Déjà fragilisé par des soupçons de corruption et des polémiques sur la violation des droits des travailleurs étrangers, le Mondial du Qatar affronte un nouveau défi avec la crise diplomatique qui secoue la région du Golfe. Accusé par ses voisins de soutenir le terrorisme, la réputation du Qatar est au plus mal, avec cette nouvelle tempête qui vient nuire à l’image du riche émirat pétrolier. Désigné à la surprise générale en 2010 comme pays hôte de la compétition mondiale aux dépens des Etats-Unis et de l’Australie, le Qatar est le premier pays arabe de l’histoire à jouir de cet honneur. Mais selon l’avis de plusieurs observateurs, le Qatar risque de perdre l’organisation du Mondial comme conséquence de cet isolement diplomatique qui remet en cause la capacité du petit émirat d’organiser l’événement le plus important dans le monde du football. «
Je pense que cela va avoir un réel impact si cela dure », déclare à l’
AFP Kristian Ulrichsen, spécialiste du Golfe à l’institut de Baker, à l’Université de Rice. «
L’un des arguments pour justifier l’attribution de la Coupe du monde était que le Qatar est l’un des pays les plus stables du Moyen-Orient », ajoute-t-il.
Le sport, une stratégie
Cela fait une vingtaine d’années que le Qatar mise sur le sport pour se faire connaître dans le monde entier. Et le petit émirat a réussi à gagner une grande réputation grâce à son grand investissement dans le monde du sport à l’image du fonds souverain Qatar Football Investments, propriétaire du célèbre club français Paris Saint-Germain et Qatar Airways, l’un des partenaires du géant footballistique mondial FC Barcelone depuis 2013. Le Qatar avait également réussi à organiser des événements importants comme le Championnat du monde de handball en 2015, sans compter aussi le rôle important des chaînes satellites Al-Jazeera Sports, devenues en 2013 beIN Sports pour promouvoir au petit émirat, ce qui lui a permis d’occuper une place importante sur la carte du sport mondial. « La crise actuelle soulève également une question importante en termes d’évaluation des risques et de planification. Plus nous nous rapprochons de 2022, plus le Qatar sera exposé. En termes de réputation et de complications prévisibles, c’est un problème majeur pour le Qatar », explique à l’AFP Simon Chadwick, professeur en économie du sport à l’Université britannique de Salford.
En outre, la décision de l’Arabie saoudite de fermer ses frontières terrestres et maritimes avec le Qatar pourrait entraver l’acheminement des matériaux nécessaires pour la construction des stades et va retarder la livraison des enceintes sportives pour le Mondial. C’est alors que le Qatar risque de subir le même sort que la Colombie en 1983 quand la Fifa a décidé de retirer l’organisation de la Coupe du monde 1986 du pays latin en raison de son incapacité logistique à accueillir la compétition mondiale. Ce qui sera une perte catastrophique pour le Qatar. Selon une déclaration de Ali Chérif Al-Emadi, ministre qatari des Finances, en février dernier, le riche émirat dépense 500 millions de dollars par semaine dans la construction des infrastructures pour accueillir la compétition.
Pour sa part, la Fifa a déclaré dans un communiqué qu’elle était en contact régulier avec les organisateurs et qu’elle n’a aucun autre commentaire pour le moment sur ce sujet. « Cinq ans nous séparent du Mondial du Qatar, et durant cette période, il faut résoudre cette crise politique, mais en principe c’est inacceptable que les grands événements sportifs prennent place dans des pays qui soutiennent le terrorisme », a indiqué Reinhard Grindel, président de la Fédération allemande du football, dans un entretien avec le site officiel de la fédération. C’est clair que le Mondial qatari est bel et bien menacé.
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