Syrie .
Malgré la pression arabe et internationale qui s’accentue,
le régime paraît déterminé à se maintenir en place coûte que
coûte.
Assad
reste inflexible
La
terre tremble toujours sous les pieds du président syrien
Bachar Al-Assad.
Confronté à un mouvement de contestation sans précédent,
Bachar s’est dit prêt à
combattre et à mourir en cas d’intervention étrangère,
dénonçant l’attitude de certains pays de la Ligue arabe.
Ses déclarations sont intervenues alors que l’ultimatum de
la Ligue pressant Damas de cesser la répression a pris fin
samedi à minuit, exposant désormais la Syrie à des sanctions
économiques arabes.
Neuf mois après le déclenchement d’une contestation
populaire, le régime reste inflexible en dépit de son
isolement international croissant.
Pour hausser le ton, la Ligue arabe a rejeté dimanche
dernier une demande de Damas d’amender une proposition
d’envoyer en Syrie une délégation de 500 observateurs,
estimant qu’elle dénaturait le projet, quelques heures après
l’expiration de l’ultimatum fixé par l’organisation panarabe
à Assad pour qu’il cesse la
répression. « Ces modifications affectent le cœur du projet
et changeraient radicalement la nature de la mission, qui
consiste à superviser la mise en œuvre du plan arabe pour
mettre fin à la crise en Syrie et protéger les civils
syriens », a déclaré l’institution panarabe dans un
communiqué. Selon le communiqué, la Ligue est résolue à
résoudre la crise syrienne dans un cadre arabe, afin de
mettre fin à la violence et aux meurtres et de répondre aux
ambitions du peuple syrien pour le changement et les
réformes politiques et économiques.
La Ligue arabe avait indiqué vendredi que le ministre syrien
des Affaires étrangères, Walid Mouallem,
avait envoyé à son secrétaire général, Nabil Al-Arabi,
une lettre pour réclamer des modifications au projet. Pour
défendre son régime, le ministre syrien des Affaires
étrangères a expliqué que « la proposition de la Ligue arabe
comporte des articles reflétant les positions non
équilibrées adoptées par certains Etats membres depuis le
début de la crise », a dénoncé le ministre, en soulignant
que le « protocole accorde aux émissaires de la Ligue arabe
des prérogatives très amples, voire impossibles, pouvant
aller jusqu’à la violation de la souveraineté nationale ».
Pour les autorités syriennes, le plan, en l’état, attente à
la souveraineté de la Syrie, mais Damas ne rejette pas pour
autant la mission de la Ligue arabe. Cette mission doit être
composée de 500 membres d’organisations de défense des
droits de l’homme, de médias et d’observateurs militaires,
pour s’assurer de la sécurité des populations civiles dans
les zones en proie aux violences. La Ligue arabe avait donné
mercredi dernier un délai de trois jours au président
Assad pour qu’il mette fin à la
répression, sous peine de sanctions économiques, après avoir
suspendu la participation de son pays à l’organisation
panarabe. Le 2 novembre, Damas avait dit accepter un plan
arabe de sortie de crise sans toutefois l’appliquer sur le
terrain. Outre un arrêt total des violences, ce plan
comprend notamment l’autorisation pour les organisations
concernées de la Ligue arabe et les médias arabes et
internationaux de se déplacer librement partout en Syrie
pour s’informer de la réalité de la situation.
Négligeant l’attitude arabe, Mouallem
a d’autre part minimisé l’importance de l’ultimatum de la
Ligue arabe, qui avait menacé la Syrie de sanctions
économiques si les violences ne cessaient pas, affirmant
qu’un accord était encore possible sur le projet arabe
d’envoyer une délégation d’observateurs en Syrie. « Nous, en
Syrie, ne considérons pas que l’ultimatum est une question
importante, le contenu est ce qui est important, et parvenir
à un accord avec la Ligue arabe est ce qui compte », a
expliqué Mouallem, tout en
accusant certains membres de la Ligue arabe d’utiliser
l’organisation comme un « outil » pour parvenir au Conseil
de sécurité de l’Onu. « On ne peut pas prendre de décisions
précipitées. Ce qu’il faut c’est une réflexion rationnelle,
car certains dans le monde arabe utilisent la Ligue arabe
comme un outil pour parvenir au Conseil de sécurité »,
dit-il.
Essayant de jeter la balle dans le camp des Arabes, le
président syrien a accusé la Ligue arabe de créer un «
prétexte » à une intervention militaire occidentale qui
provoquerait un « séisme » dans la région. Il a souligné que
« la Syrie ne s’inclinera pas. Le pays est tout à fait prêt
à combattre et à mourir s’il devait affronter des forces
étrangères. Si le combat nous est imposé, nous combattrons
», a affirmé le ministre des Affaires étrangères, Walid
Mouallem, rejetant en outre les
craintes de guerre civile exprimées par ses homologues
américain, Hillary Clinton, et turc, Ahmet
Davutoglu.
Pour renforcer les pressions sur le régime syrien, Mme
Clinton avait dit penser qu’il pourrait y avoir « une guerre
civile, avec une opposition très déterminée, bien armée, et
finalement, bien financée ». Avis partagé par le ministre
turc des Affaires étrangères. Davutoglu
avait déclaré que des déserteurs se manifestaient ces
derniers temps, et de ce fait, il y a un risque d’évolution
vers la guerre civile.
Des déclarations refusées par les autorités syriennes.
Mais la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne comptent
présenter une résolution à l’Assemblée générale de l’Onu
condamnant la répression en Syrie, assurant avoir le
soutien-clé des pays arabes.
Le succès d’une telle démarche pourrait augmenter la
pression sur le Conseil de sécurité, où la Russie et la
Chine avaient le mois dernier opposé leur veto à une
résolution condamnant Damas.
Pour affaiblir les autorités syriennes, le président turc
Abdullah Gul a assuré qu’il n’y
avait « plus de place pour des régimes autoritaires » tels
que le régime syrien. Après avoir tenté de raisonner la
Syrie, la Turquie a durci le ton et soutient désormais
l’opposition.
Les souhaits de l’opposition
En effet, l’opposition, par la voix du Conseil
National Syrien (CNS), regroupant la majorité des courants
de l’opposition, a annoncé dimanche dernier un projet de
programme politique ayant pour objectifs la chute du régime
et la tenue d’élections d’une Assemblée constituante à
l’issue d’une période transitoire d’un an.
Selon ce projet diffusé sur son site Internet, une fois la
chute du régime réalisée, le conseil « dirigera le pays avec
l’institution militaire ». « Un gouvernement temporaire sera
formé et il sera chargé d’organiser des élections libres au
bout d’un an sous une supervision arabe et internationale,
pour désigner une Assemblée constituante avec pour mission
d’élaborer une nouvelle Constitution », ajoute le texte. Le
CNS proclame que la chute du régime syrien et de tous ses
symboles est l’objectif de ce conseil qui représente la
majeure partie des forces politiques, des groupes de
l’opposition et des mouvements dirigeant la contestation. Le
Conseil affirme vouloir préserver la nature pacifiste de la
révolte et dit souhaiter œuvrer à construire un Etat civil,
démocratique et pluraliste, avec un système parlementaire.
Dans ce document, le CNS prévoit l’égalité des citoyens, la
séparation des pouvoirs, la protection et la garantie des
droits des minorités.
La nouvelle Constitution sera soumise à un référendum et,
une fois adoptée, des élections législatives seront
convoquées dans un délai de six mois. Le Conseil national
syrien a été lancé officiellement le 2 octobre à Istanbul.
Il regroupe notamment les Comités locaux de coordination (LCC)
qui chapeautent les manifestations sur le terrain, les
libéraux, la confrérie des Frères musulmans interdite de
longue date en Syrie, ainsi que les Kurdes et les Assyriens.
Le CNS n’a été reconnu jusqu’à présent que par les nouvelles
autorités libyennes. Certains pays occidentaux estiment que
le CNS devait « s’organiser » avant toute reconnaissance
officielle. Bachar Al-Assad
fait face, depuis la mi-mars, à une contestation sans
précédent de son régime qu’il réprime dans le sang. Selon
l’Onu, cette répression a fait plus de 3 500 morts.
Faisant la sourde oreille, le président
Assad, au pouvoir depuis 2000, affirme que son
régime, qui ne reconnaît pas l’ampleur de la contestation et
impute les violences à des groupes armés, doit faire
respecter la loi. « Mon rôle de président est dans l’action,
la seule solution est de chasser les bandes armées,
d’empêcher l’entrée d’armes et de munitions depuis des pays
voisins et de faire respecter la loi et l’ordre », a-t-il
dit.
En première réaction à ses déclarations, l’Armée Syrienne
Libre (ASL), qui regroupe des soldats insoumis, a intensifié
son action ces dernières semaines, menant des attaques à la
roquette contre des centres des services secrets et du parti
au pouvoir.
Commentant ces actes, l’ASL a expliqué qu’elle réplique de
la sorte au refus du régime de libérer les dizaines de
milliers de prisonniers politiques qu’il détient, et de
renvoyer l’armée dans ses casernes comme le lui demande la
Ligue arabe .
Maha
Salem