L'inflation est causée par une hausse des coûts de la production et non une hausse de la demande.
(Photo:Reuter)
Afin de contrer l’inflation galopante, la Banque Centrale d’Egypte (BCE) a décidé d’élever les taux d’intérêt directeurs de 2 %, afin de contrer l’inflation prévue suite à la hausse des prix des carburants et de l’électricité début juillet. La décision prise lors de la réunion du comité des politiques monétaires de la banque jeudi 6 juillet a pris de court les économistes qui pariaient que la BCE allait garder les taux d’intérêt fixes. Selon eux, une telle décision peut avoir un effet négatif sur l’investissement sans avoir d’effet positif sur l’inflation. En effet, les économistes s’inquiètent surtout des conséquences d’une telle décision sur l’investissement. « Nous avons remarqué une hausse minimaliste des dépôts suite à la hausse des taux d’intérêt en mai, signalant que cette politique ne se reflète pas sur l’économie. En outre, les taux d’intérêt actuels sont déjà élevés, limitant la demande de crédits dans le secteur privé », note Aliaa Mamdouh, économiste en chef auprès de Beltone Financial. Elle prévoit que d’autres facteurs, comme une baisse prévue du taux de change, pourraient contrer l’inflation, mais pas la hausse du taux d’intérêt, vu que l’inflation est causée par une hausse des coûts de production non flexible, et non par une hausse de la demande.
En effet, neuf économistes sur dix interrogés par Reuters avant la décision ont prédit que la banque laisserait inchangés ses taux d’intérêt clés. Hani Farahat, économiste en chef auprès de la banque d’investissement CI Capital, le seul ayant prévu la hausse, a déclaré à Reuters qu’il ne s’attendait pas à ce que la hausse des taux d’intérêt soit efficace pour lutter contre l’inflation. « Nous nous attendions à une hausse des taux malgré notre point de vue selon lequel cela ne réduirait pas l’inflation. La BCE n’avait pas le choix, car elle a suivi une très forte hausse des prix des carburants qui ajouterait, selon le ministère des Finances, 4 % à l’inflation », a-t-il expliqué. Le gouverneur de la BCE, Tareq Amer, a dit que la décision vise à régler les marchés, alléger l’effet de la hausse des prix sur les citoyens et stabiliser les prix.
Controverse
La hausse du taux d’intérêt est, en fait, un outil monétaire traditionnel pour contenir l’inflation, un mandat principal de la BCE. Or, cette fois-ci, la décision est controversée vu que le comité des politiques monétaires avait déjà augmenté ses taux d’intérêt par 2 % lors de sa dernière réunion en mai. « La décision est une surprise et nous avons appelé à une fixation des taux d’intérêt vu que les chiffres de l’inflation de juin n’ont pas encore été annoncés. Nous croyons que c’est encore trop tôt de juger l’effet de la dernière hausse annoncée en mai », dit un papier de recherches de Beltone. Actuellement, le taux d’intérêt pour une nuit sur les dépôts est de 18,75 % et celui sur les crédits est de 19,7 %. En incluant la dernière hausse, la BCE a augmenté les taux d’intérêt par 10 % depuis décembre 2015.
En outre, le scepticisme des économistes vient du fait que l’inflation est due à une hausse du coût de production et non à une hausse de la demande, ce qui fait que la consommation n’est pas flexible. En avril, l’inflation annuelle a atteint un niveau record depuis trois décennies, dépassant les 30 %, avant de légèrement fléchir en mai. La hausse était la conséquence d’un programme de réforme économique adopté en accord avec le Fonds Monétaire international (FMI), selon lequel le gouvernement a libéré le taux de change, élevé à deux reprises les prix des carburants et imposé une taxe sur la valeur ajoutée en octobre et novembre 2016. La baisse du taux de change de la livre égyptienne face au dollar par 50 % a été un facteur-clé de la hausse des prix, dans un pays net importateur, y compris des produits alimentaires. La tendance à la baisse en mai est prévue être reversée par la récente hausse des prix des carburants et de l’électricité. Arqaam Capital prévoit un taux d’inflation quelque part entre 35 et 38 % cet été, en conséquence du plan de réforme prévu. Cependant, Arqaam soutient le programme de réforme. « Nous avons prévu et plaidé pour ce pas (la hausse des prix des carburants) et nous croyons qu’il est mieux fait en 2017 pour ouvrir le chemin à une reprise graduelle en 2018, alors que les consommateurs et investisseurs s’ajustent aux chocs des deux dernières années », souligne un rapport d’Arqaam Capital.
La hausse des taux d’intérêt pourrait surtout affecter le budget. Mohamad Maït, vice-ministre des Finances pour les affaires du Trésor, a dit que le budget n’a pas pris en compte l’effet des deux dernières hausses des taux d’intérêt par 4 % sur le service de la dette, prévu originalement atteindre 381 milliards de L.E. « Nous prévoyons que la hausse des taux d’intérêt sera temporaire pour contenir l’inflation prévue baisser début 2018, amenant une baisse des taux d’intérêt », dit-il. Le gouvernement a un objectif d’amener l’inflation à 13 % en 2018 .
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