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Le Caire en première ligne de la lutte antiterroriste

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mardi, 22 décembre 2015

L'Egypte s'est engagée au sein d'une coalition antiterroriste de 34 pays islamiques, lancée à l'initiative de l'Arabie saoudite. Outre la lutte contre l'Etat islamique, Le Caire souhaite maintenir son partenariat stratégique avec Riyad.

Sissi
Photo: AP

La nouvelle a été annoncée le 15 décembre à Riyad. Une coalition de 34 Etats, dont l’Egypte, a été formée par l’Arabie saoudite pour « combattre le terrorisme ». La coalition, placée sous la conduite de l’Arabie saoudite, sera dotée d’un centre de commandement basé à Riyad pour « soutenir les opérations militaires dans la lutte contre le terrorisme ». L’alliance comprend 18 pays arabes, dont l’Arabie saoudite, l’Egypte, la Jordanie, les Emirats arabes unis, Bahreïn, la Tunisie, le Qatar, le Koweït, la Libye et le Yémen, ainsi que 11 pays africains et 5 pays asiatiques dont la Turquie et le Pakistan. Tous ces Etats sont membres de l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI), basée à Djeddah depuis sa création en 1969. Riyad, engagée dans une âpre guerre contre les rebelles houthis au Yémen, soutenus par l’Iran, veut contrer la menace de l’Etat Islamique (EI) et l’influence grandissante de l’Iran à ses frontières nord. Or, Riyad, qui se sent lâchée par son allié américain, qui a conclu en juillet dernier un accord nucléaire avec l’Iran, veut prendre en main sa sécurité régionale. D’où cette coalition formée avec des pays sunnites de la région. L’objectif est de former un front sunnite pour contrer Téhéran et l’Etat islamique. Fait significatif : la coalition exclut l’Iran ainsi que ses deux alliés régionaux : l’Iraq et la Syrie.

Mais quel serait le rôle de l’Egypte au sein de cette coalition, et surtout quel est l’intérêt du Caire à en faire partie ? Deux facteurs motivent la présence de l’Egypte au sein de cette coalition, à savoir la lutte contre le terrorisme et les intérêts avec l’Arabie saoudite. « La présence de l’Egypte au sein de cette coalition est normale. La lutte contre le terrorisme est une priorité pour le régime égyptien qui est en guerre ouverte depuis 2013 contre des groupes terroristes dans la péninsule du Sinaï, notamment l’Etat islamique. Tout effort pour lutter contre ces groupes extrémistes est le bienvenu pour Le Caire », explique Khaled Okacha, expert stratégique. Il rappelle que l’Egypte fait déjà partie de deux coalitions antiterroristes. La première a été formée par les Etats-Unis en septembre 2014 pour lutter contre l’EI, et la seconde par l’Arabie saoudite pour défendre le président légitime du Yémen, Abd-Rabbo Mansour, face à l’avancée des rebelles houthis. Au cours des deux dernières années, l’armée et la police égyptiennes ont été la cible d’attaques régulières de la part des terroristes. Le Caire craint surtout une expansion de l’Etat islamique en Libye qui pourrait mettre en péril ses frontières ouest. L’Egypte avait, à plusieurs reprises par le passé, appelé à une action internationale en Libye pour faire face à l’EI.

L’autre point important selon Sameh Rached, expert au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, est le maintien des liens stratégiques avec l’Arabie saoudite. « Le Caire est soucieux de maintenir ses relations avec Riyad à un bon niveau. Il y a eu récemment quelques différences de points de vue entre les deux pays sur fond de rapprochement entre le Royaume saoudien et les Frères musulmans, mais l’Egypte a toujours cherché à ménager son voisin saoudien », affirme Rached. En fait, le partenariat stratégique avec l’Arabie saoudite est d’une grande importance pour l’Egypte. Riyad est l’un des principaux pourvoyeurs d’investissements pour l’économie égyptienne. L’Arabie saoudite, qui a soutenu la révolution du 30 juin, a promis récemment des investissements de l’ordre de 8 milliards de dollars en Egypte, en plus d’une aide pétrolière pendant cinq ans.

Il reste à savoir quel sera le rôle de l’Egypte au sein de cette coalition. « La présence de l’Egypte au sein de la coalition est avant tout symbolique et se limitera sans doute, si cela est nécessaire, à l’envoi de quelques unités spéciales », affirme Okacha. Et d’ajouter qu’il n’est pas question que l’Egypte envoie des troupes régulières à l’étranger. « La position égyptienne a toujours été claire en ce qui a trait à l’envoi de troupes dans la guerre antiterroriste. Aucune déclaration officielle n’évoque la possibilité d’une participation militaire quelconque », souligne Okacha.

Selon lui, la présence de deux pays rivaux, à savoir le Qatar et la Turquie, au sein de cette coalition ne constitue aucune entrave à la participation égyptienne à cette coalition, au contraire. « C’est la présence au sein de cette coalition de ces deux pays qui soulève beaucoup d’interrogations. Ils sont tous les deux aujourd’hui accusés directement de la part de la communauté internationale de soutenir les groupes terroristes. Leur participation est une tentative de déni de ces accusations », conclut Okacha.

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