124 clauses de la Constitution exigent la promulgation ou l'amendement de lois.
(Photo : Khaled Machaal)
« L’Etat s’engage à promulguer les lois qui mettent en application les dispositions de la Constitution », stipule l’article 224 de la Constitution. 124 articles de la Constitution nécessitent des lois pour la voir respectée, assure Ramadan Battikh, professeur de droit constitutionnel à l’Université de Aïn-Chams, au Caire. Quelques-uns nécessitent que des lois soient promulguées « lors de la première session du parlement », c’est-à-dire lors des neuf premiers mois de travail du parlement. Pour activer la Constitution, il faut aussi que d’autres lois soient modifiées ou annulées, car elles sont inconstitutionnelles.
La loi sur la justice transitionnelle, la loi de la construction et la restauration des églises, ainsi que la loi établissant une Autorité nationale pour les élections sont censées être promulguées durant cette période de 9 mois. Battikh explique que la révolution comptait parmi ses revendications la justice, c’est pourquoi la loi sur la justice transitionnelle est une « demande pressante ». L’article 241 de la Constitution stipule ainsi « la transparence, la réconciliation ainsi que la compensation des victimes » dans les périodes politiques transitoires.
Concernant la loi sur la construction et la restauration des églises, Battikh dit que le long débat social nécessite que la loi soit rapidement finalisée en réponse aux demandes des chrétiens. « C’est une obligation constitutionnelle pour le parlement et pour le président de promulguer ces lois, sinon ils seront questionnés », estime Fouad Abdel-Nabi, professeur de droit constitutionnel à l’Université de Ménoufiya (nord).
Un certain nombre d’autres lois doit aussi être promulgué sur un plus grand intervalle de temps. Pour l’article 242 de la Constitution concernant les municipalités, « Cette loi doit être modifiée dans un maximum de cinq ans », dit Abdel-Nabi. Il explique que « la Constitution détermine un système pour l’administration locale, notamment la décentralisation administrative, financière et économique, la représentation des jeunes et des femmes, ainsi que la mention élection des gouverneurs, qui sont des nouveautés dans la Constitution de 2014 ».
De même, l’article 236 de la loi fondamentale stipule une nouvelle loi pour créer une stratégie économique pour les zones frontalières ou les régions défavorisées, notamment en Haute-Egypte, dans le Sinaï, à Matrouh et en Nubie. Une stratégie censée entrer en vigueur dans une limite de dix ans.
En matière de services publics et d’économie, les articles 18, 19, 21, 23 et 238 de la Constitution garantissent dans le budget de l’Etat un minimum de 3 % pour la santé, 4 % pour l’éducation, 2 % pour l’enseignement supérieur et 1 % pour la recherche scientifique. « Le gouvernement est ainsi entre deux feux : celui du déficit du budget et celui de la Constitution », dit Battikh.
Des modifications de lois sont aussi nécessaires pour activer les dispositions constitutionnelles, tandis que d’autres nécessitent de nouvelles lois pour être activées, incluant des lois pour créer l’Autorité nationale du journalisme (article 212 de la Constitution), l’Autorité nationale des médias (art. 213) et l’Autorité pour la lutte contre la corruption (art. 218). Concernant les libertés, il se trouve dans la Constitution des dispositions sur la liberté d’expression artistique et littéraire (art. 67) et une pour la libre circulation de l’information (art. 68).
Parmi les lois que le parlement est obligé de promulguer figurent les lois du travail (art. 12 et 13 de la Constitution), du service public (art. 14) et du terrorisme (art. 237). Selon Abdel-Nabi, il faut déjà modifier le projet de loi du travail. « Le gouvernement dit avoir modifié sept articles de la loi, mais ce n’est pas suffisant », dit-il. « La nouvelle loi du travail donnera plus de garanties aux ouvriers », dit Battikh. L’article 15 de la Constitution stipule le droit à la grève pacifique, et son article 42 implique la participation des ouvriers dans la direction des projets.
Quant à la loi sur le service public, le parlement l’a déjà rejetée. Et « tout projet de loi refusé par la Chambre des députés ne peut être reconsidéré durant la même législation », selon l’article 122 de la Constitution que mentionne Battikh. Abdel-Nabi soulève de plus l’article 156, selon lequel une loi promulguée en l’absence de parlement et qui est ensuite présentée au parlement qui la rejette, perd sa force de loi.
Pour la loi sur le terrorisme, Battikh pense que trois lois existent déjà qui couvrent le contenu de l’article 237 de la Constitution concernant le terrorisme : la loi de la lutte contre le terrorisme, la loi des entités terroristes et la loi pénale. « Il faut juste qu’elles soient appliquées », dit Battikh. De plus, Abdel-Nabi estime que la loi sur le terrorisme promulguée en 2015 est inconstitutionnelle car la Constitution stipule qu’il faut que la lutte contre le terrorisme et le fait d’identifier les sources de financement du terrorisme soient exécutés « selon un calendrier précis ». « La loi promulguée en août 2015 n’est pas pour une durée limitée. Elle est permanente, ce qui contredit la Constitution », soutient-il. Pour lui, il fallait modifier la loi pénale pour inclure les stipulations de l’article 237 de la Constitution au lieu de créer une nouvelle loi.
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