Maiduguri, grande ville dans le nord-est du Nigeria, a été la cible de deux attentats revendiqués par Boko Haram, samedi et dimanche derniers. Deux jours de suite donc, à peine après l’investiture du nouveau président, Boko Haram fait parler de lui. L’attaque de dimanche a ciblé un marché et a fait un mort et trois blessés. Celle de la veille, plus meurtrière, est un attentat-suicide dans une mosquée qui a fait 18 morts.
C’est en effet dans cette ville qu’est né en 2002 le groupe islamiste avant de se lancer en 2009 dans de sanglantes attaques. Ces attaques sont intervenues immédiatement après la prestation de serment du nouveau président nigérian. Lors de son discours d’investiture, vendredi dernier, Muhammadu Buhari a promis d’installer à Maiduguri même, plutôt qu’à Abuja, un nouveau centre de commandement de l’armée afin de mieux coordonner la contre-insurrection contre Boko Haram. « Boko Haram est un groupe de gens fous et sans Dieu, qui sont aussi éloignés de l’islam qu’on peut imaginer », a lancé M. Buhari, un musulman du nord du pays, en prononçant, vendredi dernier, son discours d’investiture dans la capitale fédérale. Le nouveau président s’est engagé à « prendre à bras-le-corps » les « défis énormes » qu’affronte le Nigeria. « Nous allons les prendre à bras-le-corps, les Nigérians ne vont pas regretter de nous avoir confié cette responsabilité », a-t-il dit lors de la cérémonie d’investiture.
Or, son mandat commence mal. Cité par l’AFP, Yan Saint-Pierre, qui dirige le centre d’analyse Modern Security Consulting Group, le projet du président nigérian de transférer d’Abuja à Maiduguri le centre de coordination est « très judicieux ». Selon lui, « cela montre une approche plus pragmatique pour lutter contre Boko Haram ».
Cela dit, les observateurs doutent que Boko Haram ait actuellement les capacités de prendre Maiduguri, régulièrement ciblée, mais une attaque d’ampleur pourrait entraîner de lourdes pertes civiles. Ryan Cummings, également cité par l’AFP, voit, plutôt, ce transfert comme « un geste symbolique ». « Je pense que Buhari essaie de faire mentir la perception, selon laquelle le nord-est du Nigeria serait de peu d’importance pour l’Etat nigérian et que la sécurité de cette région ne serait pas une priorité pour le régime d’Abuja ».
Pour M. Saint-Pierre, diriger les opérations au plus près des événements pourrait aussi améliorer la coordination régionale, car si une coalition s’est bien créée contre Boko Haram, jusqu’à présent, les différents pays, la composant, ont agi de manière totalement indépendante.
Le président sortant, Goodluck Jonathan, a été très critiqué pour son incapacité à circonscrire l’insurrection, qui depuis 2009 a fait plus de 15 000 morts et 1,5 million de déplacés. Ce n’est qu’en février que l’armée nigériane a commencé à remporter de réels succès contre Boko Haram, grâce à l’aide de ses voisins, le Tchad, le Cameroun et le Niger. Les islamistes semblent désormais se regrouper dans les zones reculées de l’Etat de Borno, notamment sur la frontière camerounaise
Pour sa part, Buhari s’est contenté de remercier, dans son discours de vendredi dernier, ses voisins « pour avoir engagé leurs forces armées afin de combattre Boko Haram au Nigeria », mais il n’a pas indiqué s’il souhaitait poursuivre cette coopération militaire. De son côté, il y a dix jours, le Tchad a pourtant voté en faveur d’une prolongation de son intervention. Les observateurs jugent qu’une coopération régionale est nécessaire pour vaincre Boko Haram, dont les combattants ont été chassés des villes et repoussés vers les zones frontalières.
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