Dimanche dernier, un destroyer russe a dû ouvrir le feu pour éviter une collision avec un bateau de pêche turc en mer Egée, a affirmé le ministère russe de la Défense. Suite à cet incident, le vice-ministre russe de la Défense, Anatoli Antonov, a convoqué l’attaché militaire turc à Moscou, Ahmet Hakam Gunes. Il lui a adressé « une sévère mise en garde contre d’éventuelles conséquences néfastes des actes irréfléchis d’Ankara vis-à-vis du contingent militaire russe », envoyé en Syrie dans le cadre des frappes aériennes visant le groupe djihadiste Etat Islamique (EI), a souligné le ministère. La Russie a notamment fait part de « sa préoccupation profonde face aux actions provocatrices de la partie turque à l’égard du destroyer russe Smetlivy », a-t-il précisé. Un nouvel incident qui, selon Dr Norhane Al-Cheikh, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, prouve que « la tension entre les deux pays est loin de se calmer ».
Déjà, avant l’incident de dimanche, les déclarations de part et d’autre n’allaient pas dans le sens de l’apaisement. Alors qu’elle faisait plutôt profil bas depuis le début de la crise fin novembre, la Turquie est passée à l’offensive. Dimanche, l’armée turque a interdit à son personnel de se rendre en Russie pour les vacances, alors que le premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, a accusé la Russie de « nettoyage ethnique » en Syrie, et que son ministre des Affaires étrangères, Mevlüt Cavusoglu, a appelé la Russie au « calme », mais prévenu que la patience d’Ankara avait « des limites ». Selon Dr Al-Cheikh, cette escalade turque, après trois semaines d’appels à l’apaisement, prouve le déséquilibre d’Ankara, qui hésite quant à la politique à adopter vis-à-vis de Moscou. « Ankara est passéE à l’escalade quand elle s’est trouvée face à une impasse. Le régime turc ne s’attendait pas à une réaction si ferme et impassible de la part de Moscou. Au début, Erdogan a essayé de calmer le jeu, mais il a trouvé que cette manoeuvre ne remportait aucun fruit. C’est pourquoi il a fait volte-face », affirme Dr Norhane Al-Cheikh.
Pendant ce temps, Moscou ne compte pas tourner la page pour ce qui est de l’affaire du Sukhoï. En quête de partenaire dans son bras de fer avec Ankara, le président russe, Vladimir Poutine, a demandé au premier ministre britannique, David Cameron, son aide en experts pour l’analyse de la boîte noire du bombardier russe abattu par Ankara. « Poutine veut avoir un partenaire de l’Otan en tant que témoin pour que personne ne sème le doute dans la crédibilité des enquêtes russes. Il a choisi la Grande Bretagne car elle est très proche des Etats-Unis et considérée comme le principal partenaire de Washington au sein de l’Otan », analyse Dr Al-Cheikh.
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