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Que fait Israël en Syrie ?

Inès Eissa avec agences, Jeudi, 04 mai 2017

Israël aurait attaqué cette semaine une cible à Damas. Une attaque qui remet sur le tapis l'épineuse question de la position d'Israël dans la guerre syrienne.

Que fait Israël en Syrie ?
Le bombardement de l'aéroport de Damas est la deuxième attaque israélienne menée en 4 jours après celle du Golan. (Photo : AFP)

Cela fait plusieurs semaines qu’Israël lance des attaques sporadiques contre la Syrie. Mais la tension est montée d’un cran cette semaine : après le Golan, c’est Damas, la capitale, qu’Israël aurait ciblée. En effet, l’armée israélienne a effectué une attaque à la fin de la semaine contre une base militaire près de l’aéroport de Damas. La Syrie a accusé son voisin israélien d’avoir provoqué une énorme explosion jeudi dernier en tirant des missiles sur une position militaire, près de l’aéroport international de Damas. L’Etat hébreu, qui confirme rarement ses nombreuses attaques lancées en territoire syrien depuis le début de la guerre civile en 2011, a laissé entendre qu’il pourrait en être l’auteur, tout en maintenant le flou. Le ministre du Renseignement, Israël Katz, a déclaré que la frappe présumée était « cohérente » avec la politique israélienne, sans confirmer une responsabilité de son pays.

Une attaque qui rebat les cartes à un moment où la politique de l’Administration du président américain, Donald Trump, à l’égard de la Syrie n’est pas encore claire.

Si l’implication israélienne se confirmait, il s’agirait de la deuxième attaque menée en quatre jours par Israël contre des cibles en Syrie. « Une position militaire au sud-ouest de l’aéroport international de Damas a été la cible à l’aube d’une agression israélienne avec plusieurs missiles (...) », qui a provoqué des dégâts matériels, a indiqué l’agence officielle Sana citant une source militaire. Elle n’a pas précisé s’il s’agissait d’une position syrienne. De son côté, l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH) a, lui, indiqué qu’un dépôt d’armes, vraisemblablement appartenant au Hezbollah libanais, avait explosé près de l’aéroport sans fournir d’autres détails. La plus grande partie de l’entrepôt était vide, a dit l’ONG.

Le Hezbollah en ligne de mire

Bête noire d’Israël, le Hezbollah combat aux côtés du régime de Bachar Al-Assad contre rebelles et djihadistes. Selon le Hezbollah, l’explosion, « vraisemblablement due à un raid aérien israélien », s’est « produite dans des dépôts de fuel et un entrepôt ». Face à cette escalade, la Russie, autre allié de poids du régime syrien, a appelé « tous les pays » à la « retenue » et a mis en garde contre une « montée des tensions » en Syrie, selon le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

En fait, Israël s’alarme de la présence en Syrie du Hezbollah et de forces envoyées par l’Iran, son autre ennemi juré, pour prêter main forte au régime. « Quand l’on identifie des tentatives de transfert d’armes sophistiquées au Hezbollah et que nous avons des informations des services de renseignements à ce sujet, nous agissons pour les prévenir », avait dit le premier ministre, Benyamin Netanyahu.

Israël et la Syrie sont techniquement en état de guerre. Déclenchée en mars 2011 par la répression de manifestations anti-régime, la guerre en Syrie s’est progressivement complexifiée avec l’implication de groupes djihadistes, de forces régionales et de puissances internationales, sur un territoire très morcelé.

Cette énième attaque israélienne contre la Syrie évoque un tas de questions sur son objectif ainsi que sur ses enjeux. Dr Sameh Rachad, directeur du Centre des études arabes et africaines d’Al-Ahram, estime qu’« Israël n’a pas de problème existentiel avec le régime du Bachar Al-Assad. Au contraire l’option d’un maintien d’Assad est dans l’intérêt de Tel-Aviv si on la compare à l’alternative des groupes islamistes ». Et d’ajouter : « Israël a adopté, depuis le début de la guerre en Syrie, une politique qui repose sur des interventions chirurgicales brèves dans le but de prévenir des menaces précises ou des transferts d’armes au Hezbollah ».

Pour l’analyste politique, la dernière attaque s’inscrit dans la même stratégie adoptée depuis des années. Selon lui, l’attaque israélienne ne reflète absolument pas un revirement de la politique des Etats-Unis, alliés d’Israël, à l’égard de la Syrie. « Ce n’est pas la première attaque et ce ne serait pas la dernière. Le gouvernement israélien n’a jamais demandé la permission de Washington avant d’effectuer une frappe en Syrie. Mais il se contente néanmoins de lui faire part de toute frappe a priori », estime Rachad.

Quant au jugement de quelques observateurs évaluant l’attaque comme une tentative d’en finir avec le rôle de l’Iran en Syrie, Dr Rachad explique que « la dernière attaque israélienne n’a pas été effectuée dans le cadre d’une politique qui viserait à exclure l’Iran de l’équation syrienne. Du point de vue de Tel-Aviv, la présence d’Israël sur la scène syrienne est un facteur stabilisateur qui conditionne tout dérapage sunnite extrémiste ». Il conclut que la présence de l’Iran contribue à régler le rythme de l’action militaire au sol : « Pour Israël, le Hezbollah connaît mieux ses limites que les factions islamistes. L’attaque israélienne se situe dans une équation régulée par les règles de jeu qui régissent le rôle d’Israël en Syrie depuis cinq ans et qui demeurent jusqu’à présent inchangeables ».

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