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L’Egypte riposte à l’offensive du Qatar

May Al-Maghrabi, Mardi, 08 août 2017

L'Egypte a rejeté les accusations du Qatar selon lesquelles elle abuse de son statut au sein du Conseil de sécurité. Celui-ci avait en effet approuvé une résolution proposée par l'Egypte pour empêcher les organisations terroristes de se procurer des armes.

L’Egypte riposte à l’offensive du Qatar
Le délégué permanent de l'Egypte au sein de l’Onu, Amr Aboul-Atta.

L’egypte a officiellement rejeté les déclarations du Qatar qui l’accuse d’« instrumentaliser à des fins poli­tiques » sa présidence du comité du terrorisme au sein du Conseil de sécurité de l’Onu. Le Conseil de sécurité de l’Onu avait approuvé, mardi 1er août, une résolution propo­sée par l’Egypte et visant à empêcher les organi­sations terroristes de se procurer des armes ou les moyens d’en fabriquer. Un succès qui vient couronner les efforts de l’Egypte, membre non permanent du Conseil de sécurité, dans la lutte contre le terrorisme (voir sous-encadré). En réplique aux accusations qatari, la mission per­manente de l’Egypte auprès des Nations-Unies a envoyé, jeudi 3 août, un mémorandum au prési­dent du Conseil de sécurité de l’Onu, dans lequel elle rejette les allégations qatari. Publié le lendemain sur le site du ministère des Affaires étrangères, le mémorandum affirme que le Qatar a soutenu financièrement et idéologiquement des groupes terroristes au Moyen-Orient et dans le monde entier. « Ce n’est pas étonnant qu’un pays qui soutient le terrorisme et s’ingère dans les affaires des autres pays interprète mal les efforts de l’Egypte dans la lutte contre le terro­risme, des efforts appréciés par la communauté internationale », a déclaré le délégué permanent de l'Egypte à l’Onu, l’ambassadeur Amr Aboul-Atta, tout en soulignant le respect par l’Egypte du droit international et des résolutions de l’Onu. Le mémorandum indique qu’il appartient à l’Egypte — en sa qualité de membre non per­manent du Conseil de sécurité et de présidente du comité de la lutte contre le terrorisme — de dévoiler les pratiques du Qatar, qui fournit une assistance idéologique, politique et financière aux groupes terroristes.

La mission de l’Egypte auprès de l’Onu, qui s’est dite « étonnée » des allégations qatari « infondées », a réclamé qu’une enquête soit ouverte sur les informations selon lesquelles le régime qatari soutient le ter­rorisme. Elle a ajouté : « Tout le monde est au courant des actions du Qatar en faveur du ter­rorisme en Syrie, en Iraq et en Libye ». L’Egypte adopte donc une position ferme face à la plainte déposée contre elle par le Qatar auprès du Conseil de sécurité et du secrétaire général des Nations-Unies, Antonio Guterres, et qui l’ac­cuse « d’utiliser son statut de membre du conseil à des fins politiques ».

De son côté, Doha a indiqué que l’Egypte poursuit des objectifs qui « n’ont aucun rapport avec la mission du Conseil de sécurité et ses comités » et que Le Caire « lance des accusa­tions infondées contre le Qatar ». Cette plainte, présentée au Conseil de sécurité à la fin du mois dernier et rendue publique le 2 août, porte la signature de la représentante permanente du Qatar à l’Onu. Les accusations qatari intervien­nent sur fond de crise avec l’Egypte et les pays du Golfe. L’Arabie saoudite, les Emirats, le Bahreïn et l’Egypte ont rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar le 5 juin dernier, accusant ce pays de soutenir le terrorisme. Le 22 juin, les 4 pays ont élaboré une liste de 13 reven­dications, jugées « irréalistes et irréalisables » par Doha. Le Caire a notamment dénoncé le soutien de Doha aux groupes terroristes et ses relations avec les Frères musulmans. En juin dernier, la mission diplomatique égyptienne au Conseil de sécurité a accusé sans fard le Qatar de financer des terroristes en Libye. Elle a aussi demandé à l’Onu d’enquêter sur des allégations selon lesquelles le Qatar avait versé des millions de dollars comme rançon à un groupe militant en Iraq pour libérer des membres de la famille royale du Qatar.

Manoeuvres qatari

Selon les spécialistes, les propos du Qatar contre l’Egypte constituent une tentative « infondée et désespérée » qui vise à détourner les regards loin de l’implication du Qatar dans le financement des organisations terroristes. Guéhad Ouda, professeur de sciences poli­tiques à l’Université de Hélouan, estime que la plainte du Qatar est un acte de représailles qui ne repose sur aucun fondement. « Le Qatar cherche à gagner la sympathie de la commu­nauté internationale en se faisant passer pour la victime. Ceci à un moment où l’étau se res­serre autour de ce pays impliqué dans le sou­tien au terrorisme. Après l’approbation de la récente résolution de l’Onu, proposée par l’Egypte et visant à empêcher les organisations terroristes de se procurer des armes, le Qatar tente de détourner l’attention des accusations qui pèsent sur lui. Or, son comportement montre qu’il n’a plus de cartes à jouer et qu’il a du mal à convaincre la communauté internationale », analyse Ouda. Selon lui, la riposte de la diplo­matie égyptienne auprès de l’Onu a permis d’étayer la position de l’Egypte et ses efforts dans la lutte contre le terrorisme. « L’Egypte a utilisé les voies officielles en présentant au Conseil de sécurité tous les arguments qui prouvent le soutien du régime qatari au terro­risme. C’est le Qatar qui se trouve dans l’im­passe ; s’il possède des contre-arguments, il n’a qu’à les présenter à l’Onu », ajoute Ouda.

Pour ce qui est du sort de la plainte qatari déposée contre l’Egypte, le professeur de droit international Ayman Salama exclut une décision du Conseil de sécurité en défaveur de l’Egypte. Il explique que le Conseil n’admet des plaintes de pays membres ou non membres de l’Onu qu’en cas de litige menaçant la sécurité et la paix internationales entre des pays membres de l’or­ganisation. « De toute son histoire, le Conseil de sécurité n’a jamais examiné ou accordé d’inté­rêt aux plaintes futiles comme celle présentée par le Qatar. Ce pays aurait mieux fait de s’in­former sur les prérogatives et les questions dont s’occupe le Conseil de sécurité avant de déposer une telle plainte, qui n’a aucune valeur et ne repose sur aucune preuve sérieuse. C’est logique que tout pays membre du Conseil de sécurité présente le point de vue de son pays face aux différentes questions et défende ses positions politiques », conclut Salama.

Une résolution cruciale pour la lutte antiterroriste

Sous la recommandation de l’Egypte, qui assume actuellement la pré­sidence du Conseil non permanent, le Conseil de sécurité de l’Onu a adopté à l’unanimité, le 1er août, une résolution visant à empêcher les organisations terroristes de se procurer des armes ou les moyens d’en fabriquer. La résolution 2370 (2017) prône un large éventail d’actions pour empêcher les terroristes de se procurer des armes de petit calibre, des drones et des produits utilisés dans la fabrication d’Engins Explosifs Improvisés (EEI). « Fournir des armes aux terroristes revient à leur fournir le moyen de tuer, détruire et terroriser ». C’est sur cette prémisse, rappelée par le représentant égyptien à l’Onu, l’ambassadeur Amr Aboul-Atta, que le Conseil de sécurité a adopté la résolution jugée indispensable par l’Egypte, afin d’assécher les ressources dont profitent les groupes terroristes. La résolution se présente comme un texte thématique dans lequel le Conseil reprend certains éléments issus de résolutions antérieures ayant trait à la lutte contre le terrorisme et au commerce des armes.

Par ce texte, le Conseil exhorte, notamment les Etats membres, à garantir la possibilité de prendre les mesures juri­diques appropriées à l’encontre de « ceux qui sont sciemment impliqués dans l’approvisionnement en armes de terroristes » ainsi qu’à « garantir la sécurité physique et la bonne gestion des stocks d’armes légères et de petit calibre ». Il les exhorte aussi à « encourager la mise en oeuvre des procé­dures de marquage et de traçage des armes légères et de petit calibre pour améliorer la traçabilité des armes qui pourraient être fournies aux terroristes à travers leur trafic illicite ». Le cas échéant, il les exhorte à renforcer leurs capacités judiciaires et répressives et leurs moyens de contrôler les frontières ainsi que leurs capacités à enquêter sur les réseaux de trafic d’armes, afin de prendre en compte les liens existant entre la crimina­lité transnationale organisée et le terrorisme. Seule candidate de son bloc régional, l’Egypte a été officiellement élue membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations-Unies pour l’Afrique du Nord (2016-2017) en octobre 2015

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