Al-Ahram Hebdo, Economie | Aucune catastrophe en perspective

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 Semaine du 23 au 29 novembre, numéro 897

 

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Economie

Industrie . Le secteur reste confiant malgré le ralentissement économique. A la zone industrielle du 6 Octobre, les entreprises affirment maintenir le cap en dépit de « quelques problèmes ».

Aucune catastrophe en perspective

Dans la ville du 6 Octobre, une des plus grandes zones industrielles du pays, située à 23 km du Caire, tout semble normal malgré les aléas politiques.

Créée en 1981, la ville du 6 Octobre abrite 9 zones industrielles. Le total des investissements en infrastructures et en machinerie s’élève à 40 milliards de L.E. pour 200 000 ouvriers (voir encadré). Chose étonnante, 10 mois après la révolution, l’activité des usines n’est pas fortement touchée.

Même les petites usines réussissent à survivre : sur 2 000 usines, seules 7 ont dû fermer, un chiffre loin d’être catastrophique. « Il y a ceux qui sont optimistes et estiment qu’il y aura des opportunités à l’avenir. Beaucoup d’investisseurs ont juste remis leurs plans d’expansion à plus tard », explique Mohamad Chammah, directeur du développement de la zone industrielle spécialisée C.P.C., une des nouvelles zones industrielles créée en 2008.

C’est notamment grâce à une demande locale soutenue que les machines tournent encore. Selon Chammah, la demande n’a été ralentie que pendant les deux mois qui ont suivi la révolution : « Cinq nouvelles entreprises ont lancé des projets au sein du C.P.C. dans les domaines des produits alimentaires et de la construction ».

Paradoxalement, c’est le manque de terrain qui a freiné l’expansion de plusieurs projets. « Nous avons reçu 70 demandes d’achat de terrain auxquelles nous n’avons pas pu répondre », dit Chammah.

Mais malgré ces problèmes, plusieurs investisseurs ont des plans d’expansion à moyen terme. « Une chose est sûre : les travaux de construction seraient plus rapides s’il y avait une stabilité politique et économique », affirme toutefois Chammah.

Pour d’autres usines, les marchés extérieurs ont représenté une véritable bouée de sauvetage. « Pour maintenir leur niveau de production, beaucoup d’investisseurs ont cherché à exporter davantage. La Libye offre, par exemple, beaucoup d’opportunités à l’avenir », assure Magdi Abdel-Moneim, vice-président de l’Association des investisseurs du 6 Octobre.

Un espoir partagé par Ahmad Arafa, directeur exécutif de l’entreprise Alural, spécialisée dans l’aluminium. « Nous ne nous sommes rendu compte de l’importance de nos exportations vers la Libye qu’après leur suspension. Mais la reconstruction de la Libye engendrera un véritable essor des exportations égyptiennes ».

C’est dans cette optique que certains investisseurs anticipent et construisent de nouvelles entités de production comme Bariq, une succursale de Raya Holding. Bariq est spécialisée dans la production du BET, une matière première qui entre dans la production du plastique. « Nous sommes les premiers dans cette activité en Egypte. Notre entreprise peut couvrir 15 % des besoins du marché local. Si la demande locale sur nos produits baisse, nous ne serons pas affectés. Nos produits sont utilisés dans la fabrication des bouteilles d’eau et d’huile, entre autres, et la demande sur ces produits est stable », estime Khaled Chash, président de Bariq.

La société Egypt for Engineering Industries (EEI), qui produit des pièces détachées destinées au marché automobile, maintient elle aussi ses projets en construction. « Nous avons deux usines qui vont commencer leur production en décembre et janvier. De plus, nous avons un autre projet en construction. Nous maintenons nos plans d’expansion car les ventes de voitures n’ont pas été trop fortement affectées », assure Ihab Ibrahim, directeur général d’EEI. Sa société n’a vu sa production baisser que de 5 à 6 %, un taux qu’Ihab Ibrahim considère comme acceptable.

Art Ceramic — dont l’activité a commencé deux mois avant la révolution — révèle être capable de vendre la totalité de sa production. « Nous offrons plusieurs produits qui n’existaient pas avant sur le marché égyptien. On les vend à un prix bien inférieur à leurs équivalents importés », dit Hoda Khaïry, vice-présidente de l’entreprise.

Mais la situation n’est pas identique dans tous les secteurs. Le ralentissement sévère dont souffrent le tourisme et l’immobilier a causé une baisse de la demande dans certaines industries. « Nos ventes sont en partie liées au développement des projets touristiques. Mais actuellement, notre production destinée à ce secteur est insignifiante. En général, le marché est en baisse. Si nous n’avions pas de réserves financières, nous aurions dû déposer le bilan », poursuit Hoda Khaïry. Alural Egypt travaille aussi dans la construction de façades d’immeubles en verre et en aluminium et souffre de l’arrêt de plusieurs projets. « On travaille à 50 % de notre capacité de production », se plaint Mohamad Arafa, directeur de l’usine d’Alural. L’entreprise mère d’Alural a dû licencier 8 % de l’effectif, soit 800 ouvriers mis au chômage faute de développement.

Vol, grèves et lourdeurs bureaucratiques

Les investisseurs expriment leur inquiétude vis-à-vis de la période transitoire. Pour eux, la transition est devenue synonyme de manque de sécurité, de lenteur des procédures bureaucratiques et de grèves.

En plus du manque de perspective à court terme, certains industriels font aussi face à une absence de sécurité. Vols et actes de violence sont désormais courants. « Au début de la révolution, ça allait. Mais les vols se sont multipliés et les usines ont été obligées de fermer pendant les semaines qui ont suivi la révolution pour éviter les attaques », explique Magdi Abdel-Moneim, vice-président de l’Association des investisseurs du 6 Octobre, une ONG qui regroupe les plus grands industriels de la ville.

Les investisseurs disent surtout être affectés par les grèves ou les protestations, que ce soit au sein de leurs usines ou dans d’autres secteurs. Les manifestations récentes à Damiette ont eu des conséquences importantes. « Nos distributeurs les plus importants sont à Damiette. On ne parvenait pas à leur livrer nos produits », explique Hoda Khaïry d’Alural. Des retards qui peuvent s’avérer fatals pour Tammam Abdel-Aziz, PDG de l’Entreprise égyptienne pour les systèmes électriques. « J’ai des cargos disponibles mais ils sont bloqués à quai à cause des grèves. Si on ne respecte pas les délais de livraison, Daimler, notre client, trouvera des alternatives pour produire en Ukraine ou en Roumanie », explique-t-il.

Pour corser le tout, la bureaucratie est devenue plus lourde qu’avant la révolution. « Nous traitons avec le gouvernement et aujourd’hui, le gouvernement est incapable de prendre la moindre décision. Les procédures sont donc devenues plus compliquées », ajoute Tammam Abdel-Aziz.

Le président de l’entreprise Bariq, Khaled Chash, le confirme : « Obtenir des permis pour l’expansion de l’usine est devenu plus difficile. Certains de ces permis ont été annulés, car les officiels ne veulent pas prendre la responsabilité de prendre leurs décisions ». Chash, comme plusieurs de ses voisins à la ville de 6 Octobre, estime que cela va continuer tout au long de la période transitoire, « tant que les institutions de l’Etat ne seront pas reconstruites. On croyait au départ que la période transitoire allait être plus courte » .

Marwa Hussein
Névine Kamel

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Les zones industrielles en chiffres

— Nombre d’usines en Egypte : 22 000.
— Nombre d’employés dans le secteur : 3,7 millions.
— Nombre de projets : 237.
— Volume des projets d’investissements : 300 milliards de L.E.
— Part de l’industrie dans le PIB : 12,3 %.
— Nombre des usines fermées depuis la révolution : pas de données.
— Nombre des employés licenciés depuis la révolution : pas de données.

 




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