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Ola Boutros : Le général Aoun fait l’objet d’un large consensus 

Osman Fekri, Mardi, 01 novembre 2016

Ola Boutros, conseillère du ministre libanais des Affaires étrangères et chef du Mouvement patriotique libre, Gebran Bassil, revient sur l'élection de Michel Aoun à la présidence du Liban.

Ola Boutros : Le général Aoun fait l’objet d’un large consensus

Al-ahram Hebdo : Quelles sont les raisons qui ont amené l’ancien premier ministre, Saad Al-Hariri, à soutenir la candidature de Michel Aoun ?

Ola Boutros: Le général Michel Aoun fait l’objet d’un large consensus y compris au sein des principaux blocs parlementaires, comme le bloc du Changement et de la réforme, le Courant de l’avenir, les Forces libanaises, le bloc de la Fidélité à la résistance, ou encore celui de la Rencontre démocratique. Michel Aoun bénéficie également du soutien de personnalités indépendantes, comme le ministre Mohamad Al-Safadi. L’ex-premier ministre, Saad Al-Hariri, a expliqué que son soutien au général Aoun est intervenu après l’abandon des alternatives que représentaient Samir Geagea et Sleiman Frangié. Par ailleurs, le général Aoun appelle, depuis 2005, Saad Al-Hariri à assumer un rôle patriotique sur la base d’une entente englobant toutes les factions politiques. Aoun a toujours estimé avoir beaucoup de dénominateurs communs avec le Courant de l’avenir.

— Le choix du général Aoun est-il influencé par des facteurs régionaux ou des pressions étrangères ?

— Pour ce qui est des forces régionales, l’Arabie saoudite a fait savoir qu’elle n’imposerait son veto sur aucun des candidats, considérant que c’est une question interne au Liban. Par ailleurs, Téhéran a confié l’affaire au Hezbollah. Au niveau international, les Etats-Unis et la France cherchent avant tout à la stabilité du Liban, et respectent le choix des Libanais. Au sujet du conflit en Syrie, l’entente conclue entre le Courant patriotique libre et le Courant de l’avenir prévoit une position neutre du Liban. Une position progressiste et en harmonie avec la politique du chef de la diplomatie, Gebran Bassil, qui cherche à assurer l’indépendance de la politique étrangère du Liban. La personne la plus à même de pouvoir mettre en pratique une telle politique est le général Aoun, notamment grâce à ses rapports avec les diverses factions libanaises.

— Dans ce cas, pourquoi le consensus autour du général Aoun a-t-il tant tardé ?

— Le général Aoun représente à lui seul 86 % des chrétiens, il possède une grande expérience dans le domaine public et bénéficie d’une très grande popularité. Or, au départ, les autres communautés n’ont pas reconnu ces atouts. Rappelons que le général Aoun est issu de la communauté maronite qui a résisté à la « turkification » du Liban et qui a participé à la fondation de la République en 1920 et à la confirmation de son identité arabe en 1943. C’est dans cette lignée que s’inscrit la politique du général Aoun, qui défend l’intégrité du Liban contre le partage, la division et toute implantation étrangère. Dans un contexte régional chaotique et explosif, cette politique est susceptible de déranger les extrémistes et les terroristes, ainsi que toutes les forces hostiles à la stabilité du Liban.

— Comment expliquez-vous que le président du parlement, Nabih Berri, soit aussi hostile à la candidature présidentielle de M. Aoun ?

— Je crois que c’est M. Berri qui doit expliquer sa position. Nous aurions cependant souhaité que tout le monde soit impliqué dans l’entreprise patriotique visant à reconstruire le pays, notamment le président du parlement. Celui-ci a toujours valorisé la coexistence des musulmans et des chrétiens au Liban, la considérant comme une richesse à sauvegarder.

— Comment, d’après vous, l’élection du général Aoun influera-t-elle sur les relations avec la Syrie ?

— Les relations diplomatiques se maintiennent, de même que le traité syro-libanais de « fraternité et coopération » de 1991. La relation syro-libanaise est fondée sur le respect mutuel de la souveraineté des deux pays. Quant au problème des réfugiés, le Liban parviendra, à travers un travail commun avec la Syrie, à expliquer ses inquiétudes sécuritaires, démographiques et économiques, et à mettre en oeuvre la résolution onusienne 2254 permettant aux réfugiés et aux personnes déplacées de retourner en toute sécurité dans leur région d’origine.

— Pourquoi le choix d’un président avait-il posé autant de problèmes ?

— La non-application de l’accord de Taëf de 1989, notamment en ce qui concerne la loi électorale, a fait que l’exercice du pouvoir au Liban s’est transformé en répartitions de quotas entre les politiciens plutôt qu’entre leurs communautés respectives. C’est cette défectuosité que le général Aoun a essayé de corriger en concertation avec les autres factions. Notre système est basé sur une démocratie consensuelle où chaque communauté est représentée selon son poids. Ce « communautarisme politique » n’est pas un problème en soi, comme l’ont noté d’ailleurs plusieurs experts. Le problème c’est la « politique communautariste ».

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