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Karam Gabr : La presse nationale doit respecter les règles d'impartialité et d'objectivité durant les élections

Maher Mekled, Mardi, 30 janvier 2018

Karam Gabr, président de l’Organisme national de la presse, revient sur les préparatifs de l’organisme pour couvrir l’élection présidentielle du 26 mars prochain.

Karam Gabr
Karam Gabr

Al-Ahram hebdo : Quelles sont les mesures prises par l’Organisme natio­nal de la presse pour assurer la couverture de l’élection présidentielle ?

Karam Gabr: L’organisme a pré­paré un papier sur les critères relatifs à la couverture de la présidentielle. Les critères portent sur des points fondamentaux, afin de garantir l’in­tégrité de l’élection.

— Comment la presse doit-elle se comporter envers le candidat Abdel-Fattah Al-Sissi ?

— Elle doit se baser sur deux points essentiels. Premièrement ce sont les réalisations de l’Etat égyp­tien sous le président Abdel-Fattah Al-Sissi, mais qui ne sont pas sa propriété. Elles sont la propriété de l’Etat égyptien et du peuple égyp­tien. Ces réalisations doivent rece­voir la propagande qu’elles méritent car elles ont vu le jour grâce aux efforts du peuple, et celui-ci doit le savoir. Deuxièmement, la presse se comportera envers le président Al-Sissi en tant que candidat avec le même respect dû à tous les candidats et avec les mêmes règles d’intégrité, d’impartialité, de respect et d’es­time.

— Comment garantir une cou­verture intègre de l’élection ?

— La presse ne doit nullement diffuser des informations de sources inconnues. Il est fréquent que les journaux rapportent des nouvelles de sources « bien informées » ou de sources ayant requis l’anonymat. Il devient alors difficile de s’assurer de la véracité ou de la crédibilité des informations attribuées à ces sources inconnues. Mais cette fois-ci, il s’agit d’une élection ouverte sans secrets, et il sera important d’attri­buer chaque information ou chaque déclaration à sa source. Il y a d’autres critères importants, comme le fait de ne pas aborder la vie privée des can­didats, de ne pas adresser d’offenses ou d’insultes, de respecter l’impar­tialité et l’objectivité, de rester à distance égale de tous les candidats, d’accorder à tous les candidats le même espace publicitaire pour pré­senter leurs programmes… Pour ce qui est des sondages d’opinion, ils doivent être effectués selon les normes scientifiques.

— Quels sont les fondements auxquels il ne faut pas toucher pendant la couverture de la prési­dentielle ?

— Premièrement, le prestige du poste présidentiel. Le président de la République, quel que soit son nom, reflète l’image de l’Egypte à l’inté­rieur du pays comme à l’étranger. C’est lui qui nomme les ambassa­deurs, qui déclare la guerre et qui conclut les accords et les traités. La Constitution a accordé des préroga­tives au président, et cela nous oblige à agir envers lui avec tout le respect qui se doit pour sa personne en pre­mier lieu, et parce qu’il représente l’Etat. L’Egypte, tout au long de son histoire, a été forte lorsque son prési­dent était fort. Deuxièmement il faut préserver les institutions de l’Etat égyptien avec en tête l’institution judiciaire qui supervise l’élection présidentielle. Il est indispensable de montrer tout notre respect à la justice égyptienne et de ne pas mettre en doute les mesures qu’elle adopte tant que nous nous sommes référés à elle. Troisièmement, il faut éviter les que­relles, recourir à la justice et à la commission qui supervise l’élection, respecter les communiqués de l’Or­ganisme des élections et ne pas s’empresser d’annoncer les résultats comme ce fut le cas lors de l’élection de 2013, lorsque les Frères musul­mans ont annoncé la victoire de Mohamad Morsi. C’était une grosse erreur.

— Qu’en est-il des droits des journalistes dans la couverture des élections ?

— Tout journaliste a le droit d’ac­céder aux informations, de travailler en toute liberté et de se rendre dans les urnes. Il a le droit de rencontrer tous les candidats et d’échanger les informations. Mais les journalistes ont aussi des devoirs. Ils doivent respecter l’objectivité. Ils ne doivent pas faire de titres à sensation par exemple et écrire des articles qui vont dans une toute autre direction, de sorte à créer des événements qui n’ont jamais eu lieu. D’ailleurs, tous ces points ont été discutés avec les rédacteurs en chef et les PDG des institutions de presse.

— Le nombre de journalistes qui couvriront l’élection dans la presse nationale a-t-il été déter­miné ?

— Oui, les institutions journalis­tiques ont envoyé à l’Organisme national de la presse les noms des journalistes qui devront couvrir l’élection. Leur nombre s’élève à 220. L’Organisme national des élec­tions leur délivrera les permis nécessaires. Un stage de formation sera organisé en février prochain à l’attention de ces journalistes. Notre objectif est de présenter un modèle d’élection intègre qui sera suivi par le monde entier. Le scrutin sera couvert par plus de 500 correspon­dants étrangers et plus de 50 organi­sations et ONG égyptiennes et étrangères.

— Comment l’Organisme national des élections peut-il garantir une couverture impar­tiale de l’élection ?

— Le dialogue et la persuasion sont les principales garanties pour assurer l’impartialité de la couver­ture de l’élection. Ces garanties figurent d’ailleurs parmi les critères internationaux et le programme des Nations-Unies de gestion des élec­tions et aussi dans les clauses de la Constitution et de la loi égyp­tiennes.

— Quels sont les pouvoirs de l’Organisme national des élec­tions en cas de non-respect des critères d’impartialité ?

— L’organisme possède des pré­rogatives juridiques. Il possède des comités de suivi pour recenser tout ce qui est écrit sur les élections. Il est de son droit de contacter les journaux qui dérogent aux règles. L’objectif est que les journaux nationaux deviennent des modèles, car ils sont l’expression de l’Etat et de l’Egypte.

— Et si un journal continue à ne pas respecter les normes pro­fessionnelles ?

— Le statut de l’organisme com­porte de nombreux articles et les sanctions sont nombreuses. Elles peuvent atteindre l’interdiction pour le journal de poursuivre la couver­ture de l’élection. L’organisme a le droit de retirer les permis. En effet, si l’organisme juge qu’un journal a commis une infraction, il prévient le journal et des mesures peuvent être prises en coordination entre l’Organisme des élections et celui de la presse.

— Peut-on craindre une cer­taine tutelle de l’organisme sur les journaux ?

— L’organisme ne s’ingère nulle­ment dans la ligne éditorialiste des journaux. Je peux même vous avouer que les journalistes, dans les programmes télévisés des chaînes satellites, ont réclamé l’application de ces normes à tous les médias. J’ai répondu que nous sommes uni­quement concernés par la presse nationale, mais que nous sommes entièrement prêts à coopérer.

— Quelles sont les priorités de l’organisme en ce qui a trait à la couverture de l’élection ?

— Il s’agit essentiellement de ne pas déformer l’expérience égyptienne en s’engageant dans des conflits et en diffusant des mensonges. Il faut se montrer extrêmement vigilants envers les réseaux sociaux et ne publier de nouvelles provenant de ces réseaux sauf si nous sommes sûrs de leur cré­dibilité. En effet, les groupuscules terroristes se trouvent avec force sur cette énorme toile. Ils mènent une guerre acharnée pour gâcher l’expé­rience électorale.

— Quelles sont les limites de la critique ?

— Il est indispensable de respec­ter les limites déterminées par la loi pour que nous ne soyons pas ame­nés à utiliser les formules élastiques qui se trouvent dans celle-ci et que parfois nous appliquons, et parfois ignorons.

— Aux Etats-Unis, certains médias peuvent déclarer leur sou­tien absolu à tel ou à tel candidat. Les journaux nationaux peuvent-ils avoir un parti pris ?

— Ceci s’inscrit dans le cadre de la liberté d’opinion et d’expression. Ce qui est tout à fait acceptable de la part d’un éditorialiste. Mais les journaux nationaux, qui sont la propriété de l’Etat, doivent conserver leur impar­tialité.

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