Le 6 août, Trump a donné le coup d’envoi de la première phase des sanctions imposées à l’Iran. (Photo : Reuters)
« Quiconque faisant des affaires avec l’Iran ne fera pas d’affaires avec les Etats-Unis », a tweeté Donald Trump après avoir donné le coup d’envoi de la première phase des sanctions imposées à l’Iran. Immédiatement après, le groupe allemand Daimler, numéro un mondial de la voiture haut de gamme et des camions, a annoncé cesser, « jusqu’à nouvel ordre », ses activités en Iran. Un projet d’expansion de l’entreprise allemande, qui prévoyait la fabrication et la vente de camions Mercedes en partenariat avec des entreprises iraniennes, a été également suspendu. Daimler était présent en Iran entre 1953 et 2010. L’entreprise est retournée en 2016, après la levée des sanctions économiques, avant de décider de quitter de nouveau l’Iran cette semaine. Daimler n’est pas la seule entreprise à cesser ses investissements en Iran, il y a aussi Renault, Airbus, Total, Siemens et Maersk. Ces multinationales européennes se sont retirées d’Iran les unes après les autres avant même que leurs investissements ne portent leurs fruits.
Les Européens impuissants face aux sanctions
Les entreprises européennes sont particulièrement visées par les menaces de Trump. Ainsi, l’Union Européenne (UE) a annoncé son intention de protéger ses entreprises contre les conséquences des sanctions extraterritoriales américaines. « Nous sommes déterminés à protéger les opérateurs économiques européens engagés dans des affaires légitimes avec l’Iran », ont déclaré les ministres des Affaires étrangères de la France, de l’Allemagne et de l’Angleterre, les trois pays de l’UE artisans de l’accord sur le nucléaire conclu en 2015, dans un communiqué conjoint et cosigné par la chef de la diplomatie de l’UE, Federica Mogherini. L’UE a décidé de réagir en activant, un jour avant l’entrée en vigueur des sanctions, la loi de blocage. Celle-ci autorise les entreprises et les tribunaux européens à ne pas se soumettre à des réglementations relatives à des sanctions prises par des pays tiers. Créée initialement en 1996 pour contourner l’embargo sur Cuba, la loi de blocage permet aux entreprises européennes sanctionnées aux Etats-Unis de poursuivre le gouvernement américain devant la justice de leur Etat d’origine pour obtenir réparation des dommages. Si elles obtiennent gain de cause, elles peuvent demander la saisie d’avoirs américains au sein de l’UE. Pour Rachad Abdou, professeur d’économie à l’Université du Caire, les efforts de l’UE pour résister aux sanctions américaines n’empêcheront pas les entreprises européennes de se retirer de l’Iran. « Cette loi anti-boycottage n’a, en réalité, aucune chance d’être appliquée, car les entreprises européennes ne peuvent pas entrer dans une confrontation avec les Etats-Unis. Ces entreprises doutent, en outre, de l’efficacité de cette législation européenne », explique-t-il. Les relations commerciales avec l’Iran semblent déjà compromises pour bon nombre d’entreprises, notamment dans le secteur automobile et celui de l’aviation commerciale, visés par la première phase des sanctions. Les banques aussi ne pourront plus assurer de transactions en dollars avec l’Iran, même s’il s’agit de transactions particulières à des entreprises qui n’ont pas d’intérêts aux Etats-Unis.
Climat d’investissement moins favorable
Outre la crainte d’être pénalisées par des sanctions extraterritoriales américaines, c’est « l’évolution moins favorable que prévue de l’économie iranienne », comme affirme Daimler en justifiant sa décision, qui compromet les activités des multinationales européennes en Iran. L’économie iranienne est profondément déstabilisée par le retour des sanctions américaines. En fait, la première série de sanctions américaines comprend des blocages sur les transactions financières et les importations de matières premières (or, aluminium, acier, charbon), de logiciels, de véhicules et des mesures pénalisantes sur les achats dans les secteurs de l’automobile et de l’aviation commerciale. Elle frappe également le commerce des tapis persans et des pistaches ainsi que les acquisitions de dollars. Après la période transitoire de 180 jours, qui prendra fin le 4 novembre, des sanctions seront imposées aux importations d’hydrocarbures. Selon les économistes, les prochaines sanctions seront plus sévères. « Les Iraniens ont connu, pendant de longues années, des sanctions qui ont asphyxié leur économie et isolé le pays. La deuxième série de sanctions américaines qui entrera en vigueur en novembre sera la plus difficile, puisqu’elle affectera le secteur pétrolier, vital pour l’Iran. En effet, les produits pétroliers sont très importants pour l’économie iranienne, puisqu’ils représentent environ 80 % de ses exportations et entre 40 à 50 % de ses revenus », souligne Magdi Sobhi, spécialiste économique au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. Le rétablissement des sanctions américaines accentuera donc la détérioration de l’économie de l’Iran qui souffre déjà d’un taux élevé de chômage et d’une inflation galopante. Le rial iranien a perdu plus de la moitié de sa valeur par rapport au dollar depuis avril.
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