Arrivées sur le marché égyptien en décembre 2014, les sociétés
Uber et
Careem fonctionnent grâce à une application sur
Smart phone qui met en relation des passagers et des automobilistes qui ne sont pas des chauffeurs professionnels. Elles offrent un service de transport à des milliers d’usagers en Egypte. Mais
Uber (société américaine) et
Careem (société émiratie) font la misère des chauffeurs de taxi, car elles leur retirent une partie de leur clientèle. Ces derniers ont manifesté au Caire cette semaine pour protester contre l’ascension des deux compagnies dont les tarifs ne sont peut-être pas moins élevés que les taxis traditionnels, mais que beaucoup de clients préfèrent pour le meilleur service apporté.
Pour Chérine Samir, mère de famille, ces compagnies ont réglé un problème de taille. « J’ai deux enfants qui suivent des entraînements sportifs dans un club éloigné de notre domicile. En plus, ils ont commencé à sortir beaucoup avec leurs amis et je ne suis pas toujours disponible pour les conduire et je ne fais pas confiance aux taxis traditionnels, car certains chauffeurs prennent de la drogue pour conduire plus longtemps », raconte Chérine. Elle utilise donc le service Uber. Il suffit alors d’indiquer sa position sur l’application et en l’espace de quelques minutes, une voiture vient à elle. Quand elle demande une voiture, elle reçoit le nom et le téléphone du chauffeur, de plus, elle peut suivre le trajet de la voiture sur son écran. « Ma carte bancaire est directement débitée, alors on n’est pas obligé de donner beaucoup d’argent aux enfants et on évite le manque de monnaie », ajoute-t-elle. Ce n’est pas seulement le manque de confiance qui a éloigné les clients des taxis. « Les chauffeurs refusent certaines destinations et quelques-uns ne respectent pas les tarifs normaux. Parfois dans les banlieues, ils ne sont pas nombreux et on doit attendre dans la rue un quart d’heure, voire plus », assure Abir Salem, professeur dans une école à Al-Tagammoe (à l’est du Caire), qui habite à Doqqi (centre) et pour qui le trajet quotidien est à peu près de 25 km.
D’autres ignorent
« La situation est devenue insupportable », commente Karim, chauffeur de taxi. L’Etat a étendu des réseaux de transports publics qui lient le centre-ville aux villes nouvelles. « Déjà les transports publics et les microbus ont pris une bonne partie du marché. Ce qui nous reste, nous devons le partager avec des véhicules ... C’est de la pure injustice ! », souligne Karim.
Mohamad Habachi, chauffeur de taxi depuis 1996, partage l’opinion de Karim malgré le fait qu’il n’a jamais entendu parler des applications en question. « Je sens que le nombre de clients a baissé dans les rues, et je vois des véhicules privés qui font signe aux clients pour les transporter », souligne Habachi. Pour lui, le véhicule privé n’a pas les mêmes obligations financières que le taxi, puisque la licence de taxi coûte entre 40 et 50 L.E. D’autres chauffeurs ne ressentent pas le problème. C’est le cas de Amr, chauffeur de taxi depuis 10 ans, ou de Am Abdou, qui est chauffeur depuis 25 ans. « L’intensité du travail est la même dans la rue. Je ne connais même pas ces applications et je n’ai pas participé aux manifestations », dit Amr. Et puis, selon Am Abdou, le client du taxi blanc est différent du client d’Uber et de Careem. « Nous travaillons avec le client de la rue, mais ces applications conviennent avec d’autres clients, des gens aisés qui ont des voitures mais qui n’ont pas envie de conduire ou veulent éviter le manque de places de parking. Notre gagne-pain n’est en rien menacé par ces applications », pense Am Abdou.
Améliorer son niveau de vie
Tandis que les chauffeurs de taxi refusent ces applications, des milliers d’autres usagers les voient comme un moyen idéal d’augmenter leurs revenus. Mahmoud, chauffeur dans une multinationale qui travaille de 8h à 18h, veut améliorer son niveau de vie. « Un de mes amis travaille avec Uber et j’espère faire comme lui. J’achèterai une voiture à crédit si on m’accepte », dit Mahmoud. Il a dû faire des analyses de sang et un test anti-drogue pour se présenter à la compagnie qui examine les nouveaux chauffeurs. « On doit assister à deux cours pour savoir comment utiliser l’application et traiter les clients. On m’a dit que si j’ouvre l’application, même si personne ne demande mes services, on me paye 25 L.E. par heure », ajoute Mahmoud.
Pour Hadir Chalabi, directrice générale de Careem en Egypte, ces applications sont profitables aux Egyptiens et fournissent un service de qualité sur un marché qui peut assimiler des milliers de voitures. « Si l’Etat décide aujourd’hui de donner 1 000 nouveaux licences de taxis, le marché les absorbera très vite et sans problème », indique-t-elle.
Careem est en Egypte en tant qu’entreprise en ligne enregistrée et qui paye des taxes. « On ne travaille pas avec les propriétaires de voiture directement, mais à travers des agences de tourisme et de limousine qui ont perdu leur gagne-pain avec la chute du nombre de touristes », indique Hadir Chalabi. 20 % du tarif de chaque trajet effectué par une voiture de Careem sont partagés entre l’agence de tourisme (5 %) et l’entreprise Careem (15 %).
« Les Egyptiens qui peuvent utiliser facilement ces applications ne sont pas majoritaires. Le client d’Uber et de Careem n’est pas le client de taxi traditionnel, c’est quelqu’un d’autre », explique Ossama Zein, propriétaire d’une agence de tourisme qui fait rouler les voitures de son agence sous Careem. Selon lui, ces applications ont eu beaucoup de succès en Egypte, car le service des taxis souffre de plusieurs problèmes liés aux chauffeurs et aux véhicules.
Si jusqu’à présent les applications ne représentent pas encore de grosse menace pour les taxis, la situation peut changer très vite avec l’augmentation du nombre de véhicules sous Uber et Careem.
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