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Liban : Eviter le pire

Abir taleb, Mardi, 30 avril 2013

Les différentes parties tentent de contenir la double crise naissante due à l’implication du Hezbollah en Syrie et à l’absence de consensus sur la loi électorale.

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Un mois après sa nomination, Tammam Salam essaye de former le gouvernement.

Si un mot devait être choisi pour qualifier la situation politique au Liban, ce serait sans aucun doute l’adjectif « complexe ». Rien n’est en effet jamais simple dans ce pays aux 18 confessions, encore marqué par les effets de la guerre civile, coincé entre Israël et la Syrie, et dont le sort a toujours été intrinsèquement lié à cette dernière, (le pays du Cèdre ayant été occupé par l’armée syrienne pendant 29 ans, jusqu’en 2005).

Depuis le début de la crise syrienne, il y a plus de deux ans, le Liban tente tant bien que mal de se garder à distance de ce qui se passe chez son voisin. Mais entre les débordements sur son propre territoire, notamment les affrontements sporadiques entre sunnites et alaouites à Tripoli, et le rôle présumé du Hezbollah dans les combats qui ont eu lieu la semaine dernière dans les villages de la région syrienne de Qousseir, frontalière du Liban, Beyrouth a du mal à tenir au mot d’ordre de « distanciation », prôné par les autorités. Et désormais, le long des routes de la plaine de la Bekaa, dans l’est du Liban, ce ne sont plus les portraits des combattants du Hezbollah tués lors d’affrontements contre Israël qui sont brandis, mais ceux des « nouveaux martyrs » du mouvement chiite libanais, morts en Syrie, en se battant au côté de l’armée du président Bachar Al-Assad.

Selon certains analystes, le Hezbollah a cédé aux pressions de l’Iran, au risque de perdre sa crédibilité sur la scène intérieure. Même sur le plan régional, jamais le Hezbollah n’a été aussi impopulaire, alors qu’il avait le vent en poupe depuis la guerre contre Israël, l’été 2006. Et nombreux sont ceux qui craignent que la crise syrienne n’implique tout le Liban, notamment à la suite de l’annonce faite jeudi dernier par Israël d’avoir abattu un drone entré dans son espace aérien en provenance du Liban, accusant le Hezbollah qui a démenti son implication.

Ces craintes se font aussi sentir à la suite des appels lancés ça et là par les dignitaires religieux. Du côté des chiites, un haut dirigeant du Hezbollah a parlé de « devoir national et moral ». Et le parti justifie à la communauté chiite qu’il s’agit de défendre les 13 villages chiites libanais se trouvant à l’intérieur de la Syrie et qui étaient, selon lui, attaqués par les rebelles. Parallèlement, de l’autre côté, sunnite, on a entendu des appels au djihad aux côtés de l’opposition syrienne.

Un gouvernement qui se fait attendre

Voilà qui consacre la division, même si les appels au djihad ont peu de chances d’être suivis. Pour le moment, le seul point positif, malgré ces tensions, est que les forces politiques sont unanimes pour éviter une déstabilisation politique, car aucune d’entre elles n’y a intérêt pour le moment. D’autant plus que la scène politique intérieure est loin d’être stable.

Le gouvernement se fait toujours attendre, près d’un mois après la nomination de Tammam Salam au poste de premier ministre, tout comme la loi électorale. Bien qu’il y ait eu un consensus sur le choix de M. Salam (issu de l’Alliance du 14 Mars) et que l’Alliance du 8 Mars (dominée par le Hezbollah) ait approuvé ce choix, les vraies difficultés sont apparues dès la désignation du premier ministre, car le véritable enjeu réside dans la répartition des portefeuilles, les caractéristiques et les tâches du prochain gouvernement, ainsi que les divergences concernant la loi électorale.

Jusqu’à présent, Tammam Salam a réussi à imposer les conditions suivantes : le cabinet sera formé de politiques, non partisans et non candidats aux prochaines élections législatives. Surtout, il insiste sur le principe de l’alternance au niveau de la répartition des portefeuilles qui ne seront pas l’apanage de telle ou telle partie ou communauté. Il a également accepté le principe selon lequel la mission de son gouvernement ne sera pas uniquement de gérer les élections, mais d’affronter une période particulièrement critique de l’histoire du pays. Selon le journal L’Orient le Jour, on se dirige vers une formule de 10 ministres proches du 14 Mars, sept ministres pour l’équipe neutre et sept ministres proches du 8 Mars.

Mais le plus dur reste la loi électorale. La semaine dernière, la sous-commission ad hoc chargée d’élaborer ce texte a suspendu ses réunions, malgré le délai du 19 mai. Or, il ne reste donc plus que deux semaines pour d’ultimes tractations avant que le président du Parlement, Nabih Berry, ne convoque la séance plénière de la dernière chance le 15 mai. Soit les députés s’entendent sur la loi électorale, soit ils s’entendent pour proroger leur mandat qui expire le 19 juin, soit ils restent divisés et le 19 mai, date d’expiration de la suspension des délais électoraux, le pays s’engage dans un bras de fer entre le 14 Mars et ses alliés, qui veulent la tenue des élections sur la base de la loi de 1960, et le 8 Mars et ses alliés qui rejettent totalement cette loi .

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