L'armée comorienne a repris le contrôle de Mutsamudu après une semaine de vives tensions.
(Photo:AFP)
Après une semaine d’affrontements avec les rebelles, « l’armée comorienne a repris le contrôle de la médina de Mutsamudu, capitale de l’île d’Anjouan, samedi 20 octobre ». Telle est la déclaration du ministre comorien de l’Education nationale, Mahamoud Salim Hafi, originaire de la région tendue depuis quelques jours. Tout a commencé lundi 15 octobre, lorsque des protestataires, s’opposant à la volonté du chef de l’Etat de prolonger son mandat, avaient érigé des barrages dans plusieurs rues autour de Mutsamudu, ville considérée comme un fief de l’opposition, et que les forces de l’ordre avaient ouvert le feu pour les démanteler. Bilan : 3 morts, selon les autorités, et au moins 6 personnes grièvement blessées à cause de ces affrontements.
Les autorités accusent le parti Juwa de l’opposant et ancien président de l’archipel, Abdallah Sambi, originaire d’Anjouan, d’être à l’origine des troubles qui ont éclaté quand les manifestants ont érigé des barricades et que les forces de l’ordre les ont démantelées. Les opposants, qui accusent le président Azali Assoumani de se comporter en dictateur « de république bananière » et de vouloir se maintenir au pouvoir, renvoient la responsabilité de la situation au gouvernement.
En fait, le climat politique s’est dégradé aux Comores depuis le référendum constitutionnel du 30 juillet dernier. Ce scrutin aux allures de plébiscite (92,74 % de oui) a renforcé les pouvoirs du président Azali Assoumani, l’autorisant à accomplir deux mandats successifs au lieu d’un. Car depuis 2001, la présidence était attribuée tous les cinq ans à un représentant de l’une des trois îles du pays (Grande-Comore, Anjouan et Mohéli). Ce système tournant avait permis de ramener le calme dans l’archipel de l’océan Indien. Il était prévu donc qu’Anjouan prendrait la prochaine présidence. Mais le président Assoumani, ex-putschiste élu en 2016, a annoncé son intention d’organiser un scrutin présidentiel anticipé l’an prochain, ce qui lui permettrait de remettre les compteurs électoraux à zéro et de régner sur l’archipel, en cas de victoire, jusqu’en 2029. Les adversaires du chef de l’Etat, qui ont boycotté le scrutin de juillet, qualifient son régime de « république bananière ». Depuis le référendum, des dizaines d’entre eux ont été arrêtés. Face au risque de dégradation dans cet archipel agité de coups d’Etat et de crises séparatistes depuis son indépendance de la France en 1975, l’Onu et l’Union Africaine (UA) ont exprimé leur inquiétude en appelant au « calme » et au « dialogue », d’une même voix, mais dans des communiqués séparés. Le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, a exprimé « sa préoccupation » et a « appelé toutes les parties concernées à faire preuve de calme et de retenue dans l’intérêt de la paix et de la stabilité aux Comores ». Déplorant « la suspension, depuis le 2 octobre 2018, du dialogue intercomorien », la Commission de l’UA souligne, encore une fois « la nécessité et l’urgence de mesures d’apaisement de nature à faciliter le règlement de la crise ».
Jane Morley, analyste chez Fitch Solutions Risk Consultancy, cité par l’AFP, voit que M. Assoumani semble de plus en plus intolérant face à toute divergence d’opinion. Selon lui, « un certain nombre de figures de l’opposition, accusées de complot ou de corruption, ont été arrêtées ou ont dû se cacher ». Parmi eux, Abdallah Sambi, inculpé dans une affaire de corruption et assigné depuis 5 mois à résidence dans la banlieue de Moroni .
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