Somalie . La tension
continue entre les insurgés shebab et le Kenya, notamment après la demande de
ce dernier d’intégrer l’Amisom.
Nairobi veut légitimer son action
La
tension est montée d’un cran cette semaine encore en Somalie. Des accrochages
acharnés ont eu lieu entre les insurgés shebab d’un côté et les forces
gouvernementales somaliennes soutenues par les troupes africaines de l’autre. Les
autorités kényanes ont décidé de renforcer leurs troupes dans le pays. Les
combats au sud de la Somalie entre les shebab et les forces kényanes avaient
commencé il y a un mois. Nairobi cherche à donner une raison légitime à son
intervention au sud de la Somalie. La semaine dernière, les autorités kényanes
ont demandé à l’Union Africaine (UA) de participer à la force de la mission de
l’Union africaine en Somalie (Amisom). Une annonce faite à l’issue d’une
rencontre entre les présidents kényan, ougandais et somalien à Nairobi. Pour sa
part, l’Union africaine s’est déclarée favorable à la proposition du Kenya
d’intégrer l’Amisom. Un rapprochement qui reflète le changement de stratégie de
Nairobi alors que ses troupes sont en voie d’enlisement en Somalie.
En
fait, le 14 octobre 2011, le Kenya a engagé son armée en Somalie pour combattre
les insurgés islamistes shebab. Plusieurs milliers de soldats sont entrés dans
le sud de la Somalie pour accroître la pression militaire sur les insurgés et
par suite, les neutraliser. Le Kenya accuse les shebab, qui contrôlent la plus
grande partie du sud et du centre de la Somalie, d’enlèvements et d’actes
terroristes sur son sol. Le Kenya s’est engagé au sud de la Somalie suite à
l’une de ces opérations, qui avait abouti à la capture de plusieurs étrangers
et causé la mort d’une otage française, ainsi que l’attaque d’une discothèque à
Nairobi. Cette offensive unilatérale du Kenya, considérée comme une légitime
défense, n’a été critiquée ni par l’Union africaine, ni par les Nations-Unies. Mais
pour poursuivre ses opérations, pour ne pas être accusé de mener son propre
agenda et de rechercher ses propres intérêts, le Kenya souhaite légitimer son
intervention. Une participation à l’Amisom lui offrirait donc un cadre
politique et juridique. De plus, le besoin de l’Amisom de renforcer ses forces
et les demandes joue en faveur du Kenya. En septembre dernier, le Conseil de
sécurité de l’Onu avait appelé l’UA à porter sa force en Somalie à son maximum.
Quant à l’Union africaine, elle a tout intérêt à ce que l’armée kényane
rejoigne sa force en Somalie. L’Amisom, déployée à Mogadiscio, ne cesse de
réclamer des effectifs supplémentaires pour neutraliser les shebab. Cela lui
permettrait aussi d’étendre sa mission dans le sud de la Somalie, là où les
militaires kényans interviennent depuis un mois, sans pour l’instant lancer
l’assaut sur le port de Kismayo, considéré comme le poumon économique des
insurgés.
L’Amisom
est actuellement composée de 9 700 soldats ougandais et burundais stationnés à
Mogadiscio, qui ont grandement contribué au retrait des shebab de la plupart de
leurs positions dans la capitale somalienne en août dernier. Djibouti s’est
engagé à fournir d’ici la fin de l’année un bataillon d’environ 850 soldats,
qui sera positionné à Mogadiscio. Pour sa part, le chef de l’Amisom a demandé à
bénéficier de 20 000 soldats. « Ce serait une avancée positive, puisque nous
avons appelé depuis longtemps à plus de contributions pour l’Amisom », a réagi
le secrétaire permanent du ministre ougandais des Affaires étrangères, James
Mugume. Ce dernier a plaidé en faveur d’un déploiement kényan sous la bannière
d’Amisom, jugeant que des opérations séparées de l’Amisom et l’armée kényane en
Somalie « pourraient créer des difficultés ». Finalement, Nairobi a réussi à
s’assurer un soutien régional, continental et international. Ainsi, cette
participation kényane à l’Amisom serait un accord gagnant-gagnant .
Sabah Sabet