La capture de deux soldats israéliens et
le bombardement du nord de l’Etat hébreu par le Hezbollah
montrent une fois de plus que le parti chiite libanais est
un acteur incontournable du Proche-Orient, obligeant l’Etat
juif à se battre sur plusieurs fronts.
Allié de Damas et de Téhéran, mais bête
noire d’Israël et des Etats-Unis, qui l’ont inscrit sur la
liste des mouvements terroristes, critiqué à l’intérieur
même du Liban par la majorité parlementaire pour son refus
de désarmer, le Hezbollah agit avec un sens aigu de la «
realpolitik ». Comme il l’a montré une fois de plus mercredi
dernier en capturant les deux soldats israéliens, il décide
lui-même le plus souvent du moment opportun pour lancer ses
actions militaires anti-israéliennes ou respecter le
cessez-le-feu.
Le moment choisi pour l’opération du
Hezbollah ne doit rien au hasard. Bien au contraire, il
oblige l’Etat hébreu à des choix difficiles. Elle intervient
alors qu’Israël est déjà empêtré dans une offensive majeure
contre la bande de Gaza à la recherche d’un caporal capturé
le 25 juin par un commando palestinien qui veut l’échanger
contre des détenus palestiniens. A l’instar du chef du
bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, qui avait
conditionné la libération de ce soldat à celle de détenus
palestiniens, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a posé
des conditions similaires : les deux soldats israéliens ne
retourneront chez eux « que dans le cadre d’un échange »,
par le biais de négociations indirectes. Il s’est abstenu de
dire si cet échange pourrait inclure des Palestiniens
détenus en Israël.
Des négociations indirectes, à travers
une médiation allemande, avaient précédé l’échange en
janvier 2004 de quelque 400 Palestiniens et autres détenus
arabes contre les corps de trois soldats israéliens et un
officier à la retraite, détenus par le Parti de Dieu. Cet
échange de prisonniers avait été considéré comme une
victoire politique majeure pour le Hezbollah.
Khaled Mechaal avait répondu la semaine
dernière au premier ministre israélien, Ehud Olmert, qui a
déclaré qu’il ne négocierait jamais un échange de
prisonniers, en affirmant qu’Israël l’avait déjà fait avec
le Hezbollah. Le Hezbollah est ainsi venu à la rescousse du
Hamas, en enlevant les deux soldats israéliens. Le Hamas a
d’ailleurs publié un communiqué à Beyrouth dans lequel il
estime que l’opération du Hezbollah « prouve de nouveau la
complémentarité du projet de résistance contre l’entité
sioniste, que ce soit en Palestine ou au Liban ». Cette
complémentarité est souvent évoquée par les responsables du
Hezbollah, même si Hassan Nasrallah s’en tient le plus
souvent dans ses discours à poursuivre la « résistance »
jusqu’à la libération des détenus libanais en Israël et le
retrait d’Israël des fermes de Chebaa, un secteur conquis
par Israël sur la Syrie en 1967 et revendiqué par Beyrouth
avec le consentement de Damas.