« Ces élections doivent avoir lieu. Pour le peuple malien, pour l’exemple que nous devons donner à toute l’Afrique, et pour la légitimité qui doit être celle de l’autorité malienne (...) pour poursuivre le dialogue politique », a déclaré, le 10 mai, François Hollande dans la cour de l’Elysée lors d’une rencontre avec son homologue nigérien, Mahamadou Issoufou. Ils se sont prononcés pour la tenue d’élections au Mali, d’ici fin juillet. La France et le Niger participent à l’intervention armée lancée en janvier dernier pour chasser les rebelles islamistes qui occupaient alors le nord du pays.
La date des élections, le 7 et le 21 juillet, proposée par la France et approuvée par l’Etat malien, n’est pas tenable selon certains observateurs, surtout avec l’état d’insécurité qui règne dans plusieurs régions.
Selon l’analyste Philippe Hugon, chercheur à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), le calendrier de l’organisation de l’élection présidentielle au Mali n’est « pas crédible » et est « prématuré ». « Il y a encore des zones incontrôlées, les listes électorales ne sont pas encore définies et le climat est défavorable », indique-t-il à l’AFP. « Si on est optimiste, l’élection présidentielle n’aura pas lieu avant octobre ».
En outre, certains mouvements ont appelé au boycott de ce scrutin, comme le Rassemblement des Jeunes du Mali (RJM). Selon Abdoulaye Jourdan, secrétaire général adjoint du RJM, la libération du Nord-Mali n’est pas effective. La région de Kidal n’est pas sécurisée. Par ailleurs, les 400 000 Maliens déplacés (qui ont fui la guerre) ne peuvent pas voter.
D’ailleurs, l’administration de Bamako ne semble pas prête à regagner les régions du nord.
« Au vu de tous ces éléments, il est impossible d’organiser des élections libres et transparentes en juillet », annonce-t-il lors d’une interview faite par le site Afrik.com. Il propose que les élections soient tenues au mois d’octobre ou novembre. « L’intervention militaire française au Mali a permis de libérer une partie du Nord-Mali. Mais, il faut prendre le temps de bien organiser l’élection présidentielle », conclut-il.
Gagner du temps
Les affirmations d’Hollande font suite aux menaces lancées la semaine dernière par Al-Qaëda au Maghreb islamique (Aqmi) contre la France. Dans un message vidéo diffusé sur Internet le mardi 7 mai, le chef du Conseil des notables de l’organisation, Abou Obeida Youssef al-Annabi, a appelé « les musulmans du monde entier à attaquer les intérêts français partout ».
Les menaces de représailles après l’intervention française ne sont pas nouvelles.
Cependant, selon des spécialistes, ce qui semble changer, c’est que ce nouveau message a, avant tout, une dimension interne.
Mathieu Guidère, spécialiste d’Al-Qaëda et auteur, entre autres, de Al-Qaëda à la conquête du Maghreb, explique que les menaces d’Annabi, organe directeur du réseau, font du Mali une nouvelle terre de djihad, comme l’Iraq, l’Afghanistan ou plus récemment la Syrie. « Tous les musulmans sont appelés à participer à cette guerre ouverte et cela pourrait favoriser des initiatives individuelles », conclut-il.
Par ailleurs, le président français, qui a assuré prendre les menaces au sérieux, insiste pour conserver la tenue des élections à la date proposée, et cela malgré les critiques. « Les élections prévues en juillet au Mali doivent se tenir sur tout le territoire », affirme-t-il.
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