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Le Liban se révolte

Lundi, 31 août 2015

Les dernières manifestations qui ont eu lieu à Beyrouth sous le slogan « Vous puez » ont été organisées par des gens normaux qui se sont réunis autour d’un droit naturel de vivre dans un pays propre, un pays sans ordures et sans corruption. Le slogan ainsi que les appels aux protestations étaient inscrits partout sur les murs et les voitures en parallèle aux appels sur Internet. La colère régnait donc contre le gouvernement qui a échoué dans sa gestion de la crise des déchets au Liban. Ainsi que d’autres crises graves, en particulier la hausse exorbitante des prix, au point que les Libanais aux revenus moyens se trouvent continuellement obligés de faire des sacrifices. Tandis que les citoyens aux revenus limités vivent dans la misère.

Le problème au Liban est que l’élite vit séparément du peuple, et les politiciens sont les mêmes depuis quatre décennies. Et leurs relations de conflit et de concurrence ont des dimensions personnelles et confessionnelles au point de faire perdre les droits et les intérêts des citoyens. Comme le simple fait de créer un organisme chargé de la collecte des ordures, de s’en débarrasser ou de les recycler afin d’éviter la souffrance des citoyens.

La révolte populaire contre le problème des ordures et la négligence du gouvernement n’est que le début d’une vague féroce de protestations contre l’élite au pouvoir. Et les slogans « Liberté » ou « Le peuple veut la chute du régime » sont l’expression d’une colère populaire qui ne pourra pas être apaisée par des calmants ou des manoeuvres politiques traditionnelles. De plus, la colère s’est aggravée après le recours de certaines forces de sécurité à la violence, en employant les gaz lacrymogènes et les balles en caoutchouc. Donc, la situation peut s’aggraver si les éléments affiliés aux forces de sécurité et qui sont responsables du déclenchement des heurts ne sont pas jugés avec transparence. Il est vrai que la décision du ministre libanais des Affaires intérieures, Nihad Al-Machnouk, de libérer tous les protestataires arrêtés est un pas positif, et a relativement permis de calmer la situation. Mais cela n’est pas suffisant. En effet, négliger le jugement de ceux qui ont commis des erreurs à l’encontre du peuple peut mener à des répercussions graves, surtout que de plus en plus de Libanais estiment que le moment est aux changements radicaux. Autrement dit, il faut entamer un soulèvement populaire contre une élite qui a perdu sa popularité auprès de la majorité des Libanais.

Les Libanais ont eux-mêmes pris la décision de descendre dans les rues, et il y a là un paradoxe flagrant. Car à peine deux semaines avant le déclenchement des manifestations, Michel Aoun, président du Courant national libre, avait appelé ses partisans ainsi que les citoyens chrétiens à descendre dans les rues pour le soutenir dans sa volonté de devenir président sans être obligé d’obtenir le nombre de voix requises au parlement, intentionnellement suspendu au Liban. Aoun avait alors mis l’armée et les forces de sécurité en garde contre l’affrontement de ses partisans s’ils descendent dans les rues à une date qu’il fixera lui-même. C’est alors que son entourage avait pris du recul considérant que la situation libanaise et les dangers qui le menacent ne peuvent permettre un tel risque d’une part. Et les opposants à Michel Aoun ont critiqué la menace qu’il a adressée à l’armée d’autre part. Il est vrai que Michel Aoun a eu recours au slogan de la sauvegarde des droits des chrétiens, mais beaucoup de chrétiens ont vu dans cette affaire un opportunisme politique inacceptable.

Les protestations libanaises sont un message fort adressé à toute l’élite qui a perdu sa crédibilité. Les Libanais ont choisi leur combat. Ils veulent récupérer un Liban que l’élite a abîmé.

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