Comme prévu, il a été très difficile aux pays réunis à Lausanne (les Etats-Unis, la Russie, l’Iran, l’Iraq, le Qatar, la Jordanie, l’Arabie saoudite, l’Egypte et la Turquie) samedi dernier d’avancer d’une façon concrète sur le dossier syrien. Effectivement, les circonstances qui ont mené au blocage au sein du Conseil de sécurité n’ont pas changé, ce qui fait qu’aucun résultat différent n’a été atteint à Lausanne. Cette réunion, où les Européens n’étaient pas conviés, n’a pas permis d’élaborer un plan pour rétablir la trêve qui a volé en éclats en septembre, au moment où Washington et Moscou échangent de dures accusations et où les combats en Syrie se poursuivent sans relâche. Et, au sortir de la réunion, les déclarations des uns et des autres ont prouvé une fois de plus les désaccords : le chef de la diplomatie américain, John Kerry, s’est contenté de déclarer que les discussions avaient produit «
de nouvelles idées », qu’il s’agit de préciser dans les prochains jours pour tenter d’aboutir à un nouveau cessez-le-feu plus solide que les précédents. Son homologue russe, Sergueï Lavrov, qu’il a été décidé de «
prolonger les contacts ». Kerry et Lavrov ne s’étaient pas revus depuis le début de l’offensive russo-syrienne sur les quartiers tenus par les rebelles dans l’est d’Alep, la grande ville divisée du nord de la Syrie. La rencontre de Lausanne n’aura donc permis que d’afficher une fois de plus les divergences entre les grandes puissances. «
A quelques semaines des élections américaines, l’Administration américaine est trop faible pour pouvoir mener une action crédible aux yeux de ses partenaires. A mon avis, les efforts diplomatiques actuels ont seulement pour objectif de donner un momentum au processus politique, sans avoir la prétention de faire avancer concrètement les choses », estime ainsi un diplomate qui a requis l’anonymat.
Possibles sanctions contre Damas et Moscou
Preuve que les acteurs internationaux sont désormais divisés en deux blocs, la réunion de Lausanne a été suivie par une autre à Londres. Or, à celle de Londres, ont été conviés uniquement les pays qui soutiennent l’opposition. A l’issue de cette rencontre, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont averti, dimanche, que les Occidentaux envisageaient de nouvelles sanctions économiques ciblées contre la Syrie et la Russie en réaction au siège d’Alep, a déclaré le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, à Londres. Son homologue britannique, Boris Johnson, a, pour sa part, déclaré que de « nombreuses mesures » avaient été proposées, « dont des mesures supplémentaires contre le régime et ses soutiens », lors d’un point de presse commun. « Ces mesures toucheront les auteurs de ces crimes », a-t-il mis en garde.
Tout se jouera-t-il donc sur le terrain ? Pendant que la diplomatie piétine, aucun signe d’apaisement n’a lieu sur le terrain. Les quartiers Est d’Alep ont de nouveau été frappés tout au long de la semaine par des raids aériens intensifs, selon l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH). Depuis l’échec du dernier cessez-le-feu fin septembre, l’offensive russo-syrienne contre la partie d’Alep tenue par les rebelles a tué plus de 370 personnes, essentiellement des civils, selon l’OSDH. Le régime de Damas et son allié russe déclarent bombarder ces quartiers pour éliminer les « terroristes », principalement les djihadistes du groupe Fatah Al-Cham (ex-Front Al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaëda). Moscou a proposé il y a deux jours une sortie sécurisée de la ville pour les rebelles, et l’Onu a présenté un plan visant à faire sortir d’Alep les combattants de Fatah Al-Cham. Mais l’opposition et ses soutiens craignent que, sous couvert d’évacuer les combattants, le régime et son allié russe ne veuillent forcer une reddition complète. « L’opposition armée a été trop affaiblie par les frappes russes ces dernières semaines. Dans un tel contexte, je ne vois pas sur quelle base les pays qui soutiennent cette opposition peuvent imposer des conditions aux Russes et au régime syrien », estime notre diplomate. En effet, conclut-il, les pays qui s’opposent à la politique russe en Syrie ne disposent pas de moyens de pression efficaces qui puissent changer l’actuel équilibre des forces.
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