Al-Ahram Hebdo,Monde | Téhéran ne cède pas

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Iran . Les efforts internationaux s’accentuent en vue d’isoler une République islamique qui n’est toujours pas prête à reculer d’un iota sur ses droits nucléaires.

Téhéran ne cède pas

Les pressions s’accentuent sur le régime iranien de plus en plus isolé sur la scène internationale. Vendredi, le Conseil des gouverneurs de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) a adopté une résolution contre l’Iran, soupçonné d’avoir envisagé la mise au point de l’arme atomique. Mais comme la Chine et la Russie s’y opposaient, l’AIEA n’a pas fixé d’échéance pour éclaircir les points en suspens exprimés dans le rapport sévère remis le 8 novembre par le directeur général de l’AIEA, Yukiya Amano. Ce rapport, qui indique que Téhéran a travaillé à la mise au point d’une arme nucléaire, a aggravé les tensions au Moyen-Orient et a relancé les pressions occidentales en faveur d’un durcissement des sanctions contre la République islamique. Cette récente résolution, qui a été adoptée à une très large majorité, par 32 voix pour, 2 contre (Cuba et Equateur) et une abstention (Indonésie), sur 35 Etats membres, exprime « la profonde et croissante préoccupation internationale » sur le programme nucléaire de Téhéran. Elle demande aussi à Yukiya Amano d’informer le Conseil des gouverneurs lors de sa prochaine réunion en mars sur la mise en œuvre de la résolution. M. Amano avait annoncé avoir proposé l’envoi d’une mission « d’experts de haut niveau » en Iran pour clarifier tous les points litigieux listés dans l’annexe de son rapport.

En fait, la récente résolution de l’AIEA a mis au grand jour les profondes divergences au sein des 5 membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu sur le dossier, avec d’un côté Européens et Américains, partisans — pour le moins — d’augmenter la pression sur l’Iran, et Russes et Chinois de l’autre, nettement plus modérés face à l’Iran, un important partenaire commercial. Alors que la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et la Maison Blanche ont salué la résolution de l’AIEA, soulignant la volonté des Etats-Unis de maintenir la pression sur l’Iran, la Chine et la Russie ont affirmé, de leur côté, que les sanctions ou les actions militaires ne pourraient en aucun cas résoudre le problème et menacent de compliquer la situation. Pour Moscou et Pékin, la poursuite du dialogue entre Téhéran et les six grandes puissances est une priorité.

Cherchant de plus en plus à isoler la République islamique, l’Assemblée générale des Nations-Unies a adopté, à une forte majorité cette semaine, une autre résolution exigeant la coopération de l’Iran dans l’enquête sur le complot iranien présumé visant à assassiner l’ambassadeur saoudien à Washington. La résolution qui a été adoptée par une majorité de 106 pays pour, 9 contre et 40 abstentions, déplore le complot et incite l’Iran à respecter le droit international. Une façon ou une autre de culpabiliser Téhéran aux yeux du monde. Le texte demande aussi aux Etats membres de l’Onu de refuser l’asile à ceux qui planifient, financent et soutiennent ou commettent de tels actes terroristes. 

Liant cette résolution à celle de l’AIEA promulguée contre son pays, l’ambassadeur iranien à l’Onu a déduit qu’il s’agit d’une manière d’isoler l’Iran sur la scène internationale. Samedi, la Maison Blanche a salué le vote, estimant que le soutien de nombreux pays à cette résolution envoyait un message fort au gouvernement iranien pour dire que la communauté internationale ne tolère pas que des diplomates soient pris pour cible. « L’isolement de l’Iran est sans précédent après la résolution de l’Onu », s’est réjoui un haut responsable américain.

Les Etats-Unis avaient accusé l’Iran d’avoir planifié l’assassinat de l’ambassadeur Adel Jubair, ce que Téhéran dément fermement. Le principal accusé dans l’affaire, Mansour Arbabsiar, un Américano-iranien, a plaidé « non coupable » devant un juge de New York. Téhéran parle d’un scénario monté de toutes pièces visant à renforcer l’isolement de la République islamique sur la scène internationale.

Téhéran hausse le ton

Faisant fi de toutes les pressions internationales visant à l’isoler, l’Iran a de nouveau rejeté les assertions sur une dimension militaire de son programme nucléaire. L’ambassadeur iranien auprès de l’AIEA, Ali Asghar Soltanieh, qualifie le rapport de « non-professionnel, déséquilibré, illégal et politisé ». « Le seul effet immédiat de la résolution est de renforcer encore la détermination de la nation iranienne à poursuivre ses activités nucléaires dans un but pacifique, sans aucun compromis », a déclaré M. Soltanieh. « Nous ne suspendrons pas nos activités d’enrichissement d’uranium, même pour une seconde. Nous sommes plus déterminés qu’auparavant après cette résolution », a-t-il insisté.

Réfutant toutes les accusations internationales, l’ambassadeur iranien en poste auprès de l’AIEA, M. Soltanieh, a menacé l’Agence onusienne de poursuites judiciaires, surtout que le directeur général de l’Agence avait publié les noms des principaux scientifiques iraniens qui planchent sur la bombe atomique dans son rapport publié la semaine dernière. « L’agence sera tenue responsable si ces personnes sont tuées », affirme le diplomate iranien. Trois d’entre eux ont déjà été assassinés depuis l’année dernière. Affirmant qu’ils n’ont rien à cacher, les leaders iraniens ont affirmé samedi leur disposition à accueillir les visites de l’AIEA. « Nous avions envoyé une lettre pour inviter les autorités de l’AIEA à venir en Iran », a dit l’ambassadeur iranien auprès de l’agence à Vienne.

Relevant de plus en plus le défi à la communauté internationale, l’Iran a annoncé son intention de boycotter une réunion la semaine prochaine organisée par l’AIEA et destinée à paver la voie pour un Moyen-Orient débarrassé de ses armes nucléaires. Ce dernier affirme que son pays n’y assistera pas en raison des « doubles critères » de son hôte, Yukiya Amano, qui n’a même pas cité les capacités nucléaires d’Israël. « Comment pourrions-nous y participer ? », a déclaré Soltanieh. « Nous ne pensons pas qu’une participation serait très fructueuse », a-t-il dit, évoquant le refus par Israël de signer le Traité de Non-Prolifération des armes nucléaires (TNP).

L’ambassadeur iranien, Mohammad Khazaee, avait de son côté appelé à voter contre le projet de résolution, estimant qu’il « était basé sur une revendication infondée par un Etat qui a une longue histoire d’animosité contre mon pays », faisant référence aux Etats-Unis. L’adoption de cette résolution « serait un jeu très dangereux qui saboterait la crédibilité de cette importante assemblée », a-t-il dit.

Passant de la parole à l’acte, les forces armées iraniennes ont annoncé qu’elles vont se livrer à un exercice de défense aérienne pour se préparer à des menaces potentielles dans l’espace aérien, et particulièrement contre des zones peuplées, des sites sensibles importants et vitaux et contre des sites nucléaires, ont annoncé les Gardiens de la Révolution. Des systèmes avancés de missiles, des radars, de l’artillerie de défense aérienne et des avions de combats seront utilisés dans cet exercice. La République islamique se livre à ce genre d’exercices deux à trois fois par an, le dernier ayant eu lieu en septembre dernier. Cet exercice, qui aura lieu dans l’est du pays, vise également à coordonner les actions des Gardiens et de l’armée. Il semble que le jeu du chat et de la souris engagé entre l’Iran et la communauté internationale est loin de prendre fin .

Maha Al-Cherbini

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