Coupures de presse.
Pour l’écrivain Khaled Al-Khamissi,
les Américains privilégient la transaction avec les Frères,
le penseur Fahmi
Howeidy revendique une nouvelle
élite et le jeune scénariste Bassem
Charaf revient sur la mauvaise
expérience chilienne.
Cherchez les responsables !
« Mahattet Misr (la célèbre gare
ferroviaire du Caire) sous les eaux deux semaines seulement
après son inauguration », titre le quotidien Al-Wafd dans sa
livraison de dimanche. La gare qui se trouve sur la place
Ramsès « venait de subir un lifting qui a coûté 170 millions
de L.E., mais une canalisation centrale a lâché, inondant
les quais et les parkings », écrit le journal. Le même jour,
c’est la place Tahrir qui était
inondée de colère et de violence. En fait, cet incident de
la gare explique la situation dans laquelle se trouve
l’Egypte actuelle. Une situation où l’on tente de faire du
neuf avec du vieux. Comme les promoteurs de la gare, les
décideurs politiques n’ont eu de cesse de passer outre un
réel changement. Alors que les blessés et les familles des
martyrs de la révolution demandent de juger les
responsables. Le général Mohsen
Al-Fangari, membre du Conseil
militaire, rétorque dimanche lors d’une conférence de presse
: « Les forces de l’armée accomplissent leur mission en ce
qui concerne la prise en charge médicale des blessés »,
comme le rapporte le journal Al-Shorouk.
Sur Facebook, une page créée ce
même dimanche a commencé à appeler à attaquer la télévision
égyptienne, où rien n’a changé, ce 25 novembre. En
attendant, des pirates ont attaqué son site, comme le
rapporte la page du mouvement du 6 Avril et « se sont moqués
des médias officiels égyptiens qui usent des mêmes procédés
utilisés du temps de Moubarak ». Au-delà des conflits
laïques-islamistes, législatives-Constitution, etc., c’est
du changement qu’il s’agit. C’est un legs pesant et purulent
face à un élan jeune, vif et fougueux.
Dans Al-Shorouk du dimanche,
l’écrivain Khaled Al-Khamissi
donne son point de vue sur la situation actuelle où les
islamistes se placent en première ligne. « Les Américains
ont accepté la transaction avec les Frères et nous avons
commencé ces derniers jours à entendre presque
quotidiennement la bénédiction d’Obama
à une victoire de ces derniers aux législatives. Et depuis
février, nous assistons à une campagne dans les médias
égyptiens en faveur des Frères musulmans, mettant l’accent
sur leur combat politique et le prix exorbitant qu’ils ont
payé. Bien sûr, tout cela est diffusé, sans rappeler ni le
parcours des hommes de la confrérie dans les Parlements
précédents et leurs relations floues avec le régime Moubarak
ni les rapports de leurs hommes d’affaires avec les clans du
système financier régional et mondial et leurs réseaux
complexes avec l’Arabie saoudite ». Dans Al-Masry
Al-Youm, le journaliste
Yousri
Fouda surfe sur la même vague et écrit : « Pourquoi
la position de Washington laisse entendre que l’Occident,
qui a été obligé de choisir entre deux mauvaises options
selon son point de vue, a décidé que sa capacité à supporter
les islamistes est plus forte que celle à faire face au nerf
réel du printemps arabe incarné par une nouvelle génération
? Cette question est adressée aux islamistes eux-mêmes et à
tous ceux qui ont encore du mal à faire leur choix ». Selon
les deux auteurs, Washington et l’Occident en général
seraient eux aussi frileux par rapport à ce printemps arabe
aux multiples variables et inconnues.
Pour le penseur et écrivain Fahmi
Howeidi, même le débat
islamistes-libéraux est dépassé. Il appelle à la naissance
d’une nouvelle élite pensante : « Il y a une insistance de
la part de certains à partager le pays en deux camps : les
islamistes et les libéraux ». Selon lui, les élites traînent
encore de vieilles batailles qui ont sévi les cinquante
dernières années entre laïcs et islamistes. Ces élites ne
vont plus de pair avec l’esprit du 25 janvier. « Cette élite
ferait-elle désormais partie du problème de l’Egypte après
la révolution au lieu d’en être l’espoir ? ».
Côté jeune, un article du cinéaste et écrivain
Bassem
Charaf, publié dans le journal en ligne Al-Badil
après un refus de publication dans le journal Al-Akhbar,
fait allusion à l’expérience chilienne et comment le pays a
basculé dans la dictature avec un coup de pouce américain
après des élections libres en 1970. « Ils sont restés 17 ans
sous la dictature. Cette histoire vous rappelle-t-elle
quelque chose ? Vous n’avez qu’à substituer dans cette
histoire le nom Chili par Egypte. Et vous saurez ce que
veulent les militaires ». Les jeunes en faction à
Tahrir depuis samedi se sont
retrouvés devant les mêmes procédés du passé. Et l’un d’eux,
jeune dentiste qui a perdu un œil le 28 janvier dernier, a
été atteint au deuxième œil lors des dernières
manifestations et est devenu aveugle. « Vivre aveugle et la
tête haute vaut mieux que de vivre voyant et humilié »,
c’est son message diffusé sur le Net..
Najet
Belhatem