2008. Une année marquante pour la mentalité chinoise. C’est l’année des Jeux olympiques accueillis par Beijing et de la crise économique mondiale. On s’est rendu compte qu’on s’en sortait plutôt bien, que le modèle chinois était assez performant et que l’Occident n’était peut-être pas aussi extraordinaire qu’on le pensait. Il était temps alors de s’ouvrir davantage sur le monde, d’exporter son rêve et de diversifier ses intérêts. Ceci allait de pair avec la politique «
Going out », adoptée par la Chine dès les années 1990, pour encourager de façon sélective certains investissements à l’étranger.
A partir de là, les médias ont connu une expansion assez rapide. L’agence de presse officielle, Xinhua, créée au début des années 1930, s’est dotée, à titre d’exemple, de 1 018 bureaux de par le monde, au lieu de 107 dans les années 1970. Ceci est venu s’ajouter aux publications qui étaient déjà sur le marché, telles China Today (la Chine au présent, en français), Beijing Review, China Daily, etc., s’adressant à un lectorat étranger, et lesquelles dépendent du fameux CIPG (Foreign Language Publishing), fondée en 1949, année de la création de la République populaire.
La Chine a voulu ensuite lancer d’autres nouveau-nés, ciblant notamment le public africain. Cet intérêt pour le continent noir s’est traduit par un nombre de projets et d’institutions médiatiques avec l’avènement d’une autre année charnière.
2012. Cette année a vu naître la chaîne CCTV Africa, le supplément hebdomadaire en langue anglaise African Weekly, lancé par le quotidien China Daily, et l’African Communication Research Center, lequel sera suivi en 2014 par le centre de presse Chine-Afrique, offrant régulièrement un séjour d’étude de 10 mois pour les journalistes en visite. D’ailleurs, ce centre, parrainé par l’Association de la diplomatie publique, vient de recevoir 29 journalistes de 29 pays en 2017. De la propagande pour l’expansion chinoise en Afrique ? « Et alors, pensez-vous que les Occidentaux, eux, ne se livrent pas à la propagande ? On le fait tous, d’une certaine manière. Moi aussi j’essaye de faire de la publicité pour mon institut, en m’adressant à vous », dit Zhang Yanqiu, vice-doyenne de l’Université de communication de Chine, également directrice de son programme sur l’Afrique. Des articles sur la vie en Afrique, sa culture, son économie, écrits parfois par des correspondants locaux, permettent aux Chinois une meilleure compréhension de ce qui se passe, loin par là-bas, sans passer forcément par les médias occidentaux. Mais aussi les articles vont dans un sens comme dans l’autre, c’est-à-dire ils cherchent à introduire la Chine aux lecteurs du continent noir, en faisant plutôt focus sur son histoire, sa culture et ses atouts. Car les directeurs des rédactions chinoises veulent à tout prix susciter l’intérêt du lecteur africain, se rapprocher de lui, en ouvrant depuis voilà cinq ans des bureaux de proximité en Afrique du Sud, au Sénégal, comme l’a fait la revue ChinAfrique, lancée en 2009 par son aînée publiée en anglais Beijing Review.
« Nous avons de très mauvaises relations avec le voisinage : le Japon, la Corée du Sud, etc. On ne s’aime pas car l’on se connaît trop. Et pour réussir une relation, il faut garder ses distances », ironise Guan Juanjuan, vice-directrice de Radio Chine Internationale, comme pour expliquer pourquoi la Chine est partie si loin à la recherche de matières premières, mais aussi de relations plus saines. Le pays a décidé de sortir de ses frontières autant physiquement qu’économiquement que virtuellement grâce à Internet. Ainsi, l’Afrique possède quatre comptes publics, dont Bobu Africa et Star Times, sur l’application téléphonique très répandue en Asie, WeChat (l’équivalent de WhatsApp). Juste des exemples attirant des millions d’abonnés.
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