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La Syrie, un pays sans vie

Amira Samira, Jeudi, 16 avril 2015

La situation humanitaire en Syrie est désastreuse. Dans les camps de réfugiés, les civils manquent de tout et les dons ne suffisent plus.

La syrie
Des résidents du camp de Yarmouk réunis pour recevoir des denrées alimentaires. (Photos : AP)

Après 4 ans de crise humanitaire, la vie en Syrie est cauchemardesque. La crise syrienne s’est transformée en guerre civile. Plus de 215 000 personnes ont déjà perdu la vie (4 500 décès par mois en moyenne), selon l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH). Les blessés sont innombrables. Les besoins humanitaires sont énormes dans toutes les zones touchées par ce conflit interminable. A ce jour, les besoins humanitaires ne cessent de croître et les déplacements de population se poursuivent. Le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’Onu considère que 12,2 millions de Syriens ont besoin d’une aide humanitaire urgente à l’intérieur de la Syrie, soit presque la moitié des quelques 23 millions d’habitants que compte le pays. La moitié des 12,2 millions sont des enfants. Et plus du tiers (4,8 millions) se trouvent dans des zones inaccessibles ou quasi inaccessibles et ne peuvent pas bénéficier d’une livraison de nourriture.

Une génération entière d’enfants est témoin des atrocités de la guerre et se trouve progressivement privée des services de base, de nutrition, de santé, de toute éducation et de toute protection. Selon l’Unicef, plus de 5,6 millions d’enfants ont été affectés par la crise. « La crise force les enfants à grandir trop vite », résume un rapport de l’Organisation, qui se réfère notamment à des cas d’utilisation des enfants comme boucliers humains. Selon le Bureau de coordination humanitaire des Nations-Unies, il y a 7,6 millions de déplacés à l’intérieur de la Syrie, soit le plus grand nombre de personnes déplacées à l’intérieur d’un même pays.

Ecoles endommagées

Les affrontements ininterrompus ont endommagé les écoles. L’accès à l’eau et à l'électricité est rendu difficile dans les zones densément peuplées où communautés locales et personnes déplacées cohabitent. Le secteur syrien de la santé souffre lui aussi. Les médecins travaillent dans des conditions de sécurité précaires et médicales très difficiles. « Le régime de Assad se sert de la privation des soins comme une arme. L’acte médical est devenu un acte de guerre et les services de santé deviennent une arme de résistance », dénonce Fabrice Weissman, membre de Médecins sans frontières. Au camp palestinien de Yarmouk, le désastre humanitaire et le désespoir sont immenses. Amnesty International a déjà recensé environ 200 morts principalement à cause de la famine, du manque de soins médicaux et des conditions hivernales extrêmes au cours des derniers mois. Avant 2011, le camp de Yarmouk accueillait 170 000 personnes, soit la plus grande population de réfugiés palestiniens du pays, ainsi que plusieurs milliers de ressortissants syriens. Aujourd’hui, il ne compte que 18 000.

3,8 millions de réfugiés

La situation des déplacés à l’étranger ou plutôt les réfugiés syriens est, également, très précaire. L’Agence de l’Onu pour les réfugiés (HCR) a déclaré que son opération en Syrie était la plus importante de son histoire. Selon elle, plus de 3,8 millions de Syriens sont réfugiés dans les pays voisins et en Europe. Les pays ayant une frontière avec la Syrie se rapprochent dangereusement du point de saturation. « En fait, 5 pays seulement de la région se partagent 95 % des réfugiés. Le Liban, petit pays de 4 millions d’habitants, est en première ligne. C’est le premier pays d’accueil pour les Syriens. Il accueille plus qu’un million de réfugiés, soit plus qu’un quart de la population locale », détaille Gamal Abdel-Gawad, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. Selon lui, la Turquie est aussi un donateur de premier plan dans la crise syrienne. En effet, la Turquie accueille actuellement 1,65 million de réfugiés syriens.

Jusqu’à l’été 2013, l’Egypte accueillait 300 000 réfugiés. A ce jour, l’Egypte ne compte que moins de la moitié de ce chiffre, selon le HCR. L’Onu a exhorté la communauté internationale à accroître fortement son aide humanitaire aux Syriens. « Quatre Syriens sur cinq vivent dans la pauvreté, la misère et la privation. Le pays a perdu près de quatre décennies de développement humain. Près de la moitié des hommes, femmes et enfants ont été contraints de fuir leurs foyers », indique Ban Ki-moon, secrétaire général de l’Onu, à l’ouverture de la troisième conférence internationale des donateurs pour la Syrie, qui se tenait le 31 mars à Koweït. Lors des deux premières conférences de 2013 et 2014, les bailleurs de fonds avaient fait des promesses de dons pour un total de 1,5 milliard et de 2,4 milliards de dollars, dont plusieurs n’ont pas été honorées. Oxfam estime que seuls 9,8 % des dons réclamés par l’Onu ont été fournis. « Le monde se détourne de millions de civils syriens laissés sans soutien, sans espoir », conclut Abdel-Gawad.

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