Le FSN appelle à des manifestations contre le régime le 25 janvier prochain, pour le deuxième anniversaire de la révolution. (Photo : AP)
Alors que le président et son parti multiplient les appels au dialogue à l’intention de l’opposition, une enquête a été ouverte le jeudi 27 décembre à l’encontre des trois opposants accusés par des avocats d’avoir incité au renversement du président Mohamad Morsi. Sont visés le prix Nobel de la paix et ancien chef de l'Agence nucléaire de l’Onu, Mohamad ElBaradei, l’ancien patron de la Ligue arabe, Amr Moussa, et le leader de la gauche nationaliste, Hamdine Sabbahi.
Ces trois accusés sont à la tête du Front National du Salut (FNS), principale coalition de l’opposition qui a mené un combat farouche contre le projet de Constitution soutenu par les islamistes, qui vient d’être approuvé par référendum.
Pour les observateurs, l’accusation a été téléguidée par certains cadres des Frères musulmans et pourrait être une tentative visant à accentuer la pression sur l’opposition pour qu’elle accepte l’invitation au dialogue fait par la présidence.
Le Parti Liberté et Justice (PLJ, des Frères musulmans) avait récemment relayé l’appel de M. Morsi pour un dialogue national « sans conditions préalables ». L’objectif étant de réaliser une « réconciliation » des forces politiques, sévèrement divisées dans la foulée de la bataille autour de la nouvelle Constitution.
Hamdi Hassan, ancien député islamiste et membre du PLJ, estime qu’un consensus national est primordial pour faire face aux défis de la prochaine période. « Plusieurs lois importantes, comme la loi électorale, celles sur le droit à manifester ou sur la situation sécuritaire, seront adoptées dans les semaines et les mois à venir. Afin d’éviter des réactions violentes, il faut que leur adoption se fasse dans une atmosphère de consensus national », souhaite Hassan.
Des appels au dialogue peu convaincants
Mais les appels au dialogue sont accueillis avec suspicion par l’opposition. « Nous ne voulons pas participer à une farce appelée dialogue national », lance Ahmad Saïd, chef du parti des Egyptiens libres et membre du FNS. Pour lui, comme pour beaucoup d’opposants, le régime n’est pas sincère dans sa volonté d’ouverture politique qui ne serait là que pour la forme.
Ce n’est pas la première fois que l’opposition rejette le dialogue proposé par le chef de l’Etat. En décembre dernier, seuls quatre partis, dont trois islamistes, ont répondu présent, ce qui a transformé la rencontre en une réunion de courtoisie.
Aujourd’hui, l’opposition avance sur deux autres fronts : se préparer pour les prochaines législatives tout en maintenant la pression de la rue. Wahid Abdel-Méguid, membre du bureau politique du FNS, promet de travailler main dans la main avec les autres partis politiques membres du FNS. « Malgré le fait que le Front inclut des formations et des personnalités publiques de tendances diverses, les divergences ne trouveront pas leur place au sein du FNS », assure-t-il.
« Nous avons décidé de participer aux prochaines législatives sur des listes communes, nous avons aussi formé un comité pour élaborer notre programme électoral et définir les critères de choix de nos futurs candidats », poursuit Méguid.
Le FSN face à un dilemme
Le FSN appelle en outre à des manifestations contre le régime le 25 janvier prochain, pour le deuxième anniversaire de la révolution qui a fait chuter Hosni Moubarak. Cette décision défie les restrictions prévues dans un nouveau projet de loi sur le droit de manifester, ainsi que les appels du président Morsi à en finir avec les protestations et « à opter pour la productivité et le travail ».
« L’opposition doit prendre en compte qu’un large nombre de citoyens préférerait la voir s’engager dans un dialogue sérieux et fructueux avec le régime. Or, ce dernier n’utilise le dialogue que pour redorer son blason. Malheureusement, je ne vois aucun indice qui peut suggérer une fin imminente de cette polarisation », regrette Gamal Abdel-Gawad, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, résumant le dilemme auquel fait face l’opposition.
« La tâche la plus importante maintenant pour l’opposition c’est de maximiser ses chances lors des prochaines élections législatives », conclut le chercheur.
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