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Le dollar fait marche arrière

Névine Kamel, Jeudi, 19 novembre 2015

La Banque Centrale d’Egypte est intervenue, la semaine dernière, pour maintenir la stabilité du cours du dollar. D'autres mesures sont attendues dans le même sens.

Le dollar
Les bureaux de change maintiennent le prix de vente de dollar à 8,5 L.E. (Photos : Reuters)

La Banque Centrale d’Egypte (BCE) a pris, la semaine dernière, une série de mesures visant à fournir le marché en dollar, maintenir le prix du marché noir et satisfaire les besoins des hommes d’affaires. Quelle sera sa prochaine mesure ? Un responsable à l’Union des industries égyptiennes avance à l’Hebdo que la BCE négocie actuellement avec les exportateurs pour leur verser la valeur de leurs exportations en Livres Egyptiennes (L.E.), après qu’ils eurent reçu les paiements de leurs clients en dollars. « Une sorte d’obligation de la part de la BCE, mais les hommes d’affaires résistent afin d’obtenir des facilités qui encouragent ce mécanisme », dit-il.

Mercredi dernier, la BCE est en effet intervenue sur le marché en baissant le prix du dollar officiel à 7,83 L.E. contre 8,03 L.E. Une mesure inattendue surtout avec les prévisions de nouvelles hausses. La L.E. a perdu près de 13 % de sa valeur depuis janvier 2015 et la banque d’investissement Prime, entre autres, s’attendait à ce que son prix baisse encore de 20 piastres pour que le dollar atteigne 8,23 L.E. avant la fin de l’année. De même, la BCE a promis aux hommes d’affaires, il y a une dizaine de jours, de leur fournir des dollars afin de couvrir 25 % de leurs besoins d’importations, suspendues depuis quelques mois. Deux décisions qui sont arrivées après le lancement initié par les deux banques publiques Al-Ahly et Misr de nouveaux certificats bancaires à un taux d’intérêt de 12,5 % annuel, soit le plus élevé du marché ; les autres banques oeuvrant sur le marché local leur ont ensuite emboîté le pas. « Le lancement des certificats par la banque Al-Ahly ont rassemblé 20 milliards de L.E. », déclare Hesham Okasha, PDG de la banque Al-Ahly. Même somme environ pour la Banque Misr. « Ces certificats à un taux d’intérêt élevé ont réussi à faire bouger le marché. Une bonne part des clients ont converti leurs comptes en dollars en L.E. pour profiter de ce taux d’intérêt élevé », explique May Khaled, directrice à la banque Al-Ahly. Elle ajoute : « Les clients ont fait la queue devant la banque le lendemain de l’annonce pour profiter de ces certificats. Le marché demandait de telles options de placement », dit-elle. Une étape qui a pu gagner la confiance des hommes d’affaires, lesquels ont accepté de négocier avec la BCE l’idée d’obtenir la valeur de leurs exportations en L.E. pour aider à affronter la crise du dollar.

Réinstaller la confiance

« Les mesures de la BCE la semaine dernière font bonne impression », résume Mohamad Zaki El-Sweedy, président de l’Union des industries. Elles ont pu réinstaller la confiance des hommes d’affaires, surtout les exportateurs, qui ont accepté de permettre à la BCE de profiter du dollar. « Les exportateurs refusaient auparavant une telle option », dit-il. Maintenant, poursuit-il, l’option est vraiment sur la table des négociations. « Toutefois il n’est pas normal qu’un exportateur vende ses dollars à la BCE au prix officiel et rencontre ensuite des difficultés à obtenir des dollars. La BCE doit rassurer les exportateurs et leur fournir les dollars de leurs importations au moment voulu », tempère un membre de l’Union des industries, soucieux de son anonymat. Il ajoute : « La différence entre le prix du dollar officiel et celui sur le marché noir me fait perdre 200 000 L.E. par mois. Mes profits ont beaucoup maigri », dit-il. Et d’ajouter : « Il ne s’agit pas seulement de fournir des dollars. Il s’agit aussi d’en fournir au moment nécessaire ».

Ainsi, la BCE a tenu la semaine dernière, comme le confie le responsable de l’Union des industries égyptiennes, plusieurs réunions pour connaître les besoins et garanties désirés par les hommes d’affaires. « Il n’est pas logique que je sacrifie mes ressources en dollars et que mes besoins en dollars peinent à être satisfaits », dit-il. A cet égard, les hommes d’affaires ont présenté une liste de garanties à la BCE pour accepter le mécanisme. A savoir : garantir des dollars au moment voulu au prix officiel et pour des sommes équivalentes à celles qu’ils cèdent à la BCE. Des garanties soutenues par le bon sens.

Le marché noir résiste

Malgré l’intervention de la Banque Centrale d’Egypte (BCE) pour stabiliser le prix du dollar, le marché noir résiste. Même après la baisse de 20 piastres sur le marché officiel, le prix du dollar au marché noir se stabilise encore à 8,50 L.E. (7,83 L.E. au cours officiel). Les bureaux de change, comme le révèle une tournée effectuée par l’Hebdo dans quelques bureaux de change, ne baissent pas le prix. « Oui le prix officiel a baissé de 20 piastres, mais le dollar n’est pas disponible », explique Gamal, employé dans un bureau de change du quartier de Mohandessine au Caire. Il ajoute : « Les quantités de dollars disponibles sur le marché sont limitées, alors les bureaux de change sont incapables de fournir les besoins de tous les hommes d’affaires et des usines ».

Les bureaux de change sont bien conscients du manque de dollar à la BCE et résistent donc à réduire le prix. « Les mesures de la BCE ne sont pas suffisantes pour régler la crise du dollar. Il ne s’agit pas seulement d’un prix de vente élevé. Le problème essentiel c’est le manque de dollars sur le marché », dit Awad, dans un bureau de change du quartier de Zamalek, dans la capitale. « La BCE tente encore une fois de contrôler la hausse du dollar, mais cela est impossible. La valeur actuelle du dollar est plus élevée que le prix officiel. Alors la crise persistera. La seule solution est la relance des secteurs apportant des dollars aux pays », a-t-il expliqué. « Les fortes demandes d’achat de dollars que nous avons reçues la semaine dernière, même après la baisse du prix officiel du dollar, en sont la preuve », conclut-il.

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