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Paris, vu du Caire

Najet Belhatem, Jeudi, 19 novembre 2015

Tour d’horizon des éditos de quelques journaux égyptiens pour résumer les réactions dans la presse nationale, après les attaques terroristes du 13 novembre à Paris.

Pas de surprise

« Pas de surprise dans le fait que les organisations djihadistes transfèrent à un moment ou à un autre leur guerre du Moyen-Orient à l’Europe. Les cercles d’espionnage étrangers et même les chefs militaires djihadistes n’avaient pas de date précise. La carte gagnante des organisations djihadistes dans leur guerre ouverte avec leurs ennemis est justement le facteur surprise et vitesse dans l’action. Il était prévisible que l’Europe soit le témoin de vastes opérations meurtrières à cause de son implication dans le bourbier syrien ».

Chamseddine Al-Naqaz, sur le site d’information Sassa Post.

Trouvons l’erreur

« Où est l’erreur dans la gestion mondiale et régionale face au phénomène de terrorisme mondialisé avec à sa tête Daech et Al-Nosra dans la région arabe ? L’erreur réside-t-elle dans le déséquilibre international mondialisé ? Dans la politique britannique historique de soutien aux groupes islamistes face aux mouvements d’indépendance comme le Wafd en Juillet 1952 ? Dans le fait que les Etats-Unis aient adopté les traditions de l’orientalisme britannique envers l’islam et les mouvements de libération arabes ? L’erreur réside-t-elle dans les politiques américaine, française, allemande et britannique face au terrorisme ? ».

Nabil Abdel-Fattah, dans le quotidien Tahrir.

Ceux qui exploitent et ceux qui ne bougent pas

« Le terrorisme noir (comme s’il y avait un terrorisme blanc) a frappé le coeur de l’Europe, pour prouver encore une fois que ses mains atteindront tous les recoins du monde et que personne ne pourra y échapper tant que certains rechignent à y faire face et à le combattre, et que d’autres tentent de l’exploiter à des desseins politiques croyant que la magie ne se retournera pas contre le magicien. L’Egypte affronte une vague d’attentats terroriste suite au démantèlement du sit-in de Rabea le 14 août 2013. Et depuis cette date, Le Caire ne cesse de lancer des avertissements contre ce terrorisme. L’Egypte paye avec le sang d’innocents et en pertes matérielles parce que le monde ne s’est pas uni pour y faire face ».

Editorial du quotidien Al-Ahram.

Que vont faire nos chefs ?

« Les médias occidentaux ont joué un rôle notable dans la création de l’ennemi musulman et d’un islam qui serait une menace pour l’Occident. Les chefs du monde musulman réalisent-ils le danger de la situation de délabrement dans laquelle nous sommes à cause de la prolifération de ces organisations terroristes qui agissent au nom de la religion ? Sommes-nous prêts à affronter le jour où l’Occident décidera de porter une accusation directe contre le monde musulman comme source de terrorisme pour le monde entier ? ».

Mohamad Youssef, sur le site d’information en ligne Al-Bawaba News.

Une hypothèse qui ne tient plus

« Les études occidentales qui se sont penchées ces derniers temps sur les mouvements islamistes violents avec à leur tête Daech ont développé l’hypothèse que nous sommes face à des individus ou de petits groupes qui opèrent dans certains pays en dehors de l’Iraq, la Syrie et La Libye, et qui ne sont pas en relation avec la direction centrale de Daech et ne reçoivent pas leurs ordres d’elle, ni leur armement. Or, en vérité, les attentats de Paris contredisent totalement cette hypothèse. Nous sommes probablement devant un groupuscule, qui est en liaison directe au niveau de la planification de la logistique et de l’exécution avec la direction de Daech ».

Diaa Rachwane, dans le quotidien Al-Masry Al-Youm.

Le choc chez les riches et chez les autres

« Les tueries en masse, comme celles vécues à Paris, provoquent un choc énorme dans les sociétés riches et calmes baignant dans la prospérité et ses bienfaits, loin des régions de conflits sanglants. Ce qui n’est pas le cas dans les pays du tiers-monde où le sang et le feu sont un feuilleton quotidien à tel point que pour leurs habitants, la distance entre la mort et la vie ne devient plus distincte. Nous pouvons donc imaginer la lourdeur de l’épreuve que vit la France et ses citoyens. Mais malgré l’impact du choc, la manière dont l’Etat gère la situation est en elle-même un enseignement sur la force de la structure démocratique et son équilibre, contrairement à la gestion des Etats non démocratiques ou dans lesquels la démocratie n’est qu’un masque pour voiler le despotisme. Aucun responsable français n’a parlé de complot universel contre la France, alors qu’au même moment, beaucoup dans le tiers-monde évoquent un tel complot contre la France. Nous sommes en présence d’un pouvoir qui cherche à garantir la sécurité de ses citoyens sans chercher à faire porter le chapeau à des boucs émissaires. Nous avons beaucoup à apprendre de cette manière de gérer les crises, mais malheureusement, tout ce qui a intéressé les médias égyptiens c’est d’afficher sa joie face à l’annonce de l’état d’urgence par François Hollande ».

Gamal Soltane, dans le quotidien Al-Masriyoune.

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