Entretien .
Le syndicat des Journalistes appelle ses membres à ne pas
comparaître devant les tribunaux militaires. Gamal
Fahmi, membre du conseil, évoque
une nouvelle phase d’action syndicale.
« Le syndicat des Journalistes ne restera pas muet devant
les violations »
Al-ahram hebdo : La décision du
syndicat des Journalistes de soutenir ses membres dans leur
rejet des procès militaires est une première au niveau de
tous les syndicats professionnels et toutes les unions
ouvrières. Comment cette décision a-t-elle été prise ?
Gamal Fahmi :
C’est une décision qui a été prise à l’unanimité par tous
les membres du conseil syndical. Nous avons jugé important
de soutenir non seulement les journalistes, mais aussi tout
citoyen civil qui serait convoqué pour comparaître devant
les cours militaires. Il s’agit d’une position commune de
notre syndicat. Le syndicat refuse ce genre de justice pour
les civils. Notre position a notamment pour objectif ultime
de mettre un terme à ce phénomène. Les civils ont le droit
d’être jugés devant leur juge naturel. C’est une garantie de
justice et d’équité pour les personnes accusées, quelles que
soient leurs accusations.
— Quels sont les mécanismes que le conseil du syndicat a
adoptés pour concrétiser cette prise de position ?
— Les mécanismes ne sont pas compliqués. Il s’agit pour le
journaliste convoqué à comparaître devant un tribunal
militaire de ne pas en prendre acte. Il doit simplement
refuser de répondre à cette convocation. C’est simplement un
appel à faire respecter nos droits. Il ne s’agit pas d’un
acte de révolte de la part de notre conseil, mais d’une
conviction de l’illégitimité de traduire les civils devant
les cours militaires. Les codes pénal et civil prévoient des
sanctions suffisantes contre toutes sortes d’infractions ou
de crimes. A la limite, les autorités peuvent avoir recours
à la loi d’urgence toujours en vigueur.
Je pense que notre position représente une pression morale
vis-à-vis des autorités qui sont appelées à rompre avec
cette pratique.
— Pourtant, le syndicat des Journalistes a toujours été
connu pour sa modération. Cette position ne risque-t-elle
pas de vous mettre à dos le pouvoir ?
— Le conseil actuel qui vient d’être élu il y a quelques
semaines est le premier conseil après la révolution du 25
janvier. Il ne cherche pas à faire plaisir au pouvoir. Nous
sommes plus concernés par la défense des droits des civils,
notamment ceux de nos membres. A mon avis, cette position
est venue rompre avec le mutisme souvent adopté auparavant
face aux problèmes de ce genre. Désormais, le syndicat des
Journalistes ne restera pas muet face aux violations des
droits de l’homme.
— Et quelle sera la réaction des autorités à votre avis ?
— Une réaction stupide consisterait à émettre un mandat
d’arrêt contre le journaliste ou le citoyen concerné. Dans
ce cas, nous allons actionner nos moyens de pression dont on
dispose, à savoir les manifestations et les sit-in. Les
journalistes possèdent d’autres armes morales, notamment
celle de publier des pages blanches. Cela dit, quelle que
soit la réaction des autorités, nous serons du côté des
membres du syndicat et de tous les citoyens pour sauvegarder
leurs droits civils .
Propos recueillis par
Rasha
Hanafy