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Syrie : Un nouveau round pour rien

Inès Eissa, Vendredi, 26 mai 2017

Le 6e round de négociations intersyriennes s’est achevé à Genève sans résultat concret. Genève est ainsi en passe de devenir un exercice diplomatique de routine.

Syrie : Un nouveau round pour rien
De Mistura a promis de reprendre les pourparlers en juin. (Photo:AP)

Les américains ont bombar­dé l’armée syrienne pour une deuxième fois jeudi dernier. Une frappe qui a été considérée comme un avertisse­ment à tous les protagonistes que la donne a changé sous l’Administration Trump. En effet, cette frappe est intervenue en pleines négociations de paix.

Le sixième round de pourparlers sur la Syrie sous l’égide de l’Onu a pris fin vendredi 19 mai sans réel progrès et sur fond de tensions. Concluant devant les journalistes quatre jours de négociations indi­rectes à Genève entre la délégation de Damas, dirigée par l’ambassadeur aux Nations-Unies, Bachar Al-Jaafari, et le Haut Comité des Négociations (HCN), qui réunit l’opposition, l’en­voyé spécial de l’Onu, Staffan de Mistura, a indiqué vouloir reprendre les pourparlers courant juin, mais à une date qui n’a pas encore été fixée.

Seule avancée tangible obtenue cette semaine : des entretiens de fonc­tionnaires de l’Onu avec des experts du gouvernement, d’une part, et de l’opposition, d’autre part, pour abor­der « des questions juridiques et constitutionnelles ». Ces réunions se tiendront durant les pourparlers mais aussi probablement entre chaque série de négociations. « Nous n’allons pas rédiger une Constitution, mais cela va beaucoup aider », a spécifié M. De Mistura. Le diplomate italo-sué­dois a aussi expliqué que, faute de temps, les parties en présence n’avaient pas pu discuter des quatre sujets à l’ordre du jour adopté lors du quatrième round de discussions : lutte contre le terrorisme, gouvernance (terme flou pour évoquer une transi­tion politique), nouvelle Constitution et organisation d’élections.

Alors que les discussions prenaient fin à Genève, les tensions grandis­saient au lendemain de la frappe de la coalition conduite par les Etats-Unis qui a visé, selon la Syrie et son allié russe, l’armée syrienne. La Syrie a condamné cette « agression de la coalition », tandis que le vice-ministre russe des Affaires étran­gères, Guennadi Gatilov, cité à Genève par les agences de presse russes, a dénoncé un bombardement « inacceptable ». Un porte-parole militaire de la coalition antidjiha­diste, le colonel Ryan Dillon, avait évoqué jeudi un convoi de « forces pro-régime », et un autre responsable américain avait dit qu’il s’agissait « probablement », de milices chiites, sans être plus précis sur leur identité. Selon l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH), huit personnes, « pour la plupart non-syriennes », ont été tuées.

A Genève, un porte-parole du HCN, Yéhya Al-Aridi, a qualifié « la frappe d’action énergique contre les forces étrangères qui ont transformé la Syrie en un grand champ de bataille ». Au total, six séries de pourparlers indirects ont déjà été organisées depuis 2016 sur les bords du lac Léman par M. De Mistura, sans parvenir à trouver une issue pour mettre fin au conflit, les discus­sions ayant achoppé à chaque fois sur le sort réservé au président syrien, dont l’opposition exige le départ.

Les efforts en vue de mettre fin à la guerre sont désormais déployés sur deux circuits parallèles : le processus politique officiel à Genève, tandis que d’autres pourparlers axés sur la sécu­rité ont lieu depuis janvier à Astana, capitale du Kazakhstan, à l’initiative de la Turquie, soutien des rebelles, et de la Russie et l’Iran, alliés du régime syrien. Alors que les négociations en Suisse sont de plus en plus éclipsées par les pourparlers d’Astana et par les défaites militaires des rebelles, M. De Mistura a assuré vendredi qu’Astana et Genève devaient « s’épauler réci­proquement ». Le chef de la déléga­tion de l’opposition syrienne, Nasr Al-Hariri, a reconnu vendredi que les pourparlers à Genève n’avaient guère avancé mais a estimé que « maintenir le processus (...) actif était une réus­site ». La situation en Syrie est d’au­tant plus compliquée que les Américains n’ont pas encore adopté une politique claire et bien définie. « Bien que, pendant sa campagne électorale, Donald Trump ait placé le combat contre Daech comme sa prio­rité en Syrie, avec son arrivée au pouvoir, le président américain a fait un revirement majeur pour mettre l’Iran et le Hezbollah comme un objectif prioritaire », explique un diplomate qui a requis l’anonymat. Selon lui, ce revirement a rendu l’en­tente avec la Russie beaucoup plus difficile. « Il est évident que dans ces conditions il s’avère très difficile pour les parties prenantes d’avancer dans les négociations de Genève », confie le diplomate .

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