
Sami Mahmoud, président de l’Organisme de la promotion du tourisme en Egypte.
Al-Ahram Hebdo : L’Egypte peut-elle attirer une partie des touristes qui ont renoncé à se rendre en Turquie à la suite du coup d’Etat manqué ?
Sami Mahmoud : Pour le moment, je pense que l’Egypte ne pourra pas attirer ces touristes, initialement à destination de la Turquie, pour la simple raison qu’une grande partie de ceux-là, soit plus de 3 millions, sont des Russes et que la Russie suspend toujours ses vols à destination de l’Egypte. En outre, la haute saison du tourisme en Egypte est en hiver, en raison du climat modéré, tandis que la haute saison en Turquie est l’été. Cela dit, les touristes qui renonceront à la Turquie chercheront un pays dont le climat est similaire. En revanche, je pense qu’en hiver, nous pourrons attirer une partie de ces touristes. On travaille dès maintenant sur plusieurs marchés afin d’inciter les touristes à opter pour l’Egypte pour y passer leurs vacances hivernales.
— Quels sont ces marchés que vous ciblez ?
— Le premier est le marché arabe. C’est le seul qui a enregistré une hausse de 10 % dans les arrivées touristiques vers l’Egypte au cours du premier semestre de l’année courante en comparaison avec la même période de l’année dernière. Puis l’Allemagne, qui maintient de bonnes relations touristiques avec nous. A ceci s’ajoutent l’Ukraine, la Pologne, la Hongrie, le Brésil et le Kazakhstan. Ce sont en fait des pays émergents en matière du tourisme et vers lesquels on s’est dirigé avec force pour la promotion du tourisme égyptien depuis la dernière crise, qui a eu lieu à la suite du crash de l’avion russe dans le Sinaï à la fin du mois d’octobre dernier. Ce sont de nouveaux pays qui ont montré un certain intérêt pour l’Egypte.
— D’après vous, quels sont les pays gagnants de la crise en Turquie ?
— L’Espagne est le grand gagnant de la crise. Elle a attiré des milliers de touristes au cours de ces quelques dernières semaines. Les îles Canaries, Dubaï, la Tunisie, le Maroc et la Bulgarie ont aussi obtenu une part du gâteau du mouvement du tourisme qui a renoncé à se rendre en Turquie à cause de l’instabilité politique.
— Comment se porte le tourisme actuellement en Egypte, notamment avec l’absence des Russes ?
— Le tourisme égyptien traverse une crise sans précédent à cause de la chute du nombre de réservations suite au crash de l’avion russe. En fait, cet accident a eu de fortes répercussions sur le secteur du tourisme, surtout après la décision de la Grande-Bretagne d’arrêter ses vols à destination de Charm Al-Cheikh et celle de la Russie de suspendre ses vols vers l’Egypte. Le mouvement du tourisme vers l’Egypte a baissé de 50 % au cours du premier semestre de cette année en comparaison avec la même période de l’année dernière. L’Egypte a accueilli au cours de cette période environ 3 millions de touristes contre presque 6 millions de touristes au cours de la même période de 2015.
— Quelles sont les pertes dues à cette chute dans le nombre de touristes ?
— Les revenus du secteur du tourisme ont baissé de 60 % au cours des six premiers mois de 2016 en comparaison avec la même période de 2015. Plus grave aussi, le secteur du tourisme en Egypte perd environ 2 milliards de L.E. chaque mois depuis la crise, surtout que les marchés russe et britannique constituent 45 % du mouvement du tourisme égyptien. Ce n’est pas tout. Ces pertes renferment aussi des dizaines d’hôtels et d’établissements touristiques qui ont dû fermer leurs portes à cause des problèmes de financement engendrant le licenciement de cadres bien formés.
— Quelle est la feuille de route adoptée par l’organisme pour surmonter cette crise ?
— Tout de suite après le crash de l’avion russe, on a commencé à travailler sur deux axes principaux. Le premier est le renforcement des mesures de sécurité dans les aéroports égyptiens. Et, pour plus de transparence et dans le but de rassurer tout le monde, l’Egypte a eu recours à une entreprise internationale spécialisée dans la sécurité pour inspecter les nouvelles mesures appliquées sur le terrain. Ce dossier est achevé, et nos aéroports sont au même niveau des grands aéroports internationaux du point de vue sécurité et sûreté. On a aussi reçu des audits pour les aéroports de la part de plusieurs pays, notamment la Russie, l’Angleterre, l’Italie et l’Allemagne qui ont pu mesurer le renforcement de ces mesures. Le second axe est qu’on travaille avec une compagnie de publicité internationale et une autre de relations publiques afin de redorer l’image de l’Egypte en tant que destination touristique sûre et regagner la confiance de notre clientèle. En outre, nous avons un plan pour promouvoir de nouvelles formes de tourisme comme le tourisme religieux, celui des conférences et le tourisme sportif. La conversion à l’énergie verte et le respect des normes écologiques dans les établissements hôteliers sont aussi un objectif pour le ministère du Tourisme à l’heure actuelle, surtout que cela assure la compétitivité du tourisme égyptien à long terme et assure un développement durable pour le secteur.
Lien court: