

Rasha Hanafy, Mardi, 12 mars 2019

Mohamad Mazhar Saïd raconte dans ses mémoires, Saguine 19 (prisonnier de 19), les coulisses de l’organisation des manifestations à Assouan, à l’époque.

Le torchon brûle dans le sud

« Prisonnier de la Révolution de 1919 ». Cet ouvrage, dont la première édition date de 1969, aborde les manifestations de la population dans le gouvernorat d’Assouan, en Haute-Egypte, le 15 mars 1919. Le livre, en format de poche, de quelque 250 pages, est rédigé par Mohamad Mazhar Saïd, (1897-1970), principal organisateur des manifestations à Assouan.

A la fin de la Première Guerre mondiale, une délégation égyptienne est formée de musulmans et chrétiens, dans le but de se rendre à la Conférence de paix de Paris, pour parler de l’indépen­dance de l’Egypte. Mais l’occupant britannique refuse. La délégation se transforme en un parti politique, le Wafd, dirigé par le leader Saad Zaghloul.

Les manifestations ont lieu dans toute l’Egypte afin de soutenir le parti de Zaghloul, notam­ment après son expulsion vers l’île de Malte. « Nous ne menons pas de combat, ni contre le sultan, ni contre les Anglais, comme c’était le cas d’Ahmad Orabi. Nous haussons la voix de l’Egypte pour que le monde entier puisse l’entendre. Nous soutenons le parti Wafd, que le peuple a choisi pour défendre la cause de la patrie », mentionne Mazhar dans un dialogue avec le maire d’Assouan.

Spécialiste de l’éducation et de la psychologie, ayant partagé ses études entre Le Caire et Londres, Mazhar rédigeait ses mémoires quotidiennement. Chose qui l’a aidé à décrire minutieusement les événe­ments d’Assouan, entre le 15 mars 1919, jour du déclen­chement des manifestations, et le 20 août 1919, soit le jour de son acquittement et de son retour au Caire. « J’ai noté dans ce livre quelques situations drôles et quelques tragé­dies que nous avons vécues ; ce sont des événements poli­tiques et des documents historiques qu’on ne trouve nulle part ailleurs. J’ai noté des discussions entre des respon­sables anglais et égyptiens, qui ne sont pas sans dévoiler la tyrannie de l’occupation étrangère et la corruption du gouvernement local et de quelques fonctionnaires égyp­tiens opportunistes », explique Mazhar dans sa préface.

Le comité exécutif

Mohamad Mazhar Saïd n’était pas originaire d’Assouan, mais du Caire. Il a été muté à Assouan, où il a travaillé comme professeur d’anglais dans une école. En fait, il voulait échapper aux Anglais qui le poursuivaient en raison de ses activités politiques.

Dans son livre, Prisonnier de la Révolution de 1919, Mazhar raconte les détails de la prépa­ration d’une manifestation contre l’occupation britannique dans les rues principales d’Assouan, le 15 mars 1919.

Il précise qu’un comité exécutif a été formé, regroupant des commerçants, des dignitaires et des fonctionnaires, afin d’assurer la participation de la grande majorité des habitants d’As­souan. Ce comité a pris huit décisions, dont la première consiste à former un conseil national pour gérer la municipalité, ainsi qu’un comité exécutif visant à protéger les manifestants et le réservoir d’Assouan contre la menace des ingénieurs anglais, qui voulaient le bombarder.

Selon le livre, les quatre principaux organisateurs des manifestations, dont Mazhar Saïd, ont été arrêtés le 27 mars. Ils étaient accusés d’appliquer les instructions du parti Wafd, et de se révolter contre le gouvernement local. Ils ont alors été détenus pendant quatre mois et jugés devant une cour militaire. Ils ont miraculeusement survécu à la peine de mort.

C’est le récit de quelques événements factuels qui associent rire, tristesse, désespoir, mort et colère, sans omettre un brin d’ironie et d’humour noir, notamment lorsqu’il s’agit d’histoires de détenus politiques.

Saguine 19 (prisonnier de 19), par Mohamad Mazhar Saïd, aux éditions des Palais de la culture, série Mémoire de l’écriture, 2019. PP.250.

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