Al-Ahram Hebdo : Le gouvernement vient d’approuver une nouvelle loi antiterroriste. Comment la voyez-vous ?
Nour Farahat : Cette nouvelle loi apparaît comme une compilation des amendements du code pénal instaurés pendant l’ère Moubarak et de certaines dispositions de la loi d’urgence avec une expansion des pouvoirs extraordinaires. L’article 54 donne au président de la République tous les pouvoirs dans la loi d’urgence, sans déclarer l’état d’urgence. C’est un contournement clair et une violation de la Constitution. Une lecture attentive du projet de loi révèle la prédominance de la vision sécuritaire. C’est en fait le problème de notre exécutif et des appareils de sécurité, à chaque fois qu’ils font face à un défi, ils mettent en cause la loi existante et proposent alors une nouvelle législation.
— Mais ce sont les journalistes qui sont visés par cette loi ...
— Cela a toujours été le cas. Sous Moubarak, le gouvernement avait élaboré un article qui permet l’emprisonnement des journalistes dans les « délits de presse », soit tout ce qui porte atteinte à la réputation, à l’honneur ou à la situation financière d’une personne. La colère des journalistes à l’époque avait poussé Moubarak à appeler Galal Aref, alors chef du syndicat, pour lui promettre d’annuler le texte. Mais finalement, seule la phrase liée à la situation financière, qui de facto empêchait les journalistes de traiter les sujets de corruption, a été supprimée. C’est pourquoi je mets les journalistes en garde contre un piège monté par le gouvernement.
— Que voulez-vous dire ?
— Le gouvernement, pour apaiser la colère des journalistes, peut annuler l’emprisonnement prévu dans l’article 33 et le remplacer par une amende. Mais tout en maintenant les autres articles qui sont catastrophiques avec des pouvoirs étendus et des formulations vagues. La loi, à titre d’exemple, permet dans son article 33 à tout policier d’arrêter n’importe quelle personne et de la placer en détention illimitée. C’est une loi qui légalise l’instauration d’un Etat policier .
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