Place tahrir .
Le fait que les élections soient surveillées par des ONG
égyptiennes et étrangères n’est pas une garantie de
transparence. Seule la participation massive des Egyptiens
peut éviter la fraude.
Une observation de pure forme
Cinq jours tout juste et les Egyptiens éliront l’un des plus
importants Parlements de l’histoire de leur pays. Un
Parlement censé aider le pays à traverser sans encombre la
période de transition et le guider vers un avenir meilleur.
Le succès de ces législatives sera aussi un indice de
réussite pour la révolution du 25 janvier. Chacun a son rôle
dans cette opération politique : le citoyen, le candidat,
l’Etat et bien sûr la société civile et les ONG chargées
d’observer ces élections.
« Les médias ont dit aux citoyens que la présence des ONG
assure la transparence des élections et empêche les fraudes
mais c’est totalement faux », déclare Ahmad Fawzi, directeur
de l’Association du développement de la participation
sociale, une des ONG chargées de suivre le déroulement des
élections. Il ajoute que ce qui garantit le succès de ce
processus sans infractions, c’est la bonne volonté du
Conseil Suprême des Forces Armées (CSFA) et du Conseil des
ministres.
La Haute commission électorale a réglementé le processus
d’observation des élections. Toute organisation non
gouvernementale qui souhaite faire partie de ce processus
doit obligatoirement être inscrite en tant qu’association
travaillant dans le domaine politique. Et ces ONG doivent
présenter leurs documents au Conseil national des droits de
l’homme. Celui-ci jouera le rôle d’intermédiaire entre l’ONG
et la Haute commission électorale. Cette dernière requiert
les diplômes de chaque observateur et une photocopie de la
carte d’identité. Il s’agirait à première vue de mesures
destinées à s’assurer de la crédibilité des observateurs.
Mais pour les ONG, le but est de mettre des obstacles face à
la société civile. « Le but de toutes ces choses c’est de
nous mettre les bâtons dans les roues. Au début, ils ont
exigé qu’une somme d’argent soit payée pour chaque
observateur », explique Ahmad Fawzi, ajoutant que ces sommes
constituent un fardeau financier pour le budget des ONG, qui
doivent envoyer des centaines d’observateurs durant les
élections. Mais sous la pression des associations, cette
condition a été annulée récemment.
La
question qui se pose à présent est la suivante : ces
observateurs peuvent-ils empêcher la fraude ? Ce n’est pas
sûr. Car, durant les élections de 2005 et 2010, il y a eu
une fraude massive malgré la présence de ces observateurs.
Le problème est que ces observateurs sont sous l’ordre des
juges, qui sont les chefs des bureaux de vote. Et d’après le
règlement établi par la Haute commission électorale, le juge
peut ne pas accepter la présence des observateurs dans les
bureaux de vote si ceux-ci sont encombrés. Les juges peuvent,
en outre, retirer aux observateurs leurs permis en cas de «
non-respect des règles de bonne conduite à l’intérieur du
bureau de vote ».
En ce
qui concerne les organisations ou les associations
étrangères qui souhaitent observer les élections, la Haute
commission électorale les autorise à le faire à condition
d’avoir l’approbation du ministère des Affaires étrangères.
En revanche, les représentants de certaines ambassades
seront présents lors du vote et feront office d’observateurs.
Tous les rapports élaborés par ces différentes parties sur
le déroulement du vote n’ont pas de caractère contraignant
pour le gouvernement. Les observateurs présenteront leurs
rapports à la Haute commission électorale, aux médias, et
aux organisations internationales. Dans de telles
conditions, qu’est-ce qui garantit l’intégrité des
prochaines élections ? Il est vrai que ces élections sont
surveillées par des magistrats et des juges mais cela
soulève plutôt des doutes chez certains. Car les élections
de 2005 avaient vu des fraudes massives malgré la présence
des juges. « La seule chose qui peut garantir la réussite
des prochaines élections c’est la participation massive des
électeurs », explique Yousri Al-Gharabawi, chercheur au
Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS)
d’Al-Ahram.
Et de
conclure : « Au même titre qu’ils ont réussi à renverser le
régime de Moubarak, les Egyptiens réussiront à élire leur
Parlement sans encombre » l
Chérine Abdel-Azim