Syrie.
L’ambassadeur Waël Nasser Eddine Al-Assad, directeur du
département des relations multilatérales à la Ligue Arabe,
évoque la conférence qui aura lieu en Finlande en 2012, sur
la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au
Moyen-Orient.
« L’objectif est d’instaurer une zone sans armes nucléaires
»
Al-ahram
hebdo : Pourquoi la Finlande a-t-elle été choisie pour
accueillir la conférence générale de 2012 pour étudier
l’instauration d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’ADM
au Moyen-Orient ?
Waël Al-Assad :
Depuis la décision d’organiser la conférence en 2010, aucun
choix n’a été fait sur l’Etat qui accueillera la conférence.
Les Etats-Unis sont responsables de cette lenteur. Par
contre, les Arabes ont soulevé la question. Le Canada, la
Hollande et la Finlande étaient les 3 pays proposés. Mais la
partie arabe avait des réserves concernant le Canada et la
Hollande à cause de leurs positions envers les Arabes,
tandis que la Finlande adopte des positions positives, en
particulier envers la cause palestinienne et la question de
l’adhésion de la Palestine à l’Onu. Cependant, il y existe
des réticences en ce qui concerne le choix du ministre
finlandais des Affaires étrangères comme coordinateur de la
conférence. La partie arabe aurait préféré un ex-premier
ministre ou un ex-ministre des Affaires étrangères pour
jouer un rôle plus actif.
— De quelle manière la partie arabe se prépare-t-elle ?
— La Ligue arabe effectuera des contacts avec le
coordinateur de la conférence pour connaître sa conception
sur les sujets traités par la conférence. Une coordination
sera effectuée à l’intérieur de la Ligue pour déterminer les
approches arabes et les exprimer à travers des positions
conjointes, comme la définition du cadre géographique. Il
faut déterminer s’il comprendra ou non l’Iran. Il se peut
que la question du Pakistan soit aussi soulevée ainsi que
d’autres questions techniques aux répercussions politiques,
comme le mécanisme d’inspection et d’investigation. La
première priorité portera sur l’agenda et le plan d’action
de la phase post-conférence. Reste la question du processus
de négociations sur lequel il doit y avoir un accord arabe.
— L’objectif est-il de parvenir à un accord obligatoire pour
instaurer une zone exempte d’armes nucléaires ?
— Oui, l’objectif final est d’instaurer une zone exempte
d’armes nucléaires. Cet accord sera obligatoire pour toutes
les parties.
— Pourquoi citer précisément les Etats-Unis, la Russie et le
Royaume-Uni en parlant de la conférence ?
— Quand le Traité de Non-Prolifération (TNP) des armes
nucléaires a été signé, il a été déposé auprès de ces Etats
qui désiraient, lors d’une conférence de révision du traité
en 1995, le prolonger. Cependant, des pays arabes ont
refusé. C’est pourquoi, ces 3 Etats ont réclamé
l’instauration d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’ADM
au Moyen-Orient, pour que les Etats arabes acceptent le
prolongement du traité.
— Quelle est la position arabe sur le programme nucléaire
iranien ? Est-elle différente de la position occidentale ?
— La partie arabe adopte un rôle d’observateur. La
communauté internationale n’a pas pu prouver jusqu’à présent
que les intentions de l’Iran sont de posséder des armes
nucléaires. Il est vrai que certains pays sont inquiets
quant au programme iranien. Cependant, la Ligue arabe
effectue un lien entre le dossier nucléaire iranien et la
dimension géographique, c’est-à-dire qu’elle lie le
programme iranien au programme israélien. Comment parler des
intentions iraniennes sans parler des intentions d’Israël
qui possède effectivement l’arme nucléaire ?
— Certains affirment que le président américain a demandé à
des inspecteurs de l’Agence Internationale de l’Energie
Atomique (AIEA) des documents prouvant la volonté de l’Iran
d’acquérir les armes nucléaires. Qu’en pensez-vous ?
— Il y a une escalade entre les Etats-Unis et l’Iran. La
partie américaine utilise le dossier nucléaire pour faire
pression sur l’Iran. Si des documents sont publiés, les
Arabes adopteront une position. Mais jusqu’à présent, l’AIEA
n’a pas pu prouver l’existence de tels documents. Les Arabes
refusent catégoriquement qu’Israël ou l’Iran possède l’arme
nucléaire. La région ne peut supporter l’existence de cette
arme.
— Qu’advient-il de la décision de l’AIEA de 2009 concernant
les capacités nucléaires israéliennes ?
— Le mystère qu’entretient Israël sur son programme
nucléaire ne profite à personne. Nous allons poursuivre le
dialogue entre les Etats-Unis et Israël autour de ces
questions. Washington tente de convaincre Tel-Aviv de
participer à la conférence de 2012, ce qui pose une
interrogation importante : cette participation
poussera-t-elle Israël à commencer à remédier au problème de
l’arme nucléaire ? Il semble que ce dernier ne refuse pas la
participation, mais il pose des questions pour ne pas être
embarrassé durant la conférence de 2012. Or, nous aspirons à
une solution régionale globale.
— Quelles sont les restrictions imposées par les Etats
exportateurs de produits et technologies nucléaires aux pays
en développement ?
— Nous avons des doutes quant aux groupes chargés de
surveiller les exportations d’armes, en particulier les
armes nucléaires, qui en excluent l’Inde, et tentent de
faire la même chose avec Israël, non signataire de l’accord.
En même temps, les mêmes prérogatives ne sont pas attribuées
aux pays arabes signataires de l’accord sur le nucléaire.
— Quelle est la position arabe envers le dossier nucléaire
syrien ?
— Ce dossier a été transféré au Conseil de sécurité de l’Onu
depuis plus d’un an par le conseil des conservateurs de
l’AIEA. Nous savons que la Syrie nie toute activité
nucléaire. A ce propos, nous avons des restrictions sur 2
points. Premièrement : Israël a frappé la région de Der Al-Zor
sans en informer la communauté internationale. Ce qui est
très dangereux, car cela signifie que chaque pays qui doute
d’une possession de l’arme nucléaire par son voisin a le
droit de lancer des frappes contre lui.
Deuxièmement : la destruction par Israël du site a empêché
de connaître la vérité. Nous attendons la décision de
l’Agence sur cette question. Quant à l’escalade du dossier
nucléaire syrien, cela a un autre sens, car nous savons que
le Conseil de sécurité peut lancer cette escalade pour
d’autres raisons qui n’ont rien à voir avec le programme
nucléaire. Aujourd’hui, le dossier syrien ne concerne plus
la Ligue arabe, puisqu’il est étudié par le Conseil de
sécurité .
Propos recueillis par Atef Sakr