A Kaboul, Leon Panetta a tenté de discuter, avec son homologue afghan, du nombre des soldats américains qui vont rester dans le pays après 2014.
(Photo: Reuters)
A l'approche du départ des troupes de l’Otan fin 2014, la communauté internationale ne cesse de manifester son inquiétude grandissante quant à l’avenir du « bourbier afghan » menacé de replonger dans la guerre civile. Une inquiétude alimentée par la vague de violences qui sévit dans le pays. Cette semaine, un attentat suicide revendiqué par les talibans contre une base aérienne de l’Otan dans la province de Kandahar, un bastion rebelle du sud afghan, a fait trois morts et 21 blessés. « Un kamikaze a fait exploser sa voiture piégée au moment où un convoi de l’Isaf entrait dans la base aérienne », a déclaré le général Abdul Raziq, chef de la police provinciale, selon qui un mort et trois blessés sont parmi les rangs de l’armée américaine.
Mauvaise coïncidence, car cet attentat tombait parallèlement lors de la visite du secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, à Kaboul, venu pour discuter avec le président afghan Hamid Karzaï de l’avenir du pays après 2014 et déterminer le nombre de soldats américains qui doivent y rester après cette date. Défiants et incassables, les rebelles ont affirmé samedi que cet attentat était une « réponse » à la visite du chef du Pentagone à Kaboul. Sûr et confiant, le chef du Pentagone a assuré que cet attentat s’inscrivait dans le cadre d’une tactique désespérée des insurgés face à la puissance croissante des forces gouvernementales afghanes qui seraient bientôt prêtes à se charger de la sécurité de leur pays.
« C’est ce à quoi ils recourent afin de continuer à tenter de provoquer le chaos dans ce pays », a martelé M. Panetta Les attentats suicide, avec les bombes artisanales, sont les armes de prédilection des talibans, chassés du pouvoir à la fin 2001 et qui combattent, depuis, les forces afghanes et leurs alliés de l’Otan. Début décembre, les talibans avaient lancé plusieurs kamikazes à l’assaut de l’aéroport de Jalalabad (est) qui abrite, comme celui de Kandahar, une base importante de la force de l’Otan. Pour empêcher que cette vague de violence ne gâche toute une décennie d’efforts et de fonds dépensés en Afghanistan, le gouvernement américain souhaite conserver 10 000 soldats en Afghanistan après 2014, a confié, début décembre, un haut responsable américain, alors que le commandement militaire voudrait en garder jusqu’à 15 000. A priori, ces soldats seraient principalement concentrés dans la base aérienne de Bagram, au nord-est de Kaboul, tandis que d’autres camps dans le sud et l’est, où la rébellion est la plus active, seront transférés au gouvernement afghan. « Nous pensons maintenir durablement notre présence en Afghanistan », a déclaré M. Panetta, ajoutant que Washington déterminerait définitivement l’ampleur de cette présence « dans les semaines à venir ».
Pomme de discorde
Pour achever ces débats cruciaux sur l’avenir d’un pays en ébullition, le président américain Barack Obama a invité cette semaine son homologue afghan à se rendre le 7 janvier à Washington pour parler de l’avenir de l’Afghanistan et parvenir à une vision commune. Une invitation qui n’a pas tardé à être acceptée par Karzaï. Mais une grave pomme de discorde pourrait bien entraver le déploiement des soldats américains après 2014 en Afghanistan, à savoir l’immunité des soldats étrangers que Karzaï refusait d’octroyer aux soldats restants. Selon les experts, la question du statut des troupes américaines, surtout de leur impunité devant la justice afghane, est déterminante pour leur maintien. En Iraq, la non-signature d’un tel accord avait provoqué le départ des militaires américains, sans qu’aucune force résiduelle ne reste dans ce pays. De peur de voir son pays tomber dans les mains des talibans après 2014, Hamid Karzaï s’est dit ouvert,
la semaine dernière, à la question de l’immunité des soldats américains qui vont rester dans le pays, mais à diverses conditions, dont le respect des lois afghanes, le respect de la vie et des possessions des Afghans, l’entraînement et l’équipement des forces de sécurité afghanes, ou encore le fait que l’armée américaine cesse de bombarder le territoire national ou d’emprisonner des Afghans. « Sous respect de ces conditions, l’Afghanistan considérera l’impunité pour eux », a affirmé le chef de l’Etat. Autre facteur à envenimer l’inquiétude sur l’avenir de l’Afghanistan : le départ samedi dernier des dernières troupes combattantes françaises en Afghanistan. Dans ce contexte de retrait international, les factions ennemies afghanes, dont les talibans, doivent se rencontrer le 19 et le 20 décembre en France pour des discussions sur l’avenir du pays. Cette rencontre va regrouper des représentants du Haut Conseil de la paix, une entité gouvernementale chargée d’oeuvrer à des négociations de paix avec les rebelles.
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