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Amani Maämoun : Qu'une femme soit indépendante financièrement est un atout peu apprécié par la majorité des hommes

Dina Bakr, Lundi, 15 mai 2017

Amani Maämoun, avocate et fondatrice de l’Association Ganoubiya Horra (une sudiste libre), revient sur le choix de Liqaä, qui exerce un métier traditionnellement masculin.

Al-Ahram Hebdo : Est-ce que la révolution a contribué à des changements concernant la situation de la femme en Haute-Egypte ?

Amani Maämoun : Le mode de vie a en effet un peu changé. Les filles commencent à se voiler un peu plus tard. Autrefois, les jeunes filles portaient le voile au cycle primaire, aujourd’hui, elles attendent d’être à l’université pour le mettre. Les femmes, entre 18 et 30 ans, commencent à parti­ciper à des actions au sein de la société civile pour réclamer un meilleur statut pour les femmes. Par exemple, notre association a enregistré une forte augmentation de la participation aux groupes de paroles où les femmes peuvent enfin prendre la parole et partager leurs problèmes. Ces groupes de paroles font partie de l’initiative Bossy (regarde). En outre, les femmes du Saïd jouent un rôle important dans le développement de leur région. Citons l’exemple de l’Association Oum Al-Qora (gérée par des femmes) à Kom Ombo où des femmes ont obtenu leur indépen­dance financière en emballant des produits du terroir comme les dattes et l’hibiscus et en les revendant à de grandes surfaces telles que Carrefour.

— Est-il normal qu’une femme exerce un métier réservé aux hommes en Haute-Egypte ?

— Qu’une femme travaille dans un domaine qui ne lui est pas réservé est rare. En Haute-Egypte, l’homme admet que la femme travaille pour l’aider à subvenir aux besoins de la famille. Mais qu’elle travaille pour s’affirmer et pour gagner une certaine indépendance est une chose encore peu admise dans la société.

— Quel est le regard des hommes sur le tra­vail des femmes ?

— Notre association a effectué un sondage pour comprendre comment les hommes perçoivent le travail des femmes. Et les résultats ont montré très nettement que les hommes voient d’un mauvais oeil les progrès que font les femmes en termes de droits et de liberté. D’après eux, la force de travail que représentent les femmes est un danger pour leurs propres emplois. Qu’une femme soit indé­pendante financièrement est un atout peu apprécié par la majorité des hommes. Il est facile d’en­tendre : « Je ne saurai pas comment me compor­ter avec une femme active. Comment pourrais-je placer un mot ou lui ordonner quoique ce soit sans qu’elle me réponde ? ». Malheureusement, une majorité d’hommes considère qu’améliorer la situation des femmes risque de leur faire perdre leur privilège et remettre en cause leur position dominatrice de chef de famille.

— Comment développer le travail des femmes en Haute-Egypte ?

— Il faut avoir une loi garantissant à la femme un travail permanent, et éradiquer les disparités en inscrivant les filles dans l’enseignement tech­nique quel que soit le domaine. Il faut également que l’Etat investisse davantage en Haute-Egypte, afin d’améliorer le niveau de vie des habitants. Si une telle chose était faite, cela éviterait aux jeunes filles un mariage précoce qui met fin à leurs aspirations et détruirait leur avenir.

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