En tournée au Caire, Mascate et Riyad, l’envoyé spécial des Nations-Unies au Yémen, le Mauritanien Ismaïl Ould Cheikh Ahmad, multiplie les concertations pour faire aboutir son initiative de règlement politique.
Ce mercredi 12 août, l’émissaire des Nations-Unies au Yémen, Ismaïl Ould Cheikh Ahmad, doit atterrir à New York pour rendre compte au Conseil de sécurité de sa tournée au Caire, Mascate et Riyad, qui vise à relancer le règlement politique de la crise yéménite.
Porteur d’un projet de paix en 7 points, Ould Cheikh Ahmad mène des consultations pour convoquer une nouvelle session de négociations, après l’échec des pourparlers de Genève sous l’égide de l’Onu, le 19 juin. Ceux-ci avaient duré trois jours sans que les deux délégations se rencontrent en face-à-face, et se sont achevés sans accord sur une trêve ni même une date pour de nouvelles consultations. « Ould Cheikh Ahmad a l’impression que son plan est de mieux en mieux accepté par les différentes parties en présence. Riyad a exprimé une réaction positive vis-à-vis du plan et le CGP, parti de Ali Abdallah Saleh, le considère de manière favorable », a déclaré le porte-parole des Nations-Unies à Genève, Ahmad Fawzi, qui s’exprimait à l’issue d’une rencontre entre Ould Cheikh Ahmad et le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil Al-Arabi, au Caire, sa première destination avant de s’envoler pour le Sultanat d’Oman.
Pour Malek Aouny, directeur de rédaction de la revue Al-Syassa Al-Dawleya : « Le terrain est aujourd’hui plus propice pour les initiatives qui se multiplient sur la scène régionale et le médiateur onusien pourrait avoir plus de chance cette fois-ci pour parvenir à un règlement politique ». Aouny estime que le déplacement de l’émissaire des Nations-Unies est motivé par la progression des forces anti-Houthis sur le terrain, et le changement de l’équilibre militaire qui pourrait pousser les Houthis à accepter des demi-solutions. Par ailleurs, il serait incertain et très coûteux de trancher militairement ce conflit notamment à Saada, ce qui pousserait le camp de Abd-Rabo Mansour et ses alliés régionaux à opter pour une solution politique.
Sous la supervision de la Ligue arabe
L’envoi par l’Onu d’observateurs arabes dans différentes régions du Yémen, sous la supervision de la Ligue arabe, est l’un des points importants du plan de paix qui a été au centre des discussions entre l’émissaire des Nations-Unies et Nabil Al-Arabi, au Caire. Ould Cheikh Ahmad a affirmé : « Nous ne parlons pas d’une armée ou d’observateurs militaires, mais d’observateurs des Nations-Unies et en coordination avec la Ligue arabe et certains pays islamiques. Cela ne peut pas arriver à moins qu’ils fassent partie d’un accord politique global entre les parties ». Pour Al-Arabi, « la Ligue arabe envisage sérieusement l’envoi des observateurs, mais dans le cas où un cessez-le-feu serait conclu entre les acteurs en conflit ». C’est la première fois que la Ligue arabe exprime sa volonté de déployer des observateurs pour superviser un processus de paix dans un pays en guerre. Cette proposition du déploiement d’observateurs arabes fait partie, en fait, d’un certain nombre d’idées avancées par l’envoyé des Nations-Unies au Yémen, ou de mécanismes visant à trouver une solution politique à la crise au Yémen. Parmi les points du plan de Ould Cheikh Ahmad figurent le retrait des Houthis des territoires conquis, conformément à la résolution de l’Onu 2216, l’élaboration d’un accord sur le mécanisme de gestion de ces régions et le retour à un processus politique pacifique au Yémen basé sur trois piliers principaux, à savoir l’initiative du Golfe, le dialogue national et les résolutions du Conseil de sécurité.
Instaurer un cessez-le-feu permanent dans le but d’acheminer des aides humanitaires vers toutes les régions de ce pays est une autre clause du plan. Celui-ci demande également de préparer le terrain aux activités du gouvernement et à la reconstruction des infrastructures yéménites. L’acceptation par les parties en conflit du terrorisme en tant qu’ennemi du Yémen et l’impératif du retour de toutes les parties à la table des négociations, axées sur les revendications du peuple yéménite, font aussi partie d’autres clauses de ce plan. En visite au Caire, Ould Cheikh Ahmad a rencontré le secrétaire général du Congrès Général du Peuple (CGP), le parti politique d’Ali Abdallah Saleh. « Ces consultations avec le parti de Saleh, loin de son allié Houthis, au Caire, indique que Saleh après la défaite des forces des Houthis sur le terrain cherche aujourd’hui une issue pour sortir de la crise et on pourrait témoigner dans les jours à venir de mesures unilatérales par le Parti du Congrès, loin des Houthis », dit Ekram Badr Al-Din, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire.
Oman, lieu de médiation préféré
Après l’Egypte, Ould Cheikh Ahmad s’est rendu à Oman, où il a rencontré des représentants des Houthis. Le chef des Houthis, Abdelmalek Al-Houthi, s’est dit, le 2 août, ouvert « à un règlement politique ». En fait, Mascate, connue pour sa neutralité, et la seule des six monarchies du Golfe à ne pas participer à la coalition arabe, a accueilli la plupart des pourparlers de l’émissaire avec les Houthis, sous l’égide des Nations-Unies. Selon Ould Cheikh Ahmad, la coordination avec le Sultanat « est très positive ». « Le Sultanat garde des contacts avec toutes les parties en conflit au Yémen, ce qui facilite leurs efforts de médiation », indique Badr Al-Din.
Riyad, où se trouve le gouvernement en exil d’Abd-Rabbou Mansour Hadi, marque la dernière destination de l’émissaire avant de retourner à New York, pour rendre compte de sa mission au Conseil de sécurité. Une flexibilité dans la position saoudienne, notent beaucoup d’observateurs. Le ministre des Affaires étrangères saoudien, Adel Al-Jubeir, vient de déclarer que les Houthis sont un composant du peuple yéménite et qu’ils ont un rôle à jouer dans l’avenir.
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