La libération de Benghazi a pris 3 ans de combats acharnés.
(Photo : AFP)
Après trois ans de combats intenses et acharnés, l’Armée Nationale Libyenne (ANL), autoproclamée par l’homme fort de l’Est libyen, Khalifa Haftar, a annoncé la libération totale de la deuxième ville libyenne, Benghazi, des mains des djihadistes. Cette ville importante, connue comme étant le bastion de la révolution libyenne de 2011, était tombée aux mains des djihadistes à la fin de 2013. Pour la reprendre, le maréchal Haftar a lancé une opération qu’il a appelée « Dignité » en mars 2014. « Après une lutte continue contre le terrorisme et ses agents, qui a duré plus de trois ans, nous vous annonçons la libération de Benghazi du terrorisme. Une libération totale », a déclaré la semaine dernière le maréchal Haftar dans un discours à la télévision. Cela dit, quelques combats se poursuivent. Il s’agit des combats qui continuent d’opposer des forces de l’ANL à des djihadistes retranchés dans la zone de Soug Al-Jarid, entre Soug Al-Hout et Al-Sabri. Selon les analystes, ces combats sont considérés comme les derniers accrochages avant de chasser définitivement les djihadistes. Ils traînent un peu en raison de la présence des civils dans ces zones.
Par ailleurs, le retour des civils reste difficile : les forces de Haftar ont appelé de nouveau les citoyens à ne pas entrer dans les zones libérées car un grand nombre de mines ont été trouvées. « Malgré la défaite, il reste quelques djihadistes dans les régions libérées capables de mener des actes terroristes et des attaques meurtrières. D’abord, conscients que leur fin approche, ils veulent causer le plus de dégâts et de victimes possibles, montrer qu’ils existent encore et qu’ils sont capables de nuire. Ensuite, ils veulent laisser planer le doute sur leur défaite et tentent surtout de fuir pour rejoindre d’autres groupes armés actifs et leur prouver leur loyauté », explique Dr Ayman Chabana, professeur à la faculté d’économie et de sciences politiques de l’Université du Caire. Or, le plus important dans la libération de Benghazi, au-delà de la libération en soi, ce sont les conséquences sur les rapports de force entre les différents acteurs libyens.
Deux autorités se disputent le pouvoir en Libye : un Gouvernement d’union nationale (GNA) basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale, et des autorités non reconnues basées dans l’est du pays, auxquelles est lié le maréchal Haftar. Ce dernier est un ancien dignitaire du régime Kadhafi qui a aussi vécu aux Etats-Unis. Il est accusé par ses rivaux, en particulier les puissantes milices de Misrata (ouest), de vouloir instaurer un régime militaire en Libye. Alors qu’aucun poste ne lui a été attribué dans l’accord politique inter-libyen conclu fin 2015 et qui avait abouti à la formation du GNA, le maréchal Haftar conteste la légitimité du Gouvernement d’union nationale (GNA) de Fayez Al-Sarraj, reconnu par la communauté internationale et installé à Tripoli. Après cette victoire, il est tout à fait possible que Haftar puisse imposer sa présence sur la scène politique de manière plus visible. Aujourd’hui, il est soutenu par d’importants pays comme l’Egypte voisine, ainsi que les Emirats arabes unis, où il s’est rendu dimanche 9 juillet. Il s’est aussi rapproché de la Russie début 2017. « Tout dépendra, dans la période à venir, du soutien étranger à Haftar », affirme Chabana, qui estime que la médiation émiratie est très importante. En effet, Abu-Dhabi avait organisé le 3 mai dernier une rencontre entre Haftar et Sarraj. Rien de concret n’avait alors filtré, tout comme lors de la rencontre de cette semaine. Mais il est clair qu’aujourd’hui, les Emirats repartent à l’offensive diplomatique. Et ce, à un moment où Khalifa Haftar s’impose de plus en plus comme un interlocuteur indispensable, après avoir libéré Benghazi et s’être emparé (il y a plusieurs mois) de quatre terminaux pétroliers dans l’est, d’où s’exporte la majorité du pétrole libyen.
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