L'Egypte importe de 32 à 35 % de ses besoins mensuels en pétrole. (Photo : Mohamad Adel)
Au moment où l’Egypte atteint l’autosuffisance en gaz naturel, la fluctuation des cours mondiaux de l’or noir rend difficile de réduire son déficit budgétaire et sa facture d’importation. Dans l’attente des sanctions américaines contre l’Iran, dont l’application est prévue à partir du 4 novembre prochain, les cours du pétrole de brent n’ont cessé d’atteindre des records pour dépasser le seuil des 86,7 dollars le 2 octobre dernier, leur niveau le plus élevé depuis 4 ans. Une situation qui pèse lourdement sur les pays importateurs de pétrole tels que l’Egypte. « Les prix mondiaux du pétrole dépassant le seuil des 85 dollars, et cela aura pour effet d’accroître le déficit budgétaire de l’Egypte de 80 milliards de L.E. », a déclaré le ministre des Finances, Mohamad Maeit, ajoutant que le prolongement de cette hausse des prix rendrait le gouvernement incapable d’atteindre son objectif de réduire le déficit budgétaire à 8,4 % pendant l’année financière 2018-2019.
Le ministère des Finances a effectué ses calculs sur la base d’un baril de pétrole à 67 dollars. « Chaque dollar supplémentaire sur le prix du baril se traduit par une augmentation de 4 milliards de L.E. des subventions à l’énergie. Les subventions pétrolières pour l’exercice en cours sont de 89 milliards de L.E. avec un prix de brent à 67 dollars le baril », explique Amr Adli, professeur d’économie à l’Université americaine. Selon l’Agence de presse du Moyen-Orient (MENA), un rapport gouvernemental révèle la hausse des subventions des produits pétroliers à 124,5 milliards de L.E.
Pour sortir de cette impasse, le gouvernement n’a d’autre option que de diminuer ses dépenses en réduisant les subventions à l’énergie, qui pèsent lourdement sur le déficit. Or, « jusqu’à présent, le gouvernement a procédé à quatre vagues de réduction des subventions. Malheureusement, il sera difficile de prendre une telle mesure dans les prochains mois », souligne Adli. Le gouvernement égyptien suit actuellement un plan de réforme économique du Fonds Monétaire International (FMI) en échange d’un prêt de 12 milliards de dollars. Ce plan consiste notamment à libéraliser complètement les prix des carburants en 2019.
Instabilité mondiale
En tant qu’importateur net d’or noir, l’Egypte fait face à une situation difficile, car elle doit assumer une facture très élevée. Le pays importe en effet entre 32 et 35 % de ses besoins mensuels en carburant pour combler l’écart entre la production et la consommation nationales. Et ce, au moment où toutes les estimations des banques et des agences internationales prévoient la poursuite de la hausse des prix du pétrole pendant l’année prochaine. Pour sa part, la banque américaine Merrill Lynch prévoit même que le prix de l’or noir franchira le seuil des 95 dollars au cours du deuxième trimestre 2019. Dans son rapport hebdomadaire intitulé Global Economy, publié la semaine dernière, la banque a justifié ses prévisions par le manque de pétrole suite aux sanctions américaines contre l’Iran. « Le montant des exportations de ce pays était de 2,1 millions de barils par jour l’année dernière. L’Administration américaine a pour objectif de ramener ce chiffre à zéro. En plus, les sanctions s’appliquent à toutes les entreprises actives aux Etats-Unis travaillant avec l’Iran, y compris les compagnies de transport et les compagnies d’assurance. Cela donne aux Etats-Unis un moyen de forcer d’autres pays à réduire leurs importations de pétrole iranien », note la banque dans son rapport.
L’effondrement de l’économie vénézuélienne est en train de perturber, lui aussi, l’approvisionnement. La production au Venezuela a diminué de plus d’un tiers par rapport à son niveau de 2016, pour atteindre son plus bas niveau depuis les années 1940. « Tous ces facteurs impactent la capacité des autres membres de l’Opep, notamment l’Arabie saoudite, et la Russie à limiter la hausse des prix du pétrole en augmentant leur production », note le rapport.
Les pressions devraient continuer à peser sur les pays importateurs au cours de la période à venir. Ce qui devrait aider l’Egypte c’est sa bonne situation au niveau des revenus en dollars, qui la rend capable de mieux assumer ce fardeau. D’après les chiffres de la Banque Centrale d’Egypte (BCE), le montant des réserves dépasse les 44 milliards de dollars, ce qui couvre presque 9 mois d’importations.
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