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Santé : Le secteur privé appelé à la rescousse

May Atta, Jeudi, 21 juillet 2016

Le ministère de la Santé étudie la possibilité d'associer le secteur privé à la gestion de 75 centres médicaux publics. Une décision qui soulève bien des critiques.

Santé : Le secteur privé appelé à la rescousse
L'Etat veut remédier à la dégradation des services de santé en Egypte. (Photo : Al-Ahram)

La nouvelle a été annoncée fin juin lors d’une rencontre entre le ministre de la Santé, Ahmad Emadeddine Radi, et la ministre de l’Investissement, Dalia Khorchid. Il s’agit de la possibilité d’associer le secteur privé à la gestion de 75 centres médicaux complémentaires dans 17 gouvernorats. « Nous étudions encore la formule qui sera suivie, mais l’idée de base est de mettre ces dispensaires à la disposition du secteur privé qui se chargera de les moderniser, et par la suite, de les gérer en échange d’une certaine somme d’argent payée par l’Etat », explique à Al-Ahram Hebdo Khaled Mégahed, porte-parole du ministère de la Santé. Selon lui, il ne s’agit pas de vendre ces centres médicaux, mais de « profiter des dons faits par certains hommes d’affaires pour les moderniser, et ensuite leur confier la gestion de ces établissements en vertu d’un accord avec le ministère de la Santé ».

L’idée de la création de ces dispensaires ou hôpitaux « complémentaires » remonte aux années 1990. Face à la pression qui pèse sur les grands hôpitaux publics, l’ancien ministre de la Santé, Ismaïl Sallam, décide à l’époque de construire une série d’hôpitaux annexés aux centres médicaux dans les campagnes et les régions éloignées, afin de réduire la pression sur les grands centres hospitaliers dans les villes. Grâce à un don japonais, l’Etat construit alors 544 hôpitaux complémentaires dans 17 gouvernorats dont Ménoufiya, Minya, Damiette, Qalioubiya, Ismaïliya et Qéna. Ces centres médicaux étaient censés présenter un service de qualité aux provinciaux. Mais leur gestion s’est avérée être trop coûteuse, et l’ancien ministre de la Santé, Hatem Al-Gabali, décide en 2005 de les transformer en centres de planning familial. Résultat : aujourd’hui, beaucoup d’entre eux sont inexploités en raison du manque d’équipement et de personnel.

Vision floue

Or, la nouvelle initiative, encore à l’étude, de confier leur gestion au secteur privé ne fait pas l’unanimité. Et certains émettent déjà des réserves. C’est le cas d’Ihab Al-Taher, secrétaire général de l’ordre des Médecins. « Cette décision donne l’impression que le ministère de la Santé veut se débarrasser des dépenses de la santé publique. Associer le secteur privé à la gestion de ces établissements signifie que le coût des soins va augmenter. Or, ces dispensaires étaient à la base destinés à présenter un service peu coûteux dans les régions pauvres. Le gouvernement doit augmenter le budget de la santé s’il veut moderniser les hôpitaux publics », affirme Al-Taher. La Constitution oblige le gouvernement, à partir de l’exercice 2016-2017, d’attribuer 3 % du PIB au secteur de la santé. Mais le gouvernement a du mal à respecter cette clause. Khaled Samir, membre du conseil de l’ordre des Médecins, pense lui aussi que l’Etat, au lieu de développer les hôpitaux publics, « cherche à se débarrasser de leur fardeau ». « Le ministre n’a pas de vision précise. Le secteur de la santé paye aujourd’hui le prix des politiques contradictoires de l’Etat. L’Etat a décidé de construire ces dispensaires puis a été incapable de les gérer en raison du manque de moyens ».

Le porte-parole du ministère de la Santé, Khaled Mégahed, répond aux critiques. « L’entrée du secteur privé n’est pas une mauvaise chose. Dans tous les pays du monde, le secteur privé est présent dans le secteur de la santé. La société civile, et surtout les hommes d’affaires, doivent aider le gouvernement dans les domaines de la santé et de l’éducation. C’est le cas dans les pays développés », affirme-t-il. Les prix des soins n’augmenteront pas selon lui. « C’est le ministère de la Santé qui déterminera les prix des soins en vertu d’un accord préalable avec les investisseurs. De plus, le secteur privé participera au financement des centres médicaux complémentaires à travers les dons », conclut Mégahed.

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