Le dispositif se renforce en attendant le feu vert du président.
Des renforts policiers ont été renvoyés lundi au Sinaï alors que la présidence affirme que « toutes les options sont envisageables » pour obtenir la libération des 7 soldats et policiers, tous conscrits, kidnappés jeudi dernier près d’Al-Arich. D’après un responsable de la sécurité, 80 unités des forces de la sécurité centrale (police antiémeutes) et 26 véhicules blindés se sont déployés dans le Nord-Sinaï. « Il y a beaucoup d’alternatives sur la table, le but est de libérer les kidnappés et de protéger leurs vies », a affirmé lors d’une conférence de presse Omar Amer, porte-parole de la présidence. « Toutes les options sont envisageables », a-t-il ajouté, en précisant que « l’Egypte veille à ce qu’aucune goutte de sang ne soit versée ».
Tout laisse à suggérer une offensive imminente contre les ravisseurs, mais jusqu’à lundi soir, les forces de sécurité affirmaient « n’avoir reçu jusqu’ici aucun ordre concernant le lancement d’une opération pour libérer les 7 conscrits ».
7 policiers et soldats travaillant au point de passage de Rafah ont été enlevés jeudi à l’est d’Al-Arich dans le nord de la péninsule par des hommes armés qui exigeaient la libération de « militants politiques » bédouins détenus. Lundi à l’aube, toujours dans la ville d’Al-Arich, des hommes non identifiés ont tiré « à l’arme lourde pendant 25 minutes » sur un camp des forces de la sécurité centrale « sans faire de victime », selon une source sécuritaire. Plus tard dans la journée de lundi, des inconnus ont ouvert le feu sur un poste-frontière avec Israël réservé aux marchandises, Al-Ouga, à proximité d’un autre camp de la police égyptienne, toujours d’après les services de sécurité. Aucune victime n’a là non plus été signalée. Cette succession d’incidents met sous pression le président Mohamad Morsi, confronté à la nécessité de rétablir l’ordre dans cette région sensible, frontalière d’Israël et de la bande de Gaza, où l’autorité de l’Etat apparaît une nouvelle fois bafouée.
Une vidéo mise en ligne dimanche via un compte anonyme sur Youtube et montrant les 7 otages, yeux bandés et mains sur la tête, a exacerbé le mécontentement général. Dans cette vidéo, l’un des détenus est tenu en joue par un fusil, tandis qu’un autre déclare que les ravisseurs réclament la libération de « militants politiques » bédouins détenus, mentionnant un bédouin condamné à mort pour une attaque contre un poste de police en 2011 à Al-Arich, dans le Nord-Sinaï. « Nous espérons que vous, président, relâcherez aussi rapidement que possible les militants politiques du Sinaï, car nous ne pouvons plus supporter la torture », dit l’un des otages.
« Préférer le principe de la négociation »
Bien que la présidence ait rejeté toute négociation avec « des criminels » et refusé de « céder aux chantages », un responsable de la sécurité a indiqué que « les services concernés continuaient de préférer le principe de la négociation avec les ravisseurs pour libérer les conscrits enlevés ». Entre-temps, le président Morsi, pressé de prendre une décision, multiplie les réunions avec les responsables sécuritaires et des personnalités politiques et publiques, ainsi que des dignitaires religieux musulmans et chrétiens pour passer en revue les « efforts déployés pour trouver une issue à la crise ». Jeudi, il a tenu une réunion de crise avec les ministres de la Défense et de l’Intérieur et le chef des services de renseignements.
L’événement a donné lieu à des interprétations diverses, et souvent contradictoires, à la lumière d’une conjoncture politique et sécuritaire instable. A un moment où l’armée est sollicitée par une tranche de la société et de l’opposition pour déloger le régime du président Morsi, l’armée saisira-t-elle l’occasion pour passer à l’acte ? Ou est-ce que, au contraire, c’est le président Morsi qui risque plutôt d’exploiter ces enlèvements pour remercier le ministre de la Défense — qui ne semble pas disposé à s’abstenir de déclarations politiques ? Les spéculations vont bon train alors que les pro-régime accusent les spéculateurs de vouloir faire un usage politique d’un incident sécuritaire.
Officiellement, le porte-parole Omar Amer a nié la présence de dissensions entre la présidence et l’armée autour de cette affaire, affirmant que « les institutions de l’Etat partagent la même vision dans la gestion de cette crise ». L’issue de celle-ci risque d’être politiquement révélatrice .
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