La mauvaise situation économique que le président américain, Barack Obama, avait héritée de son prédécesseur, Georges W. Bush, l’a poussé à adopter une nouvelle politique étrangère, qui représentait une rupture avec celle adoptée antérieurement. La nouvelle stratégie, qui était jugée naïve par certains analystes, et pragmatique par d’autres, consistait à adopter une politique étrangère moins coûteuse en vies humaines et en dollars, et basée en grande partie sur le partenariat avec les autres pays et le remplacement des déploiements massifs par une présence légère au sol, privilégiant les opérations spéciales dans les pays où les Américains sont engagés militairement.
En 2011, les révoltes arabes ont placé Obama face à un dilemme. D’une part, les populations arabes étaient dans la rue pour revendiquer la liberté qu’Obama avait mise en avant deux ans plus tôt lors de son fameux discours à l’Université du Caire en 2009. D’autre part, les régimes répressifs contre lesquels les manifestations étaient dirigées étaient des partenaires stratégiques des Etats-Unis depuis plusieurs décennies et d’importants alliés contre Al-Qaëda.
La retenue stratégique
En novembre 2011, l’Administration Obama annonçait un virage dans la politique étrangère américaine. L’objectif était de diriger les ressources du pays, alors focalisées principalement sur l’Europe et le Moyen-Orient, vers la région Asie-Pacifique. C’est dans le cadre de cette stratégie qu’on peut situer le rapprochement avec l’Inde, le Vietnam, les Philippines, le Japon et l’Australie. Pour Amr Abdel-Ati, expert des affaires américaines au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, il existe plusieurs facteurs qui ont mené à ce désengagement américain au Moyen-Orient. Les Etats-Unis n’ont plus besoin du pétrole du Moyen-Orient. En effet, les Etats-Unis sont devenus un exportateur de l’or noir grâce à l’exploitation du pétrole de schiste. De même, Washington voulait faire face à la montée en puissance de la Chine. Pourtant, selon lui, « les Etats-Unis ont commis une erreur fatale lorsqu’ils ont décidé de tourner le dos à cette région d’une grande importance géostratégique ». Mohamad Kamal, professeur de relations internationales à l’Université du Caire, pense, lui, que « ce sont les politiques américaines dans la région qui ont mené à l’expansion de la menace terroriste et aux complications politiques dont témoignent plusieurs pays de la région ».
Lorsqu’il était sénateur, Obama avait refusé depuis le début la guerre menée par Bush en Iraq. Devenu président, il a retiré le dernier soldat américain d’Iraq en décembre 2011. Abdel-Ati croit que le départ des forces américaines d’Iraq, sans préparation adéquate de la part des forces armées iraqiennes, de manière à ce que celles-ci soient prêtes à faire face aux menaces sécuritaires, a créé un vide qui a été rempli par l’organisation Etat Islamique (EI), qui étend aujourd’hui son empire aussi en Syrie et en Libye.
Selon l’expert du CEPS, Obama a commis deux fautes stratégiques vis-à-vis de la crise syrienne, la première était en 2012, lorsqu’il a refusé la fourniture d’armes à l’opposition syrienne modérée. Et la deuxième faute était en septembre 2013, lorsque les Etats-Unis ont refusé d’intervenir en Syrie, même après que la ligne rouge des armes chimiques eut été franchie en août 2013. « Au vu de leur responsabilité internationale, les Etats-Unis devaient intervenir afin de mettre fin à la tragédie syrienne », dit Abdel-Ati.
Quant à la Libye, les Etats-Unis ont aidé la France, le Royaume-Uni et d’autres pays occidentaux à mener leur offensive aérienne contre le régime de Kadhafi en se plaçant en deuxième ligne, tout en déployant des moyens importants sans lesquels les Européens n’auraient pas pu conduire les opérations. Cette intervention a conduit à la chute du régime de Muammar Kadhafi en 2011, et depuis cette date, la Libye est plongée dans le chaos. Lors d’un entretien à la chaîne Fox News, en avril 2016, Obama jugeait que la pire erreur de sa présidence avait été le manque de suivi après l’intervention militaire en Libye en 2011. Kamal pense qu’« Obama, au contraire de ce qu’il a promis, n’a réalisé aucune avancée dans le processus de paix ».
Quels succès ?
Obama peut cependant être crédité pour la normalisation des relations diplomatiques rompues depuis 1961 avec Cuba en décembre 2014, ouvrant ainsi la voie à un dialogue plus serein avec l’Amérique latine.
De même, l’Administration Obama est appréciée pour avoir signé, le 14 juillet 2015, l’accord sur le programme nucléaire avec Téhéran, réduisant les capacités nucléaires de la République islamique en échange d’une levée progressive des sanctions. En revanche, Kamal pense que « même avec la signature de l’accord nucléaire, l’avenir des relations entre les Etats-Unis et l’Iran reste encore incertain ». Rien n’indique que les futurs dirigeants iraniens ne vont pas relancer en secret un programme militaire. En plus, les Etats-Unis continuent à poser des obstacles à l’application de l’accord, comme à titre d’exemple les sanctions liées au programme de missiles balistiques iraniens.
Le ralliement d’Obama à l’accord de Paris sur le climat, COP21, peut aussi être considéré comme l’un des succès majeurs de son Administration. Pour Abdel-Ati, ces succès reflètent la réalité qu’Obama a préféré miser sur le Smart Power, qui fait référence à la combinaison des stratégies du Soft Power (la diplomatie, la négociation et le multilatéralisme) et du Hard Power (l’utilisation de la force militaire).
Reste que la localisation du leader d’Al-Qaëda, Ossama Bin Laden, tué au Pakistan en mai 2011, suite à une opération militaire américaine, est l’un des plus grands succès d’Obama. Après la mort de son leader, Al-Qaëda semble avoir perdu de son rayonnement international.
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