La musique de Maalaz est une forme de transgression sociale.
Vêtus de t-shirts noirs, leurs paroles sont d’une audace absolue. Leur musique un peu violente est souvent accompagnée de cris d’enthousiasme. Les musiciens du groupe égyptien Maalaz (refuge) mêlent rock arabe et heavy metal et enflamment la scène. Le groupe est composé de Mohamad Abdel-Razeq (guitariste, compositeur et parolier), Amr Bechr (guitariste), Magued Amer (chanteur), Moetaz Al-Nachar (basse guitare) et Ahmad Al-Gohari (percussionniste).
Fondé en 2014 par Mohamad Abdel-Razeq, le groupe vient de se produire au théâtre Guéneina dans le parc Al-Azhar. Il chante la jeunesse sur du pur rock. De quoi tisser des liens avec un public qui s’identifie au genre, notamment à sa liberté d’expression sans contraintes. Et qui dit hard rock et heavy metal, dit tendance musicale qui se nourrit du désespoir et de la rage des jeunes, ceux qui vivent une période de différenciation, de recherche d’identité et de conflit avec eux-mêmes et avec le monde qui les entoure.
D’ailleurs, Maalaz, comme le révèle son appellation, constitue un refuge ou encore une évasion recherchés par des jeunes qui veulent fuir la fatigue du travail, les soucis de la vie ainsi que toute énergie négative. « C’est une fuite musicale, loin du déjà-vu et entendu sur scène. Car la plupart des musiciens actuels se limitent à une musique de fusion et à des paroles relativement superficielles et répétitives. Ils chantent souvent l’amour ou la patrie ». C’est ainsi que se définit Maalaz sur sa page Facebook.
Tout en arabe
Pour ces musiciens, chanter du rock en arabe n’était pas une tâche facile au début, surtout que le hard rock et le heavy metal sont souvent taxés de musiques « sataniques » dans les sociétés orientales. De quoi générer des préjugés et provoquer des controverses et des attitudes hostiles de la part du grand public. « Notre musique n’a rien à voir avec des pratiques démoniaques. C’est une musique d’audace et d’alerte, un signe de rébellion et de transgression sociale. Elle vise à tourner en dérision les conditions difficiles du pays, pour inciter au changement », explique Ahmad Al-Gohari, le percussionniste de Maalaz.
Et d’ajouter : « Contrairement à d’autres groupes du monde arabe jouant également du rock, à l’exemple des jordaniens Akher Zafir, Jadal ou autres, ce qui caractérise Maalaz c’est que nous jouons du pur rock, sans l’incruster de musique pop ni de mélodies orientales ». Les sonorités sont lourdes et épaisses, centrées sur les impulsions de la percussion résolument rock et les riffs de la guitare, sur la distorsion très amplifiée et émancipée, capable de fuir tout engagement. Ancré dans la vie de la jeunesse arabe, soit pour choquer, soit pour bousculer certaines habitudes conformistes et normatives, l’ensemble des chansons de Maalaz effectuent un va-et-vient permanent, entre le rock et le grunge, une sorte de rock alternatif qui s’inspire du heavy metal et du punk hardcore.
Celui-ci se caractérise par des guitares fortement saturées, des signatures de temps variables et des paroles apathiques, aux interrogations illimitées de la vie. A titre d’exemple, Maalaz a joué au théâtre Guéneina des chansons comme : Ibn Adam (fils d’Adam) et Stockholm. Cette dernière chanson, composée en 2015, fait une critique acerbe de la réalité à travers des histoires humoristiques.
Le vidéo clip de Stockholm, lancé également en 2015, a battu le record du nombre d’auditeurs sur le site Sound Cloud.
Qui suis-je ?
Le groupe musical underground est de plus en plus sollicité. Son public s’élargit d’un jour à l’autre. Il joue dans plusieurs espaces culturels, au Caire et à Alexandrie, dont Room, Darb1718, The Greeck Campus de l’Université américaine, la Bibliothèque d’Alexandrie et le théâtre Guéneina. Son deuxième album, Al-Sadea (la fissure) 2018, vient d’être lancé avec sept chansons qui posent plusieurs questions sur un ton différent. « Ferme les yeux et pose-toi la même question, à laquelle tu ne trouveras jamais de réponse : Qui suis-je ? ». Ce sont les paroles de la chanson Souäl (question).
Cette véritable fougue rock arabe charme le public par ses retentissements sur fond de guitare électrique vrombissante, accompagnés d’une batterie affolée. Friand de nouveautés, le jeune public est épris de cette atmosphère de détente, d’émotion et d’évasion. Les jeux de mots et l’humour sont combinés à un certain état de manie, emportés par la puissance du rock. « Notre but est de faire de la musique rock une musique compréhensible et acceptable, avec des paroles arabes, à la portée de tous », conclut Al-Gohari.
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